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Département : Martine Vassal rechigne à aider Marseille

2 mars 2024

C’est un véritable psychodrame qui s’est joué cette semaine entre le maire de Marseille, Benoît Payan, et celle qui espérait bien le devenir à sa place mais s’était fait battre à plates coutures aux dernières élections municipales, tout en restant présidente de la Métropole Aix-Marseille-Provence et du Conseil départemental des Bouches-du-Rhône. C’est à ce dernier titre que Martine Vassal avait proposé de rencontrer le maire de Marseille, une commune qui concentre à elle-seule plus de 42 % de la population de tout le département.

L’enjeu de ces échanges qui se sont déroulés le jeudi 29 février 2024 était de discuter des subventions du Conseil départemental à la Ville de Marseille. Contrairement à ce qu’on pourrait croire en effet, le Département des Bouches-du-Rhône dépense plus d’argent en subventions accordées aux 119 communes de son territoire que pour assurer ses propres investissements destinés à remplir les missions obligatoires qui lui sont confiées. Le pli avait déjà été pris par Jean-Noël Guérini qui avait dirigé le Département de 1998 à 2015. A l’époque, le montant annuel des subventions aux communes atteignait en moyenne 103 millions d’euros par an. Lorsque Martine Vassal a pris la tête de l’institution, en 2015, elle a encore renforcé ce volet d’aide aux communes qui a atteint en moyenne un peu plus de 155 M€ par an !

Le Bateau bleu, siège du Conseil départemental des Bouches-du-Rhône à Marseille (source © Conseil départemental 13)

Le Département est désormais fortement endetté et ses finances sont dans le rouge comme le reconnait bien volontiers Yves Moraine, son vice-président délégué aux finances, qui évoque « un contexte apocalyptique » pour présenter le projet de budget 2024 avec pas moins de 155 M€ prévus en 2024 uniquement pour payer les annuités de la dette en cours ! Mais cela n’empêche pas cette institution de prévoir encore 148 M€, soit 21,7 % de son budget total d’investissement, uniquement en subvention aux communes. C’est bien davantage que les 120 M€ destinés aux collèges ou les 63 M€ consacrés aux routes départementales, lesquels constituent pourtant ses compétences principales !

Mais ces subventions colossales versées par le Département aux communes constituent une arme redoutable pour s’attacher la fidélité des maires qui sont totalement dépendants de cette manne pour boucler leur propre budget d’investissement et mettre en œuvre leurs projet. C’est notamment le cas de la ville de Carnoux qui a signé un contrat départemental de développement et d’aménagement pour la période 2020-2022, pour un montant de travaux de près de 8 M€, et qui arrive depuis des années à se faire financer par le Département de l’ordre de 60 % de ses dépenses annuelles d’investissement pourtant élevées pour une commune de cette taille.

Martine Vassal présente lors de l’inauguration de l’hôtel de ville de Carnoux, largement cofinancé par le Département et par la Métropole (photo © CPC)

La plupart des villes dirigées par la droite bénéficient ainsi de plantureuses subventions de la part du Conseil départemental, mais l’aide n’est pas équitablement répartie. Même la Chambre régionale des Comptes s’en était étonnée dans son rapport d’observation émis en octobre 2022 qui évoquait « des dépenses d’investissement orientées vers une politique de redistribution ».

Sur la période 2013-2020, elle avait ainsi calculé que la ville de Marseille avait perçu du Département un montant total d’aides cumulées évalué à 147 M€, ce qui représente environ 170 € par habitant sur cette période de 8 ans. Dans le même temps, une commune comme Gignac-la-Nerthe recevait du Département plus de 2600 € par habitant ! A Carnoux, où le budget prévoit chaque année de l’ordre de 2 M€ de subvention du Département, le ratio atteint 320 € par habitant et par an, ce qui revient à 2 500 € par habitant sur ce même laps de temps !

C’est d’ailleurs fort de ces éléments que le nouveau maire de Marseille avait interpellé son homologue du Conseil départemental sachant que le dernier contrat avait été signé en 2016 entre Martine Vassal, fraîchement élue à la tête du Département, et Jean-Claude Gaudin, toujours maire de Marseille, pour un montant de 200 M€ qui ne serait toujours pas dépensé en totalité. Lors du dernier conseil municipal, le 16 février 2024, Martine Vassal avait proposé de renouveler ce contrat, pour le même montant de 200 M€, sur la base d’une liste de projet qu’elle avait elle-même dressée en décembre dernier, choisissant ses propres priorités comme si elle était elle-même aux commandes de la commune, décidant d’investir en priorité dans le déploiement de nouvelles caméras de surveillance et l’installation de nouveaux commissariats de police, ainsi que dans la rénovation de la piscine de Luminy, d’une médiathèque et de cuisines scolaires.

Martine Vassal met la priorité sur la sécurité, ici avec des représentants de la police et des pompiers (photo © CD 13 / La Marseillaise)

C’était donc l’objectif de cette réunion du 29 février au cours de laquelle Martine Vassal avait invité le maire de Marseille au siège du Conseil départemental en prenant bien soin de préciser au préalable : « nous allons choisir ensemble les projets que le Département financera. Je soutiendrai les projets en accord avec ma vision, le Département n’est pas un tiroir-caisse ! ». Une main tendue que Benoît Payan a volontiers acceptée. Il s’est donc déplacé à la date convenue avec une liste de projets à financer, pour un montant global de 371 M€, arguant justement d’une nécessité de rééquilibrage de l’aide départementale en faveur des Marseillais jusqu’à présent plutôt lésés par ce dispositif.

Entre Martine Vassal et Benoît Payan, le torchon brûle (photo © Philippe Laurenson / La Provence)

Sauf que la main tendue s’est plutôt transformée en bras de fer, voire en doigt d’honneur entre les deux élus. Alors que la réunion s’était plutôt bien passée et qu’un communiqué commun était même envisagé avec une réunion technique prévue dans la foulée, Martine Vassal publie illico un communiqué affirmant que Benoît Payan est dans la surenchère et a refusé son chèque de 200 M€, l’accusant d’amateurisme et d’irresponsabilité. Une position immédiatement suivie par tout son camp politique, Renaud Muselier en tête qui tacle le maire de Marseille sur X : « il ne travaille pas, ne sait pas travailler. Un amateur qui tue Marseille », ambiance, ambiance…

Au Département des Bouches-du-Rhône, Martine célèbre l’armistice mais n’est pas encore prête à signer la paix avec Benoît… (source © Accents février 2018 – magasine du CD 13)

Une réaction qui laisse le maire de Marseille pantois et l’oblige à une mise au point, pour expliquer qu’il avait effectivement demandé une aide plus substantielle, sur la base d’une liste de projets précise, comme l’ont fait les autres communes du Département, mais qu’il ne refuse en aucun cas les 200 M€ proposés, se contentant même de 50 M€ si le Département n’est pas en capacité de faire plus, tout en regrettant ce traitement inéquitable qui défavorise les Marseillais. Une nouvelle réunion est programmée prochainement entre la maire de Marseille et la même Martine Vassal, cette fois en tant que présidente de la Métropole, mais on peut d’ores et déjà présager que le climat n’y sera probablement pas des plus cordial…

L. V.

Sainte-Victoire : la chasse aux œufs… de dinosaures

5 juillet 2023

A Pâques, la traditionnelle chasse aux œufs était cette année organisée par le Conseil départemental des Bouches-du-Rhône sur son site de Roques-Hautes, un vaste domaine départemental qui s’étend sur 800 hectares au pied de la montagne Sainte-Victoire, sur les communes d’Aix-en-Provence, de Beaurecueil, du Tholonet, de Saint-Antonin-sur-Bayon et de Saint-Marc Jaumegarde. Une chasse aux œufs en chocolats tout ce qu’il y a de plus classique pour amuser les plus petits, sauf que les œufs en question font référence aux œufs de dinosaures qui sont légions dans le secteur, au points que nombre de paléontologues anglophones ont surnommé le coin « Eggs en Provence »…

Affiche ludique du Conseil départemental pour la chasse aux œufs de Pâques (source © CD 13)

C’est en 1869 que le géologue Philippe Matheron a découvert et décrit les premiers restes fossilisés de dinosaures de Provence, découverts près de l’étang de Berre, tandis qu’Albert de Lapparent publiait en 1947 une première synthèse sur les dinosaures du sud de la France à partir de ses fouilles réalisées en 1939 sur le site varois de Fox-Amphoux. Dès 1935, des premiers œufs fossilisés de dinosaures sont découverts par Maurice Dérognat près de la Sainte-Victoire et c’est en 1952 que le conservateur du Musée d’histoire naturelle d’Aix-en-Provence, Raymond Dughi, et son adjoint, François Sirugue, font état de leurs propres observations, sur le site dit de Roques-Hautes, à Beaurecueil.

Œufs de dinosaures de la Sainte-Victoire (source © Grand site Sainte-Victoire)

Bien d’autres ont été exhumés depuis, dans toute la vallée de l’Arc, de Trets jusqu’à l’étang de Berre, mais ce site de Roques-Hautes est l’un des mieux conservés car entièrement préservé de l’urbanisation. Une réserve naturelle, fermée au public et s’étendant sur 140 ha, y a été créée en 1994, à la suite du dernier grand incendie qui avait presque entièrement ravagé le massif de la Sainte-Victoire fin août 1989, réduisant en cendre près de 5000 ha. C’est d’ailleurs en 1994 qu’a été exhumé, par Edgar Lorenz, un premier squelette complet de Rhabdodon priscum, exposé au musée d’Aix-en-Provence.

Squelette de Rhabdodon priscum (source © Futura sciences)

Les terrains dans lesquels ont été conservés ces œufs de dinosaures sont des argiles rougeâtres qui datent du Crétacé supérieur, il y a environ 74 millions d’années. A l’époque, tout ce secteur, parfois appelé bombement durancien, sépare le golfe méditerranéen au sud et la mer qui s’étend alors sur l’emplacement des Alpes actuelles. De nombreux cours d’eau le parcourent et les dépôts argileux dans lesquels on retrouve les œufs fossilisés correspondent aux berges de ces anciens cours d’eau : les œufs une fois éclos s’y échouaient et se remplissaient de sédiments, ce qui a permis leur conservation.

Le lit des cours d’eau de l’époque charriait des galets qui ont donné les grès actuels dans lesquels on retrouve désormais des ossements fossilisés, provenant principalement de deux espèces bien identifiées, les Rhabdodons, de gros herbivores pouvant atteindre 4 m de long pour 1,80 m de hauteur et peser jusqu’à 3 tonnes, ainsi que des Arcovenator, de redoutables carnassiers de près de 5 m de longueur. Les Rhabdodons affectaient les zones de lac (caractérisés par des dépôts de calcaires lacustres) au bord desquels ils venaient pondre leurs œufs dans les herbiers périphériques. A l’époque, la zone, située beaucoup plus au sud qu’actuellement, jouissait d’un climat chaud, quasi tropical, qui avait permis, durant le Crétacé moyen la formation de bauxite sur ces mêmes terrains.

Site du parc départemental de Roques-Hautes au pied de la Sainte-Victoire (source © MyProvence)

A la fin du Crétacé, sous l’influence de la plaque africaine qui remonte vers le nord, mouvement à l’origine de la formation des Pyrénées, tout le secteur se creuse d’une vaste ride, formant le synclinal de l’Arc, tandis que son flanc nord se plisse et qu’apparait un premier relief à l’emplacement approximatif de l’actuelle montagne Sainte-Victoire. Ces mouvements tectoniques intenses se poursuivent durant tout l’Éocène, au début de l’ère tertiaire, conduisant notamment à la formation de brèches qui ont d’ailleurs été exploitées comme calcaires marbriers. Puis, au cours de l’Oligocène, les mouvements tectoniques s’accentuent, en lien avec la formation de la chaîne alpine : le nouveau pli anticlinal qui s’est formé finit par se rompre et les terrains formant l’actuelle montagne Sainte-Victoire s’avancent vers le nord de près de 2 km sous forme d’un chevauchement sur les terrains sous-jacents.

Malgré cette complexité géologique, on retrouve donc, dans la réserve de Roques-Hautes, de très nombreux vestiges fossilisés datant de cette époque de la fin du Crétacé où Rhabdodons et Arcovenator abondaient. Les fouilles se sont multipliées depuis 2010 et voila donc que le Département a lancé, en collaboration avec le Musée d’histoire naturelle d’Aix-en-Provence et le ministère de la Défense (propriétaire d’un vaste terrain très convoité par la réserve naturelle car d’une grande richesse paléontologique), des campagnes faisant appel aux bonnes volontés pour venir fouiller le sol à la recherche des morceaux de coquilles d’œufs fossilisés.

Campagne Brossons des œufs sur les flancs de la Sainte-Victoire (source © page Facebook Réserve naturelle de Sainte-Victoire)

Intitulées « Brossons des œufs », ces campagnes, dont La Provence a rendu compte récemment, permettent d’associer aux fouilles de nombreux amateurs passionnés, ce qui contribue aussi à éviter les risques de pillage du site. Chacun peut en effet s’investir pour venir gratter la terre, mais en s’inscrivant à l’avance, comme c’était le cas lors de la dernière journée organisée, le 26 juin 2023 et en étant encadré par une équipe de spécialiste, qui profite de cette main d’œuvre bénévole et enthousiaste tout en prodiguant des conseils pédagogiques pour éviter que cet engouement ne se traduise en un saccage désordonné de vestiges miraculeusement conservés au fil des millénaires : une belle démarche de rapprochement entre scientifiques généreux et citoyens engagés !

L. V.

Toulon : l’affaire « Hubert eat »

17 avril 2023

La vie politique varoise n’a jamais été réputée pour sa sérénité ni pour la probité de ses élus locaux. Une réputation sans doute usurpée car elle connaît, comme partout, bon nombre de serviteurs intègres et dévoués de la République, n’hésitant pas à sacrifier leurs loisirs au service de l’intérêt public et de leurs concitoyens. Mais force est de constater qu’il existe parfois certains dérapages malheureux, de nature à discréditer la classe politique et à accentuer l’abstention électorale, voire l’extrémisme.

On se souvient notamment de la députée du Var, Yann Piat, ex FN ralliée à l’UDF, qui a payé de sa vie son engagement contre la corruption, lâchement assassinée de 5 balles le 25 février 1994, dans un climat de fortes tensions alors qu’elle envisageait de se présenter aux élections municipales dans la bonne commune d’Hyères-les-palmiers, alors surnommée « Hyères-les-bombes » tant les attentats, incendies criminels et règlements de comptes y étaient monnaie courante, dans un climat d’affairisme et de spéculation immobilière débridée. Un autre élu local, Daniel Perrin, adjoint au maire de la Seyne-sur-mer, avait lui aussi été assassiné par un autre commando à moto en août 1986.

La députée varoise Yann Piat, assassinée en 1994 (photo © Yves Sieur  / AFP / Le Journal de Saône-et-Loire)

Il faut dire qu’à l’époque, le président du Conseil général du Var, Maurice Arreckx, entretenait des relations assez étroites avec certains membres de la pègre locale, dont le truand Jean-Louis Fargette, fiché au grand banditisme, à qui Arreckx, maire de Toulon depuis 1959 et pilier de l’UDF locale, n’hésitait pas à confier la sécurité de ses meetings tout en lui fournissant un alibi en béton pour lui permettre d’échapper à la justice dans une sombre affaire d’extorsion de fonds. Président du Département pendant une dizaine d’année, le sénateur Maurice Arreckx avait dû laisser sa place en mars 1994 à son poulain, un certain Hubert Falco, avant d’être condamné en juin 2000, à 3 ans de prison ferme et 4 millions de francs d’amende pour recel d’abus de biens sociaux et recel d’abus de confiance dans l’attribution d’importants marchés publics entre 1982 et 1994.

Maurice Arreckx, à l’issue de sa condamnation en décembre 1996 (source © archives INA)

Son successeur, Hubert Falco, manifestement formé à la bonne école, élu pour la première fois en 1971, sur une liste de gauche, au conseil municipal de Pignans dont il devient maire en 1983, adhère en 1985 à l’UDF et entre la même année au Conseil général dont il accède à la présidence en 1994. Entre temps, il a été élu député en 1988, avec le soutien appuyé de son ami Maurice Arreckx, puis sénateur en 1995 et jusqu’en 2017. Il participe à plusieurs gouvernements sous la présidence de Jacques Chirac puis de Nicolas Sarkozy, comme Secrétaire d’État aux personnes âgées puis aux anciens combattants, une belle promotion pour cet ancien fabricant de bouchons que certaines mauvaises langues malintentionnées osent surnommer « Bac moins six ».

Hubert Falco dans son bureau (photo © Valérie Le Parc / Var Matin)

De quoi acquérir une petite notoriété nationale qui lui permet en mars 2001 de laisser son fauteuil de maire un peu étroit de la petite commune de Pignans pour s’asseoir dans celui, plus confortable, de maire de Toulon, qu’il occupe donc depuis 22 ans, en sus de celui de président de l’actuelle métropole Toulon Provence Méditerranée, où il siège depuis sa création, le 1er janvier 2002. Autant de fonctions que la loi ne permet plus de cumuler, ce qui l’a donc amené, en octobre 2002, à céder son fauteuil de président du Département à un de ses amis, Horace Lanfranchi, alors maire de Saint-Maximin.

Sauf que, depuis 2002 et bien que ne siégeant plus au Conseil départemental du Var, l’affable Hubert Falco, y reste bien sûr comme chez lui. A tel point même qu’il y a son rond de serviette, au sens propre du terme. Il y déjeune en effet quotidiennement et bénéficie même, jusqu’en 2018 des services d’un maître d’hôtel lorsqu’il a besoin de recevoir à la maison. Un réfrigérateur spécial lui est même dédié dans les cuisines de l’institution départementale, copieusement rempli de petits plats appétissants et où le couple Falco peut venir puiser à discrétion pour les repas du week-end, Madame étant elle-même employée du Conseil départemental. Et le couple n’hésite pas non plus à employer les services d’un prestataire du département pour l’entretien de son linge de maison, aux frais du contribuable.

Le siège du Conseil départemental du Var à Toulon, désormais présidé par Jean-Louis Masson, suite au départ de Marc Giraud, démissionné le 7 octobre 2022 par le Préfet suite à sa condamnation (photo © Olivier Real / TPBM)

Un manège qui a donc perduré pendant plus de 15 ans, pour un montant cumulé que les enquêteurs ont évalué à quelque 285 000 euros, une bagatelle ! Le grain de sable s’est cristallisé en octobre 2019 sous la forme d’un entrefilet du Canard enchaîné, également relayé par Var Matin, évoquant le témoignage d’une déléguée UNSA du Département, Faouzia Mehazem, qui avait alerté la Chambre régionale des comptes et le Parquet national financier sur ces pratiques peu orthodoxes qui se faisaient au vu et au su de tous.

Malencontreusement, au lieu de faire profil bas et de s’excuser, Hubert Falco porte plainte contre la fonctionnaire pour dénonciation calomnieuse et diffamation, ce qui conduit le parquet de Toulon à auditionner cette dernière en janvier 2020, et, du coup, à ouvrir une enquête pour détournement de fonds publics. Une enquête qui va de révélations en révélations. Non seulement elle confirme que l’ex président du Conseil départemental se nourrissait et se blanchissait ainsi à l’œil depuis des années, aux frais du contribuable varois, mais de surcroît elle met en évidence les efforts désespérés d’Hubert Falco pour étouffer l’affaire, n’hésitant pas pour cela à intervenir auprès du ministre de l’Intérieur et même à quitter l’UMP pour se rapprocher du parti présidentiel. La syndicaliste à l’origine du scandale reçoit des menaces de mort et des mots doux aimablement formulés ainsi : « Tous les jours, on rêve de te voir crevée, sale arabe, enfoirée de syndicaliste de merde (.) Fermes ta gueule et occupes toi de tes affaires sinon c’est de ta famille qu’on va s’occuper et on va te brûler ta maison… » tandis qu’un de ses collègues, cuisinier au Conseil départemental, est faussement accusé de malversations, au point qu’il finit par se pendre le 11 mars 2020.

Marc Giraud (à gauche) et Hubert Falco, aux côtés de Renaud Muselier (source © compte Facebook R. Muselier / Blast)

Convoqué et placé en garde-à-vue en octobre 2021, Hubert Falco vient donc d’être condamné, vendredi 14 avril 2023, par le tribunal correctionnel de Marseille, à 3 ans de prison avec sursis et à une peine d’inéligibilité de 5 ans. Il a été démis immédiatement de ses mandats de maire de Toulon et de président de la métropole TPM, tout comme son successeur au Conseil départemental, son ami Marc Giraud avait lui aussi été contraint de quitter son fauteuil de président du Département, le 7 octobre 2022, après avoir été à son tour condamné pour une affaire de détournement de fonds publics lié à un emploi fictif dans sa commune de Carqueiranne. Il ne fait décidément pas bon être élu local dans le Var en ce moment…

L. V.

Le Conseil départemental épinglé par la CRC

31 octobre 2022

La Chambre régionale des Comptes (CRC PACA) vient de rendre public, lundi 24 octobre 2022, un rapport sur la gestion du Conseil Départemental des Bouches-du-Rhône entre 2013 et 2020, et les magistrats régionaux ne sont pas particulièrement tendres avec cette administration mastodonte qui compte près de 8000 agents en équivalents temps plein pour administrer le troisième département le plus peuplé de France.

La période d’analyse est intéressante si l’on se souvient que lors des élections départementales de mars 2015, le Département des Bouches-du-Rhône, majoritairement à gauche depuis 60 ans et présidé depuis 1998 par Jean-Noël Guérini, avait alors basculé à droite et est depuis cette date présidée par Martine Vassal, réélue d’ailleurs à ce poste en juin 2021 tout en cumulant depuis septembre 2118 cette présidence avec celle de la Métropole Aix-Marseille-Provence après avoir échoué en 2020 à remporter de surcroît la mairie de Marseille.

L’analyse détaillée de la CRC figure dans deux cahiers distincts dont la lecture est très instructive pour un citoyen attentif à la bonne utilisation des deniers publics et au bon fonctionnement de la démocratie locale. Le premier traite des compétences prises en charge par le Département, de sa gestion financière et de sa gestion des ressources humaines. Le second est axé sur la gestion de son patrimoine immobilier, sur ses pratiques en matière de marchés publics et sur les subventions octroyées aux associations.

Martine Vassal annonçant que le Département des Bouches-du-Rhône est candidat pour expérimenter le RSA conditionné à des heures de travail (photo © Franck Pennant / La Provence)

Et le moins qu’on puisse dire est que, sur chacun de ces points, l’analyse des magistrats de la CRC, n’est pas très élogieuse ! Rien que le périmètre de compétences réellement assumées pose problème, la CRC relevant que le Département, qui a pourtant réglementairement perdu sa clause de compétence générale, continue allègrement d’exercer des compétences, notamment en matière de transport public et d’aide au développement économique, qui relève désormais d’autres collectivités, Métropole ou Région notamment. Ainsi, alors que la création de la Métropole en janvier 2016, aurait dû entraîner un transfert automatique de la totalité des 1959 km de routes départementales situées sur son périmètre, seuls 53 km de ce réseau a effectivement été transféré à la Métropole en 2017 et 61 km sont toujours en cours de transfert depuis 2018 !

Les relations entre Département et Métropole font d’ailleurs l’objet d’interrogations de la part de la CRC, du fait de la forte interaction entre ces deux structures, sachant que 90 des 119 communes des Bouches-du-Rhône, représentant près de 92 % de la population départementale sont désormais dans le giron métropolitain. Curieusement, alors que les rumeurs de fusion entre les deux structures semblent s’éloigner, jamais les deux collectivités n’ont été aussi proches avec de multiples groupements d’achats, une politique de communication commune (au service de leur présidente unique) et un transfert financier massif du Département en faveur de la Métropole dont les subventions d’investissement ont été multipliées par 3 entre 2016 et 2020. La Métropole reçoit à elle-seule près de 30 % des aides du Département à l’investissement !

Le Bateau bleu, le siège du Conseil départemental des Bouches-du-Rhône qui ne passe pas inaperçu (source © Structurae)

Cette question des aides massives accordées par le Conseil départemental aux communes et intercommunalités, n’en finit d’ailleurs pas d’étonner la CRC. Celle-ci constate ainsi une augmentation de 25 % des dépenses d’investissement du Département entre 2028 et 2020, liée non pas à ses propres investissements (dans la voirie et les collèges principalement) mais à des subventions aux autres collectivités qui représentent en 2020 plus des deux-tiers du total ! Certes, la loi autorise le Département à participer ainsi à l’aide aux projets des communes mais à un tel niveau, c’est du jamais vu…

D’autant que les critères de distribution de cette manne départementale semblent bien opaques, conduisant à des déséquilibres territoriaux qui intriguent la CRC : sur la période analysée, de 2013 à 2020, la Ville de Marseille a ainsi reçu un total de 170 € par habitant tandis que se voisine de Gignac-la-Nerthe a empoché 2611 € par tête de pipe. On n’ose imaginer le montant pour la ville de Carnoux où le moindre investissement est subventionné à plus de 60 % par le Département…

Alors que la situation budgétaire du Conseil départemental se dégrade d’année en année avec un endettement multiplié quasiment par 4 sur la période d’observation, la CRC s’étonne de cette générosité inhabituelle en faveur des communes, notant de manière feutrée et très diplomatique que « cette politique, davantage distributive que redistributive, ne répond que partiellement à un objectif de solidarité territoriale ». Une critique déguisée de clientélisme qui avait d’ailleurs fait l’objet d’échanges peu amènes lors du débat sur le rapport de la CRC qui avait eu lieu vendredi 21 octobre en séance publique du Conseil départemental. Danielle Milon, maire LR de Cassis et bombardée 1ère Vice-Présidente du Département déléguée au tourisme (tout un symbole qui en dit long sur les priorités de Martine Vassal), a tenté de justifier ce choix en expliquant, de manière aussi maladroite que malheureuse : « Martine Vassal a rétabli les inégalités qui existaient avant son élection en 2015 » : on ne saurait mieux dire en effet…

Le rapport de la CRC a été présenté et débattu lors de la séance du Conseil départemental du 21 octobre 2022 (source © CD 13)

On passera pudiquement sur les critiques acerbes de la CRC concernant une gestion budgétaire assez approximative, une méconnaissance du patrimoine publique, l’absence de stratégie pour la maintenance des collèges comme pour celle des espaces naturels sensibles, ou encore une politique de commande publique erratique et peu optimisée. Et encore, le rapport n’évoque même pas les déboires récents de certains de ses agents dont un ancien chef de service, Renaud Chervet, jugé au tribunal depuis le 24 octobre pour corruption après avoir été filmé en train de recevoir 10.000 € en liquide de la main d’un entrepreneur en échange d’un coup de main pour obtenir une grosse commande publique de la part du Département.

On passera aussi sur la question des subventions départementales aux quelques 48.000 associations recensées dans les Bouches-du-Rhone et dont 3.500 en moyenne bénéficient chaque année d’un coup de pouce financier qui représente quand même au total pas loin de 100 millions d’euros par an, partagé en 2020 entre 3.049 associations seulement alors que 7.300 dossiers de demande avaient été déposés. Là encore, la CRC s’étonne des disparités territoriales criantes dans la répartition de ces financements…

Renaud Chervet, ancien cadre du CD 13, lors de son procès pour corruption, avec, à droite, l’entrepreneur qui avait filmé la remise de billets en mains propres (photo © Jean-François Giorgetti / France 3)

En matière de gestion des ressources humaines, les magistrats de la CRC tombent de leur chaise en constatant que sur les près de 8000 agents que compte l’institution, seuls 11 d’entre eux relèvent d’un cycle de travail qui respecte effectivement la durée légale de 1607 heures annuelles, fixée par un décret datant quand même de juillet 2001. On ne saura pas qui sont ces valeureux héros qui sauvent l’honneur de la fonction publique territoriale, mais la CRC relève que tous leurs collègues bénéficient de congés supplémentaires indus qui, mis bout à bout, représentent plus de 200 postes à temps plein.

Sur ce sujet, la CRC se montre, pour une fois, assez sévère en écrivant sans détours : « la collectivité est invitée à régulariser cette situation au plus tard pour le 1er janvier 2023, ainsi qu’à renforcer son dispositif de contrôle des heures supplémentaires réalisées et payées aux agents ». A un mois seulement des élections professionnelles prévues début décembre et qui verront les différents syndicats se livrer à la surenchère habituelle, voila une belle pierre dans le jardin de Martine Vassal : il serait fort étonnant que la CRC constate la moindre évolution dans ce domaine d’ici le 1er janvier prochain…

L. V.

Port-Vendres se déleste en douce de ses vestiges…

2 octobre 2022

Voilà une affaire qui est en train de faire du bruit et qui commence à embarrasser quelque peu le Conseil départemental des Pyrénées-Orientales, accusé ni plus ni moins que d’avoir saccagé, avec la complicité des pelleteuses d’Eiffage, premier groupe européen du BTP, un site archéologique de première importance, un ancien temple romain dédié à Vénus largement cité par le géographe grec Strabon qui évoque, au premier siècle avant Jésus-Christ Aphrodision, latinisé en Portus veneris, « entre deux promontoires du Pyréné, célèbre par son temple ». Même le Canard enchaîné s’en est fait l’écho et le fait est qu’une nouvelle enquête a été ouverte pour tenter de démêler l’affaire.

Port-Vendres, un site portuaire connu et exploité depuis l’Antiquité (photo © CC BY-SA / Ministère de la transition écologique)

Il faut bien reconnaître que le dossier n’est pas d’une grande limpidité… Des controverses existent sur la position même de ce fameux temple de Vénus, probablement d’origine grecque, qui aurait été implanté sur une île, près de l’ancienne cité de Pyrène, évoquée pour la première fois par Hérodote au VIe siècle avant J.-C., et qui aurait donné son nom à la chaîne de montagne voisine. Mais l’origine du mot Pyrénées prête elle-même à débat, entre tenants d’une étymologie grecque liant justement ce nom à une ancienne cité portuaire de la Côte vermeille, et partisans d’une origine mythologique celte.

Le géologue universitaire Jean-Claude Bisconte de Saint Julien est quant à lui persuadé que cette antique cité portuaire n’est pas Collioure comme le prétendent certains, mais bien Port-Vendres, où l’on n’a pourtant pas retrouvé de vestige de ville antique. En revanche, lui est convaincu, comme il l’expose avec force détails dans son livre récemment publié que l’ancienne Pyréné se trouvait bien à l’emplacement de l’actuelle Port-Vendres même si ce site portuaire prisé des marins antiques par l’abri naturel qu’il offre contre la Tramontane, a été mis en sommeil pendant plus de 1000 ans, du fait d’une sédimentation excessive.

Le professeur Jean-Claude Bisconte de Saint-Julien et la couverture du livre qu’il vient de publier fin 2019 (source © L’Ouillade)

Il pense que l’île dont parle les Anciens, abritant le sanctuaire dédié à Aphrodite, a été arasée en 1929 lorsque les installations portuaires modernes ont été aménagées, contribuant à faire de Port-Vendres un port de commerce très actif, en particulier pour l’importation de fruits exotiques dont 270 000 tonnes transitent annuellement ici. De fait, des investigations géophysiques réalisées en 2018 ont révélé les fondements de l’ancienne île Aphrodisium, immergés en bordure d’un quai.

Carte postale de l’îlot marquant l’entrée du port de Port-Vendres avant sa destruction en 1929 (source © Jean-Claude Bisconte de Saint-Julien / France 3 Régions)

Le problème, c’est que le quai en question est désormais trop court pour faire accoster les cargos actuels de 155 m de long et de 8 m de tirant d’eau. Comme c’est le seul port en eau profonde du département, le Conseil départemental qui en est le propriétaire, porte depuis 1998, avec la Région Occitanie et la Chambre de commerce et d’industrie, gestionnaire du port de commerce, un ambitieux projet de réaménagement qui consiste notamment à reconstruire totalement le quai Dezoums, inutilisé depuis 2005, en remblayant en totalité une ancienne anse naturelle adjacente. Un projet qui naturellement cristallise l’opposition des défenseurs locaux de l’environnement, lesquels avaient déjà réussi à faire annuler en 2011 par le Tribunal administratif une première autorisation de construire.

Projet de requalification du quai Dezoums en lieu et place de l’actuelle anse des Tamarins (source © EGIS – Etude d’impact des travaux de requalification du quai Dezoums à l’Anse des Tamarins – février 2017)

Le projet a été partiellement revu et une nouvelle étude d’impact a été lancée, aboutissant, fin 2018, à une autorisation de la DREAL au titre du Code de l’environnement, sur la base du projet délibéré en juin 2018 par le Conseil départemental pour un montant d’environ 25 millions d’euros. Les travaux de dragage et de déroctage entrepris en 2019 concernent pas moins de 50 000 m3 que le maître d’ouvrage, conseillé par le CEREMA, un organisme public, se vante de réexploiter au maximum dans une logique d’économie circulaire bien comprise, s’engageant à ne procéder à aucun rejet en mer.

Dragage en cours dans le port de Port-Vendres en mai 2019 (source © France 3 Occitanie)

Mais voilà que lors de ces travaux de terrassement réalisés entre mars et juin 2019, certains témoins voient les pelleteuses à l’œuvre le long du fameux quai Dezoums, remonter de gros blocs bien équarris de marbre blanc, qui font furieusement penser à ce que pourraient être les fondations de l’antique sanctuaire d’Aphrodite ! Pire, les associations repèrent des allées et venues suspectes de barges parties en mer chargées de sédiments et de blocs issus de ces travaux de déroctage, et revenues vides après avoir discrètement largué leur cargaison en pleine mer, ni vu ni connu…

L’association FRENE 66, membre de France Nature Environnement, ainsi que deux autres associations de défense du patrimoine local, « Port-Vendres et les Port-Vendrais » et le collectif « Les Tamarins » portent plainte et les gendarmes viennent apposer les scellés sur le tas de gravats resté à quai tandis que le professeur Jean-Claude Bisconte de Saint Julien s’égosille dans la presse, jurant que les matériaux issus du déroctage recelaient sans aucun doute des vestiges archéologiques d’une valeur patrimoniale inestimable, les anfractuosités naturelles de l’ancienne île étant même susceptibles d’abriter des anciennes épaves irrémédiablement perdues.

Vue aérienne montrant les différents éléments de l’anse de Port-Vendres avec notamment le quai Dezoums (8) où ont eu lieu les travaux de dragage et l’anse Guibal (16) où gisait l’épave de Port-Vendres 1 (source © EGIS – Etude d’impact des travaux de requalification du quai Dezoums à l’Anse des Tamarins – février 2017)

Il faut dire que le site de Port-Vendres est particulièrement riche en matière d’archéologie sous-marine et que la commune elle-même a fait l’objet d’un classement en Site patrimonial remarquable (SPR) par le Ministère de la Culture. De fait, plusieurs épaves antiques y ont été repérées, dont celle d’un navire romain qui a coulé dans l’anse Guibal, à la fin du IVe siècle de notre ère, avec une partie de sa cargaison d’amphores remplies de poisson et de garum en provenance du sud de l’Espagne. Identifiée en 1929, lors des travaux d’aménagement du port et déjà largement endommagée par les travaux de dragage effectués dans l’entre-deux-guerres, l’épave a été fouillée à partir de 1962 puis en 1973 dans le cadre d’une opération de sauvetage avant destruction définitive par les travaux de réaménagement du port prévus à partir de 1974. L’épave avait alors été démontée et remontée à la surface, constituant la première opération de ce type en France, les parties en bois ayant alors été envoyées à la DRASM de Marseille (Direction des recherches archéologiques sous-marines) pour un traitement chimique en vue de sa conservation.

Vidéo produite par le Parc naturel marin du Golfe du Lion en 2017 retraçant l’histoire de l’épave Port-Vendres 1

Curieusement, ce riche patrimoine archéologique local ne fait l’objet, dans l’étude d’impact rédigée par EGIS en 2017, que d’une seule ligne sur les 92 pages du résumé non technique, se contentant d’affirmer que « le site d’étude a en particulier fait l’objet de plusieurs fouilles archéologiques mettant en évidence des vestiges significatifs ». De quoi faire hurler les associations locales, mais pas suffisamment pour émouvoir le Procureur de la République qui a classé l’affaire sans suite le dossier ouvert en septembre 2019,  avant que les défenseurs acharnés de l’antique Portus veneris ne relancent l’affaire en justice, avec photos à l’appui montrant les blocs déchargés en mer et reposant désormais à 40 m de fond ! Une nouvelle enquête est donc en cours tandis que les travaux d’aménagement du port se poursuivent : business is business..

L. V.

RN : l’extrême droite qui inquiète…

15 juin 2022

On a déjà connu pareille situation au soir du 21 avril 2002, lorsque, à la surprise générale, le leader du Front national, Jean-Marie Le Pen, s’était qualifié pour le second tour des élections présidentielles, devançant le Premier ministre sortant, Lionel Jospin, pourtant porteur d’un bilan plus qu’honorable. A l’époque, de nombreux citoyens, y compris à Carnoux, étaient descendu dans la rue pour clamer leur indignation et marquer leur attachement à un régime républicain modéré dans lequel l’extrême droite, de sinistre mémoire, n’a pas sa place. Le 1er mai 2002, on dénombrait ainsi entre 1 et 2 millions de manifestants qui affichaient ouvertement leur refus de voir le Front National arriver au pouvoir.

Manifestation contre le Front national le 1er mai 2002, ici à Grenoble, rassemblant environ 60 000 personnes, soit un tiers des habitants de la ville ! (source © Le Dauphiné libéré)

Entre les deux tours des présidentielles de 2002, la quasi totalité des responsables politiques avaient affiché sans ambiguïté leur rejet de l’extrême droite et appelé à voter contre Jean-Marie Le Pen, à l’exception du dissident d’extrême droite d’alors, Bruno Megret, et, accessoirement, d’Arlette Laguiller, leader de Lutte ouvrière, qui renvoyait dos à dos les deux prétendants. En dehors de ces quelques extrémistes très éloignés des valeurs démocratiques, un consensus émerge alors clairement pour ne pas laisser la France s’embarquer dans une aventure à rebours de ses traditions républicaines, et Jacques Chirac avait été réélu dans un fauteuil le 5 mai 2002, avec 82,21 % des suffrages exprimés.

Vingt ans plus tard, le Front national a disparu et son héritière, Marine Le Pen, a tout fait pour banaliser l’image de son parti d’extrême droite, devenu le Rassemblement national, mais qui reste ouvertement attaché à la préférence nationale et à un pouvoir fort dans lequel les notions de liberté individuelle, d’égalité républicaine et de solidarité passent au second plan. Élection après élection, ce parti n’a cessé de recueillir des scores de plus en plus élevés, sa présidente se plaçant comme challenger au second tour des deux dernières élections présidentielles, en 2017 comme en 2022, avec un nombre de suffrages croissant, comme si de plus en plus de Français finissaient par être séduits par ce discours radical et xénophobe.

Emmanuel Macron et Marine Le Pen lors du débat des présidentielles de 2022 (photo © Jacques Witt / SIPA / DNA)

Depuis des années, les électeurs de gauche se sont toujours érigés en gardiens des valeurs républicaines pour voter contre les candidats RN, quitte à voter en se pinçant le nez pour des candidats de droite pour lesquels ils n’avaient guère d’affinités. On a ainsi vu à deux reprises, en 2015 comme en 2021, les candidats de gauche aux élections régionales en région PACA, pourtant dûment qualifiés pour le second tour, se retirer volontairement de la compétition électorale pour faire barrage au Front national, sous les remerciement polis et les ricanements retenus, de leurs adversaires de droite qui se frottaient les mains devant tant d’abnégation.

Et voila que pour ce deuxième tour des législatives 2022, on se retrouve pour une fois dans une situation un peu différente. Les partis de gauche, socialistes, écologistes, insoumis et communistes ayant réussi, une fois n’est pas coutume à mettre de côté leurs petites divergences pour présenter enfin des candidatures unies, comme la droite le fait depuis des années, voila que le paysage politique a subrepticement changé… On assiste ainsi, à l’échelle nationale, à pas moins de 63 duels au second tour prévu ce dimanche 19 juin qui opposeront un candidat d’extrême droite, généralement estampillé RN, à un candidat de gauche, pour l’essentiel porteur de l’étiquette NUPES (Nouvelle union populaire écologiste et solidaire).

Carte des circonscriptions avec mention des candidats arrivés en tête à l’issue du premier tour le 12 juin 2022 (infographie © Le Parisien)

Cela représente plus de 10 % des circonscriptions en jeu, et le phénomène est donc loin d’être négligeable, même s’il reste très minoritaire par rapport au cas de figure le plus répandu de ce second tour qui verra dans 276 circonscriptions, soit la moitié de celles qui restent en lice, s’affronter un candidat de l’alliance de gauche à un représentant du parti présidentiel Ensemble ! Même les duels entre Ensemble ! et le RN sont plus nombreux puisqu’on en dénombre plus d’une centaine sur l’ensemble du territoire national, tandis que 18 circonscriptions verront s’opposer un candidat Les Républicains à un candidat RN. Une situation assez inédite par rapport aux législatives précédentes de 2017 où les seuls candidats FN qui s’étaient maintenus au second tour avaient tous pour adversaire un candidat de La République en Marche, le parti d’Emmanuel Macron. Il y a six ans, ces candidats d’extrême droite qualifiés pour le second tour des législatives n’étaient qu’une centaine alors qu’ils sont plus du double cette année, ce qui confirme, s’il en était besoin, la progression incontestable des idées d’extrême droite dans notre pays !

Toujours est-il que cette confrontation attendue dans plus de 60 circonscriptions, au second tour des législatives 2022, entre la gauche et l’extrême droite interpelle directement les électeurs de droite et du centre-droit qui n’avaient quasiment jamais été confrontés à ce cas de figure jusqu’à présent. Une situation qui concerne notre territoire puisque c’est celle de la 9e circonscription des Bouches-du-Rhône, qui opposera Joëlle Mélin à Lucas Trottmann, mais aussi celle de la 10° circonscription voisine, sur Gardanne et Allauch, où le RN est en tête face à la candidate NUPES Marina Mesure. Une configuration que l’on retrouve également à Martigues où le député communiste sortant, Pierre Dharréville est opposé à un candidat RN, de même qu’à Arles où le RN est en tête face au socialiste Christophe Caillault, de même que dans deux circonscriptions marseillaises où les candidats NUPES, Mohamed Bensaada et Sébastien Delogu, affronteront aussi un membre du RN dimanche prochain.

Joëlle Mélin et Lucas Trottmann lors d’un débat organisé par La Provence avant le premier tour des législatives 2022 (source © La Provence)

Et voila que brusquement les responsables politiques de droite comme du parti présidentiel se font bien silencieux pour conseiller leurs électeurs dans ce dilemme, oubliant toute notion de front républicain dont ils ont pourtant largement profité depuis des années. De crainte sans doute de froisser leurs ouailles qui penchent de plus en plus ouvertement vers les idées du Rassemblement national, la plupart d’entre eux se gardent bien de prendre parti, ne voulant pour rien au monde être taxés de sympathie pour des valeurs de gauche, quitte à laisser l’extrême droite investir en nombre les bancs de l’Assemblée nationale.

Même du côté d’Emmanuel Macron, pourtant lui-même issu des rangs du Parti socialiste (on finirait presque par l’oublier…) et qui s’est longtemps targué de vouloir être « en même temps » de gauche et de droite, le discours est pour le moins ambigu. « Aucune voix ne doit manquer à la République » a-t-il ainsi lancé de manière martiale mardi 14 juin, sur le tarmac de l’aéroport d’Orly avant de s’envoler pour une réunion de l’OTAN en Roumanie, comme si glisser dans l’urne un bulletin qui ne porterait pas la mention Ensemble ! serait une atteinte grave à nos valeurs républicaines…

Allocution d’Emmanuel Macron devant l’avion présidentiel, le 14 juin 2022 (photo © Reuters / JDD)

Élisabeth Borne elle-même avait largement entretenu la confusion au soir du premier tour en renvoyant dos à dos le RN et la NUPES, évoquant une « confusion inédite entre les extrêmes », avant de revenir sur ses déclarations à l’emporte-pièce et fixer comme ligne : « ne jamais donner une voix à l’extrême droite » tandis que son ministre Clément Beaune appelait encore plus clairement à privilégier les candidats de gauche à ceux du RN. Reste à savoir comment les électeurs qui ont voté au centre ou à droite lors du premier tour se positionneront dimanche prochain : préféreront-ils se faire représenter à l’Assemblée par un député d’extrême droite ou par un représentant de la gauche républicaine ? Réponse dimanche soir…

L. V.

Gens du voyage : l’accueil manque d’empressement

12 juillet 2021

Ce n’est pas un scoop : les élus locaux n’ont jamais montré beaucoup d’empressement pour faciliter le transit des gens du voyage, tziganes, Roms et autres nomades de passage, sur leur territoire communal. Et ceci malgré les obligations réglementaires actées notamment via la loi Besson adoptée le 5 juillet 2000, il y a plus de 20 ans !, qui rendait obligatoire l’élaboration d’un schéma départemental pour prévoir, au vu d’un diagnostic des besoins, les dispositifs d’accueil dans toutes les communes de plus de 5 000 habitants.

Les Bouches-du-Rhône sont traditionnellement un lieu de passage majeur pour les gens du voyage, notamment lors du grand pèlerinage des Saintes-Maries-de-la-Mer qui attire chaque année plus de 40 000 personnes dont un quart environ issus de la communauté des gens du voyage. Un premier schéma d’accueil des gens du voyage a donc été élaboré et présenté par le Préfet et le Président du Conseil général de l’époque – un certain Jean-Noël Guérini – dès le 19 décembre 2001 devant la Commission départementale consultative des gens du voyage. Dix ans plus tard, rebelote avec une actualisation de ce schéma départemental, cosigné le 10 janvier 2012 par le Préfet de l’époque, Hughes Parant, et un représentant du Département, toujours présidé par Guérini.

Pèlerinage gitan aux Saintes-Maries-de-la-Mer (source © The good Arles)

Depuis, rien n’a bougé et ce dernier texte n’a pas été révisé 6 ans plus tard comme le prévoit la loi, pour la bonne et simple raison que la nouvelle Présidente du Conseil départemental, Martine Vassal, avait bien d’autres préoccupations en tête ces derniers temps, parmi lesquelles son élection (ratée) à la Mairie de Marseille et sa réélection (réussie) à la Métropole et au Département. Tout juste a t-elle consentie à signer en 2016 un avenant au texte initial pour tenir compte des évolutions législatives qui confient désormais aux intercommunalités et non plus aux communes cette compétence de l’accueil des gens du voyage.

L’aire d’accueil des gens du voyage de La Malle, à Bouc-Bel-Air aménagée en 2016 par la Communauté d’agglomération du Pays d’Aix (photo © Serge Mercier / La Provence)

Le diagnostic établi en 2011 reste donc le seul disponible à ce jour et c’est sur cette base qu’ont été définies les obligations légales qui pèsent depuis plus de 20 ans sur toutes les communes de plus de 5 000 habitants et, désormais, sur les établissements de coopération intercommunale qui les regroupent. Ainsi, sur le territoire Marseille-Provence de la Métropole, qui regroupe les 18 communes de l’ancienne communauté urbaine, seule Marseille dispose déjà d’une aire d’accueil de 48 places, admirablement située dans la vallée de l’Huveaune en zone inondable, coincée entre l’autoroute et la voie ferrée, à côté d’un moto-cross bruyant et d’une décharge illicite où toutes les entreprises locales de BTP avaient pris l’habitude de venir benner leurs déchets en toute impunité, et dans le périmètre rapproché d’exposition aux risques technologique de l’usine Arkema, site Seveso seul haut…

L’aire d’accueil des gens du voyage de Saint-Menet, la seule sur le territoire de Marseille Provence, fermée en 2017 pendant plus de 9 mois pour cause de travaux (source© Marsactu)

Sur ce territoire, le nombre de places d’accueil supplémentaires à mettre en place, depuis donc plus de 20 ans, est estimé au total à 240, auxquelles s’ajoute la nécessité de créer une aire de grand passage permettant d’accueillir temporairement de l’ordre de 50 à 200 caravanes à l’occasion des grands rassemblements traditionnels. Pour une fois, le territoire de l’Est marseillais était plutôt en pointe puisque, en 2011, l’objectif de création d’une aire d’accueil de 50 places, destinée à satisfaire les obligations légales des communes de La Ciotat, Cassis, Carnoux et Roquefort-La Bédoule, paraissait plutôt bien engagé avec un projet déjà validé et bénéficiant d’un financement conséquent de la part de l’État.

Le seul petit problème est que, 10 ans plus tard, les choses en sont toujours exactement au même point et que la ville de Carnoux, comme la Métropole à qui elle a désormais délégué cette compétence, n’a toujours pas la moindre place d’accueil à offrir aux gens du voyage, en infraction totale avec ses obligations légales datant pourtant du 5 juillet 2000 !

Vue aérienne de l’emplacement de la future aire d’accueil des gens du voyage de La Ciotat, admirablement située entre l’autoroute, la départementale et la voie ferrée, dans une ancienne carrière abandonnée, alors que l’on annonçait son ouverture imminente, à l’automne 2014 (photo© Richard Lopez / La Provence)

Le projet en question, qui avait été identifié dès 2002 dans le sillage du premier plan départemental, se situe au vallon de la Forge, dans un lieu encore plus pittoresque que celui de Saint-Menet, au cœur d’une ancienne carrière à ciel ouvert, un temps transformée en une casse automobile. Mal fermé par un antique portail rouillé en bordure de la route départementale 559 qui relie Cassis à La Ciotat, juste au dessus de la voie ferrée et en contrebas immédiat de l’autoroute et du péage de La Ciotat, le site est perdu en pleine nature, loin de toute habitation et largement exposé au risque de feu de forêt mais aussi aux éboulements rocheux des anciens fronts de taille.

En octobre 2016, le projet pourtant financé mais au point mort… (photo© Corinne Matias / La Provence)

C’est d’ailleurs ce dernier point qui sert de prétexte aux élus locaux pour faire traîner en longueur ce projet, enkysté dans les cartons depuis maintenant 20 ans. Pas question bien évidemment d’installer des habitations, même mobiles et temporaires, dans un tel lieu sans avoir procédé à un minimum de travaux de mise en sécurité des front rocheux qui l’entourent et sans s’être assuré que la pollution des sols, fruit d’une activité industrielle jamais contrôlée, n’est pas incompatible avec une telle reconversion. Un contexte idéal pour relancer à intervalles régulier et quand la pression se fait trop forte, quelques études sporadiques qui s’accumulent et permettent de gagner du temps…

Il faut dire que, du côté de l’Association nationale des gens du voyages citoyens, qui s’épuise à faire avancer le dossier depuis des années, l’emplacement retenu ne déclenche pas l’enthousiasme. Perdu dans un lieu éminemment hostile et bruyant, à 6 km de toute commodité et sans aucun transport en commun, on ne peut pas dire en effet que ce soit un site idéal pour favoriser la scolarisation des enfants et l’insertion professionnelle des parents…

Le site bucolique choisi pour la future aire d’accueil des gens du voyage à La Ciotat (source© Marsactu)

Mais la Métropole qui est maître d’ouvrage de ce projet encalminé depuis des années et qu’elle vient seulement de ressortir des placards en 2019, met en avant la proximité avec les voies de circulation, idéal en effet pour des gens du voyage ! Emplacement réservé depuis 2006, il a fallu attendre 2012 pour qu’une convention soit signée entre les communes concernées et la SOLEAM afin de commencer à étudier la faisabilité du projet. Ce qui a permis de montrer que sa mise en œuvre exigeait de défricher 7 ha d’espace boisés classés avec leur lot d’espèces végétales à préserver, de quoi remiser dans les cartons le dossier jugé trop complexe et trop coûteux.

Si le sujet est brusquement revenu sur la table en septembre 2019, c’est simplement que la Métropole Aix-Marseille-Provence a été sommée par la Cour administrative d’appel de se mettre enfin en conformité avec la loi et d’ouvrir au moins certaines des aires d’accueil prévues depuis des années mais jamais réalisées. Sur l’ensemble de son territoire, la Métropole se vante de disposer désormais de 8 aires d’accueil totalisant 308 places, alors que le schéma départemental en prévoit 28 pour un total de 898 emplacements permanents, et ceci sans compter les trois terrains de grand passage toujours en attente. Un taux d’avancement ridiculement bas à l’échelle nationale où la moyenne s’établit plutôt autour de 77 % des objectifs fixés.

Dans un tel contexte et comme pour le logement social, les maires préfèrent se mettre délibérément hors la loi en ne respectant pas leurs obligations légales, quitte à employer la force publique pour chasser manu militari les gens du voyage lorsqu’ils font escale là où ils peuvent, faute d’aires d’accueil adaptées. Un bel exemple de délinquance en col blanc ?

L. V.

Rocher Mistral : des chauves-souris un peu encombrantes

6 juillet 2021

Le village de La Barben, petite commune de 836 habitants, située à proximité de Salon-de-Provence, entre Luberon et Alpilles, était jusque-là surtout connu pour son zoo, créé en 1969 et géré comme une entreprise familiale, qui héberge 130 espèces animales de toute la planète et accueille jusqu’à 300 000 visiteurs par an. Mais La Barben est aussi le lieu d’un ancien castrum, jadis propriété de l’abbaye de Saint-Victor, vendu en 1474 par le roi René à la famille des marquis de Forbin qui l’ont conservé dans leur patrimoine pendant quasiment cinq siècles.

Le château de La Barben, vu du ciel, perché sur son rocher (source © Château de La Barben / France 3)

En 1630, lors de la révolte des Cascavéus, dirigée contre la centralisation des impôts décidée par Richelieu, le château est incendié. Soumise par les armées du prince de Condé, la population aixoise est condamnée à verser une amende colossale pour réparer les dommages subis et cela permettra de reconstruire largement le château de La Barben selon les canons du classicisme alors à la mode avec des jardins que l’on dit dessinés par Le Nôtre, le jardinier de Louis XIV. En 1806, la sœur de Napoléon, Pauline Borghèse y vécut des amours tumultueuses avec le maître des lieux, Auguste de Forbin, ami du peintre aixois François-Marius Granet qui décora le château de belles fresques murales.

Le château de La Barben, une forteresse médiévale totalement réhabilitée au XVIIe siècle (source © So châteaux)

En 1963, le domaine change de mains, racheté par un ingénieur agricole, André Pons, justement pour y fonder ce fameux zoo. Et voilà que le 31 décembre 2019, c’est un jeune entrepreneur, Vianney Audemard d’Alençon qui rachète à son tour le château dans le but d’y monter des spectacles historiques, comme il l’a déjà fait sur le site de Saint-Vidal en Haute-Loire et selon le modèle à succès du parc d’attraction du Puy-du-Fou.

Pour se couler dans les thématiques à la mode, le projet, baptisé Rocher Mistral, en l’honneur bien sûr du grand félibrige et prix Nobel de littérature, Frédéric Mistral, se veut un parc à thème centré sur l’environnement, l’agriculture et les traditions provençales. Des sujets qui forcément rencontrent l’assentiment enthousiaste des politiques locaux, Renaud Muselier et Martine Vassal en tête et ça tombe bien puisque Vianney d’Alençon évalue à environ 30 millions d’euros l’investissement nécessaire pour réhabiliter le château et remettre en état les 400 ha du domaine. Les subventions publiques des collectivités pleuvent, au moins 7 millions apportés par la Région et le Département dès la première année !

Vianney d’Alençon, nouveau propriétaire du château de La Barben et promoteur du projet Rocher Mistral (source © Echo du Mardi)

Une affaire rondement menée donc et qui a permis, heureux hasard du calendrier, d’inaugurer le nouveau parc à thème ce mercredi 30 juin 2021, en présence de Jean-Baptiste Lemoyne, Secrétaire d’État au Tourisme, et de Renaud Muselier qui vient tout juste d’être réélu haut la main à la tête du Conseil Régional. Désormais ouvert au public, le château offre sept spectacles quotidiens sous forme de reconstitutions historiques en costume local, mais donne aussi accès à l’inévitable marché provençal et à deux restaurants au nom évocateur « l’auberge Daudet » et « la guinguette de Marius » : difficile de faire davantage couleur locale…

Danses folkloriques provençales lors de l’inauguration du Rocher Mistral (photo © Alexandre Vella / 20 Minutes)

Quant au domaine alentours, des terres agricoles à l’abandon et qui, pour partie, ont servi de décharges au fil du temps, il est en train d’être remis en culture, replanté en vignes sur 8 ha et destiné au maraîchage sur une quinzaine d’hectares, pour alimenter justement le marché des touristes. Une partie du domaine verra pâturer des chèvres du Rove et des brebis mérinos d’Arles, tandis qu’un apiculteur a déjà installé une cinquantaine de ruches pour produire du miel de lavande et de romarin, ainsi que de l’hydromel.

Une collaboration a été initiée avec la Ligue de protection des oiseaux pour participer à la sauvegarde de l’unique couple d’aigles de Bonelli encore présent sur place. Par ailleurs, un travail est mené avec le Groupe Chiroptères de Provence car il se trouve que les souterrains du château abritent l’une des plus importantes colonies régionales de 600 à 700 individus de Murins à oreilles échancrées, qui, comme chacun sait, sont des chauves-souris qui, la nuit, viennent gober les mouches, chenilles et autres araignées, jouant ainsi un rôle important dans la régulation de la biodiversité.

Les souterrains du château, un refuge pour les chauves-souris (source © L’estrangié e li santoun)

Comme de nombreuses espèces de chiroptères, sur les 26 actuellement répertoriées dans la région, ces chauves-souris sont menacées de disparition, sous la conjonction de multiples facteurs liés à l’anthropisation de leur habitat, au développement des pesticides, à l’éclairage nocturne ou encore au développement des éoliennes, la liste étant loin d’être limitative… Avec l’ancien propriétaire du site, les naturalistes avaient trouvé un terrain d’entente qui avait peu a peu permis à ces petits mammifères peureux de s’habituer à la présence humaine dans les souterrains qui servaient de refuge saisonnier à la colonie. Ils ont donc naturellement poursuivi leur collaboration pour étudier comment adapter au mieux le nouveau projet d’aménagement du Rocher Mistral afin de sauvegarder la colonie de Murins à oreilles échancrées malgré l’afflux attendu de visiteurs.

Murins à oreilles échancrées au repos (photo © David Aupermann / Plan actions chiroptères)

Mais il semble que la coexistence entre défenseurs de l’environnement et promoteurs du projet ne soit pas aussi fluide qu’espérée, d’autant que le Puy-du-Fou sauce provençale n’est pas du goût de tous les habitants du petit village de La Barben, soucieux de leur tranquillité et qui voient d’un mauvais œil cet afflux prévisible de touristes en goguette. La branche départementale de France Nature Environnement a donc déposé un recours contre le projet, mettant en cause notamment la menace qui pèserait sur la survie des chauves-souris, mais aussi la réalisation de travaux sans permis pour aménager un parking de 400 places et les aires d’accueil du public et des spectacles dans le potager, sur des terres agricoles.

Cette plainte, déposée le 28 mai devant le tribunal judiciaire d’Aix-en-Provence, pour destruction d’espèces protégées, altération d’habitat d’espèces protégées et réalisation de travaux sans autorisation d’urbanisme, fait un peu tâche sur ce projet qui se revendique en faveur de la protection de l’environnement et de la valorisation du patrimoine local. La SAS Rocher Mistral est invitée à comparaître le 13 juillet 2021 devant le tribunal dans ce cadre mais cela n’a pas empêché son inauguration en grandes pompes ni bien sûr son ouverture au public et il serait bien étonnant que ce recours en justice ait la moindre chance de freiner un projet qui bénéficie de tels soutiens…

L. V.

Départementales et régionales : statu quo…

30 juin 2021

C’est grosso modo le statu quo qui prédomine après ces élections locales destinées à renouveler de manière globale l’ensemble des assemblées régionales et départementales de France et dont beaucoup attendaient des changements majeurs. Mais les Français ont boudé les urnes de manière encore plus spectaculaire que lors des échéances précédentes, un tiers seulement d’entre eux faisant l’effort de se déplacer. Et finalement, il ne s’est pas passé grand-chose, sinon une formidable prime aux sortants qui, bien que critiqués en permanence par des électeurs éternellement blasés et râleurs, ont pour la plupart été largement reconduit pour 6 ans : comprenne qui pourra !

L’abstention massive, principale caractéristique de ces élections régionales et départementales : un dessin signé Chaunu (source © Ouest France)

Aux régionales, tous les exécutifs sortant ont été largement reconduits, à gauche comme à droite, à la seule exception de la Réunion où la maire de Saint-Paul, l’ex-communiste Huguette Bello, à la tête d’une liste d’union de la gauche rassemblée en extremis entre les deux tours, a réussi à ravir la Région au sortant LR Denis Robert, un gros cumulard qui traîne toute une batterie de casseroles judiciaires et est sous le coup d’une condamnation à 3 ans d’inéligibilité pour laquelle il a fait appel…

En dehors de ce basculement à gauche, ces élections régionales auront donc vu, sans surprise, la large reconduction des sortants de droite comme de gauche. La plus belle réélection est sans conteste celle de la socialiste Carole Delga plébiscitée avec près de 58 % des suffrages exprimés devant son chalenger RN et devant le LR qui termine avec à peine plus de 18 % des voix. Bien sûr, les esprits chagrins ne manqueront pas de remarquer que si l’on rapporte ces scores au nombre d’inscrits, cela ne fait jamais que 20,9 % d’adhésion pour la Présidente de la Région Occitanie (et à peine plus de 6 % pour son adversaire malheureux, Aurélien Pradié pourtant n°3 national du parti LR dont les ténors n’ont fait guère mieux avec 15 % pour Valérie Pécresse et moins de 17 % pour Xavier Bertrand que chacun présente comme le prochain finaliste de la présidentielle en 2022…

Carole Delga, brillamment réélue à la tête de la Région Occitanie (photo © G.L. / Actu.fr)

Ces régionales ont été en particulier marquées par un net effondrement du parti de Marine Le Pen à qui les sondages promettaient pourtant des scores mirifiques. Touché de plein fouet, comme les autres partis, par une abstention massive et sans doute, comme l’explique Jean Viard à La Provence, par une perte de crédibilité des mouvements populistes à l’issue d’une crise sanitaire mondiale sans précédent, le RN a perdu nombre de ses électeurs. C’est le cas notamment en région PACA où la liste conduite par Thierry Mariani, pourtant arrivée largement en tête au premier tour, n’a finalement recueilli que 420 000 voix soit 300 000 de moins que Marion Maréchal Le Pen au premier tour des régionales de 2015 : le recul est brutal !

Largement battu en Région PACA, Thierry Mariani s’éclipse après un rapide discours désabusé (photo © Loeiza Alle / Marsactu)

Fort du désistement de la gauche en sa faveur et du ralliement de l’écologiste Jean-Marc Governatori, le sortant Renaud Muselier l’a donc très largement emporté au second tour avec 57,3 % des suffrages exprimés et près de deux fois plus de voix qu’au premier tour ! Sa réélection à la tête de l’exécutif régional où il dispose de 84 élus, contre 39 seulement pour le RN, n’est plus qu’une formalité. Arrivé en tête dans les six départements de la région, même dans le Vaucluse, sa stratégie d’alliance avec les centristes du MODEM, de l’UDI et même de la République en marche lui a permis de conserver haut la main son fauteuil à la tête d’une large majorité qui ne compte pourtant que 17 élus régulièrement encartés au parti LR !

La gauche, qui s’était désistée en faveur de Renaud Muselier sera l’éternelle grande absente de cette nouvelle assemblée régionale. Elle pourra en revanche jouer son rôle d’opposant au Conseil départemental des Bouches-du-Rhône où Martine Vassal devrait être reconduite sans surprise à la tête de l’exécutif pour au moins 6 ans encore, avec, là aussi, une confortable majorité. En dehors de Marseille, le seul canton où la gauche tire son épingle du jeu est le fief communiste de Martigues que Gérard Frau et Magali Giorgetti remportent avec plus de 62 % des suffrages exprimés. Les binômes du Printemps marseillais confirment leurs bons scores de l’an dernier à l’image du maire Benoît Payan, réélu avec plus de 75 % des voix avec la maire de secteur Sophie Camard, tandis que 4 autres binômes de l’union de la gauche s’imposent à l’issue du second tour. Certes, dans les cantons d’Istres, de Pelissanne et de Salon-de-Provence 2, certains des élus de cette nouvelle assemblée départementale sont bel et bien classés à gauche, mais ils ont d’ores et déjà annoncé leur choix de se rallier à Martine Vassal, en remerciement de son soutien financier indéfectible.

Martine Vassal fêtant sa victoire en compagnie de Lionel Royer-Perreaut et Laure-Agnès Caradec, le soir du second tour des départementales du 27 juin 2021 (photo © Pierre-Yves Isnard / Marsactu)

Cette dernière, largement réélue avec 68 % des suffrages exprimés, en tandem avec Lionel Royer-Perreaut, se retrouve donc à la tête d’une majorité opulente, ayant même réussi à ravir à la gauche le canton d’Arles et celui de Gardanne, deux fiefs historiques de la gauche. Le RN, qui n’avait gagné en 2015 qu’un seul canton, à Berre-l’Etang, désormais ancré à droite, a remporté la mise dans le 6e canton marseillais où Sandrine d’Angio, ex maire du 13-14, l’emporte de 996 voix face à la gauche. Quant aux deux cantons d’Aix-en-Provence, ils font partie des rares succès du parti gouvernemental LREM qui réussi à y faire élire 3 conseillers départementaux.

Les 5 autres départements de la région PACA disposent désormais tous d’une majorité de droite, y compris les Alpes de Haute-Provence qui étaient pourtant historiquement à gauche depuis une bonne vingtaine d’années. Le Vaucluse est peut-être seul à faire figure d’exception, là où, comme en 2015, gauche et droite se retrouvent à égalité avec 6 cantons chacun, réussissant néanmoins à contenir la poussée du RN qui n’a pas progressé depuis 2015. C’est le maire sans étiquette de Bollène, Anthony Zilio, tombeur de Marie-Claude Bompart, qui risque de jouer les arbitres lors de l’élection du Président de l’exécutif…

Anthony Zilio, maire de Bolène et futur arbitre au Conseil départemental de Vaucluse (photo © Alain Ricci / Le Dauphiné)

Dans les Alpes-Maritimes en revanche, la droite renforce encore son hégémonie en ne laissant plus qu’un seul canton à la gauche. Même configuration dans les Hautes-Alpes où la gauche, bien qu’unie, perd encore la moitié des 4 cantons qu’elle avait conservés en 2015. Quant au Var, où la gauche était totalement absente de l’assemblée départementale depuis 2015, la droite fait carton plein en ne laissant plus au RN qu’un seul canton, celui de Fréjus.

Couleur politique des binômes élus par canton le 27 juin 2021 (source © Ministère de l’Intérieur / Le Monde)

A l’échelle nationale, ces élections départementales confirment globalement cet ancrage du pays à droite, laquelle détient désormais 64 des 95 départements concernés par cette élection. Le Val-de-Marne, dernier département détenu par le Parti communiste, depuis 45 ans quand même, a ainsi basculé à droite, de même que le Puy-de-Dôme qui avait presque toujours été dirigé par la gauche depuis la Libération. Il en est de même du Finistère, désormais ancré à droite, ainsi que l’Ardèche, dernier département marqué à gauche de toute la Région Auvergne-Rhône-Alpes et qui devrait désormais avoir un président LR. Maigre consolation pour la gauche, les départements de Charente et des Côtes-d’Armor repassent sous une majorité issue de l’union de la gauche.

Des résultats qui globalement présentent peu de surprises donc, mais qui confirment néanmoins, élection après élection, que les électeurs de droite restent ceux qui se mobilisent le plus dans un climat de forte désillusion et de désintérêt croissant des citoyens pour la gestion des affaires publiques… Relever le défi de la mobilisation citoyenne devient un véritable enjeu !

L. V.

Encore une fois, la gauche se dégonfle !

21 juin 2021

Comme d’habitude serait-on tenté de dire… Une nouvelle fois, le second tour de ces élections départementales et régionales, dimanche prochain 27 juin 2021 se résumera, pour l’électeur carnussien, comme pour de nombreux autres en France, à un n-ième duel entre un candidat de la droite LR et un autre du Rassemblement national…

Pour ces élections départementales, et pour la première fois depuis bien longtemps, la gauche locale avait pourtant fait l’effort de se présenter unie dans le canton de La Ciotat comme dans une bonne partie des Bouches-du-Rhône, même si l’union n’avait pas réussi à englober les mouvements citoyens pourtant fortement mobilisés depuis la belle victoire du Printemps marseillais l’an dernier.

Danielle Milon et Patrick Ghigonetto, assurés d’être élus au second tour des élections départementales, le 27 juin 2021 (source © La Provence)

Mais cela n’a pas suffi pour endiguer un fort tropisme de l’électorat local pour la droite et l’extrême droite. A Carnoux, comme d’ailleurs à La Ciotat, pourtant le fief des candidats de la liste d’union de la gauche, le binôme du RN arrivait même en tête du premier tour, laissant néanmoins la victoire à la droite LR sur l’ensemble du canton. La maire de Cassis et celui de Ceyreste sont largement en tête avec plus de 42 % des suffrages exprimés à l’issue de ce premier tour, assurés d’être élus sans difficulté à l’issue du second tour.

Avec près de 25 %, le binôme de gauche fait un score plus qu’honorable dans un secteur aussi marqué à droite, mais cela ne suffit pas pour le qualifier. Il lui aurait en effet fallu remporter au moins 12,5 % des inscrits pour pouvoir se maintenir au second tour, ce qui était quasiment mission impossible avec un taux de participation aussi faible, deux-tiers des électeurs n’ayant pas jugé utile de se déplacer…

Un dessin signé Ysope, publié dans Le Ravi

Quant à la Région, le pari était encore plus difficile pour la liste d’union de la gauche menée par l’écologiste Jean-Laurent Felizia, un paysagiste quasi inconnu, simple élu municipal d’opposition dans la petite commune varoise du Lavandou. Son score final de quasiment 17 % à l’échelle régionale et qui dépasse même les 20 % dans les Bouches-du-Rhône, est cependant loin d’être ridicule et lui aurait permis d’obtenir un nombre d’élus non négligeable au second tour.

Il a d’ailleurs été sérieusement tenté de se maintenir pour arbitrer le duel du second tour entre les deux frères ennemis de la droite, Renaud Muselier et Thierry Mariani. Mais la pression des états-majors des partis de gauche qui le soutenaient a été trop forte et il a donc annoncé dès le lendemain du vote qu’il ne pousserait pas plus loin l’aventure et qu’il se résignait donc à jeter l’éponge. Les électeurs de gauche se retrouveront donc, pour la deuxième fois consécutive et pour six ans encore, sans le moindre représentant au Conseil régional PACA.

Le candidat de la gauche unie, Jean-Laurent Felizia, s’est donc retiré après quelques heures d’hésitation (photo © Antoine Tomaselli / MaxPPP / Midi Libre)

Une décision difficilement compréhensible dans un tel contexte où Renaud Muselier, soutenu par le parti présidentiel LREM et qui venait de recevoir le renfort de l’écologiste de droite, Jean-Marc Governatori, était à peu près assuré d’être réélu, même dans une triangulaire. Bien qu’arrivé en tête à l’issue du premier tour, le RN dépassait tout juste la barre des 36 % à l’échelle régionale, loin derrière son score de 2015 qui ne lui avait pourtant pas permis d’atteindre la majorité absolue au second tour.

La crainte de voir Thierry Mariani en tête au second tour était donc très largement infondée. Mais les états-majors politiques parisiens ont préféré monter l’affaire en épingle et dramatiser à outrance ce risque de voir le RN remporter la Région PACA, diabolisant tant et plus Thierry Mariani qui a pourtant fait toute sa longue carrière politique dans les rangs chiraquiens, qui menait la liste UMP aux régionales de 2010 aux côtés de Bernard Deflesselles, et dont on aurait bien du mal à distinguer en quoi ses idées et sa pratique politiques diffèrent de celles de son vieil ami Renaud Muselier…

Renaud Muselier et Thierry Mariani, lors du débat avant le premier tour des régionales (photo © AFP / 20 minutes)

Mais la politique est aussi affaire de symbole et il fallait donc sacrifier la défense des idées de la gauche écologiste sur l’autel du vieux mythe totalement éculé du front républicain, un réflexe pavlovien qui oblige la gauche responsable à s’effacer au profit des vieux renards de la politique affairiste et sans scrupule dont Renaud Muselier est un bel exemple.

Un dessin signé Gagdz

Un sacrifice que Christophe Castaner avait fait sans la moindre hésitation en 2015, avant de quitter ostensiblement les rangs de la gauche pour rejoindre en courant ceux des Macronistes. Mais on aurait pu imaginer davantage de conviction et de combativité de la part des candidats d’union de la gauche en 2021, dans un contexte où jamais on n’a vu un candidat de droite en ballottage défavorable se désister au profit d’un adversaire de gauche pour faire barrage au Front national. Comment les électeurs déjà plus que désabusés et aussi faiblement mobilisés pourraient-ils encore se déplacer pour aller voter alors que leur choix démocratique est aussi clairement bafoué par ceux qui sont supposer les représenter ?

L. V.

Le Département s’endette pour les communes

13 juin 2021

Le budget de l’aide du Conseil Départemental des Bouches-du-Rhône aux communes explose… son endettement aussi !

Cette sorte de clientélisme territorial, dont la Présidente, Martine Vassal, attend sans doute des gains électoraux, a déjà porté ses fruits politiques. Certains élus sortants, mollement classés à gauche dans l’hémicycle départemental, ont loué et soutenu cette politique. Ils en ont été récompensés. A Fos et Istres, les candidats de centre-gauche, responsables municipaux vantant l’action de Martine Vassal, ne se sont vu opposés aucun concurrent du parti des Républicains pour les prochaines élections départementales qui se tiendront la semaine prochaine, dimanche 20 juin 2021. Les 28 millions d’euros de subventions départementales reçues, rien que pour Fos, depuis 2015, expliquent grandement cette entorse à la logique politique.

Martine Vasal en campagne pour sa réélection à la tête du Conseil départemental des Bouches-du-Rhône (photo © Narjasse Kerboua / Made in Marseille)

De son côté, le maire de Roquefort-la-Bédoule, élu en 2020 entre autres avec l’appui de la France Insoumise, contre le maire LR sortant, soutient aussi Martine Vassal. Il faut dire, comme l’affirme la maire de Cassis dans la Provence du 12 juin, que « cela représente pour le canton 51 M€… ». Le maire de Carnoux, « bâtisseur du nouveau Carnoux » comme le présente le Courrier des Maires du 31 mai 2021, suit comme d’habitude le mouvement, soutenant la présidente du Département, en dehors de toute « politique politicienne », bien entendu …

Aide la et Vassal t’aidera… un dessin signé Yakana publié dans Le Ravi

L’argent du contribuable utilisé à des fins politiques, ce n’est pas nouveau, mais pour les Bouches-du-Rhône, cela atteint des sommes vraiment considérables. Pendant les élections départementales de 2015, Martine Vassal dénonçait l’explosion de cette ligne qu’avait décidée son prédécesseur. Le mensuel local Le Ravi note que « En six ans, de 2008 à 2013, Jean-Noël Guérini a distribué aux 119 communes du département 623,6 millions d’euros, soit 103 millions d’euros par an en moyenne. Sous la présidence de Martine Vassal, entre 2015 et 2019, soit cinq exercices, le montant accordé s’est envolé de 25 % pour atteindre 778,3 millions d’euros, soit 155,3 millions d’euros par an en moyenne ! ».

Cette largesse n’a pas été uniforme, comme l’a encore analysé dernièrement Marsactu. Au top, la petite commune de Mas Blanc-des Alpilles et ses 507 habitants qui, depuis avril 2015, ont reçu la somme rondelette de 3,6 millions d’euros pour rénover l’hôtel de ville et la voirie, créer des commerces ou des logements : une manne financière de 1171 € par an et par habitant ! Pas mal lotie non plus, la ville d’Eygalières, qui a reçu 4 996 € par habitant durant la mandature, ce qui est du même ordre de grandeur que l’effort communal lui-même en matière d’investissements. Au moins 16 villes ont reçu plus de 1500 € par habitant. Les Baux-de-Provence ont reçu 932 € par habitant de 2015 à 2019, Marseille seulement 54 €.

Un dessin signé Trax, publié dans Le Ravi

En 2019, avant le Covid, le budget départemental d’aide aux communes (142 M€) était nettement supérieur à celui des routes départementales (106 M€), et à celui de la mobilité 110 M€), qui sont pourtant des compétences obligatoires majeures attribuées exclusivement au Département.

Un rapport de février 2021 de la Chambre régionale des comptes a épinglé le Département pour non respect des obligations de prise en charge des mineurs non accompagnés, qui fait partie des compétences obligatoires exclusives du Conseil départemental. En mars, c’était la Défenseuse (nationale) des droits, Claire Hédon, qui déclarait : « Le Département des Bouches-du-Rhône ne respecte pas ses obligations légales de recueil provisoire d’urgence et porte ainsi atteinte aux droits fondamentaux des mineurs non accompagnés et à leur intérêt supérieur ».Toujours en mars, le Tribunal Administratif ordonnait au Département des Bouches-du-Rhône de respecter ses obligations et de prendre en charge des mineurs isolés laissés volontairement en déshérence.

Affiche apposée à l’entrée de l’église Saint Féréol, dénonçant l’inaction du Département en faveur des enfants des rues (photo © Lisa Castelly / Marsactu)

Dans un tweet publié le 2 mars 2021, Martine Vassal répondait que cela contraignait le Département « à mobiliser 50 M€ » qui « pourraient être mis à disposition de nos habitants en situation d’extrême fragilité […] Stop à l’exploitation de la détresse ! », reconnaissant implicitement l’insuffisance des crédits mobilisés par le Département pour les plus pauvres. La solidarité constitue pourtant l’une des principales compétences obligatoires des Départements, contrairement à l’aide aux communes.

Mais comment le Département peut-il financer ces généreuses subventions communales ? En fait, le Département ne cesse de s’endetter. De 253 M€ en 2010, la dette a dépassé aujourd’hui le milliard d’euros. Cette dette équivaut à peu près à la somme versée aux communes depuis 6 ans. Et selon un document présenté aux élus départementaux le 22 janvier 2021, la majorité actuelle imagine que la dette de la collectivité pourrait atteindre 2,5 milliards en 2024… Cette dette n’est pas due au Covid. Comme le montre le graphe ci-dessous, établi par Marsactu, la dette a dévissé dès l’arrivée aux manettes en 2015 de Martine Vassal.

L’évolution de l’endettement du Conseil départemental ou comment l’aide politique aux communes creuse la dette… (source © Marsactu)

Pour les communes, cette aide bénite est une aubaine. Le Département finance assez systématiquement (avec d’importantes distorsions politiques quand-même) leurs investissements à hauteur de 60 % et leur permet de ne pas emprunter. La ville de Carnoux fait d’ailleurs partie des commune qui bénéficient à plein de ce dispositif politiquement très avantageux. On comprend mieux le soutien de certains maires à cette pratique. Ce qui est sûr, cependant, c’est que le contribuable départemental subventionne les communes afin que la charge d’emprunt du contribuable communal soit plus faible. Beau tour de passe-passe !

J. Bx.

(article publié sur le site de la liste Carnoux citoyenne, écologiste et solidaire)

Martine Vassal : demain, on boit gratis !

26 Mai 2021

La Présidente sortante LR des Bouches-du-Rhône, par ailleurs à la tête de la Métropole Aix-Marseille-Provence, est décidément prête à tout pour se faire réélire. Récemment récipiendaire d’une Marianne d’or destinée à saluer la gestion de la crise sanitaire du Covid-19 par le Département, Martine Vassal ne pouvait bien évidemment pas rater l’occasion, en pleine campagne électorale pour sa réélection, de faire un petit cadeau, aux frais du contribuable, selon une stratégie clientéliste dont elle est coutumière et qui lui a plutôt bien réussi jusqu’à présent.

Martine Vassal au micro de RMC, le 19 mai 2021 à 8h30, annonçant comme un scoop le maintien des aides aux bars-restaurants (photo © RMC)

Ainsi qu’elle l’exposait avec enthousiasme au micro de RMC, mercredi 19 mai 2021, le jour de la réouverture des terrasses, « On va profiter de nos terrasses, et je peux vous annoncer un scoop : on a décidé avec la Métropole et le Département pour toute l’année 2021 d’exonérer l’ensemble des terrasses pour aider les restaurateurs. On l’avait fait jusqu’en mai, on va jusqu’en décembre parce que les restaurateurs on les aime beaucoup, ils en valent la peine et on compte sur eux pour tout respecter ».

Une annonce fort généreuse en apparence mais qui a quelque peu agacé certains élus de la municipalité de Marseille, au point qu’ils se sont sentis obligés de rappeler gentiment à la Présidente du Département et de la Métropole que la gestion de la redevance perçue pour l’occupation temporaire du domaine public par les terrasses des bars et des restaurants relevait d’une compétence exclusive de la commune…

Terrasse de restaurant sur le Vieux-Port à Marseille (photo © Frédéric Speich / La Provence)

Il est vrai qu’il existe quelques exceptions. Le contraire serait beaucoup trop simple, le législateur ayant considéré avec sagesse que la question du partage des compétences entre collectivités territoriales était une affaire beaucoup trop sérieuse pour qu’on puisse se permettre de la rendre compréhensible par le commun des mortels.

Comme l’a précisé France 3, il existe en effet une particularité à Marseille puisque le Département, au titre de sa compétence portuaire (qui, faut-il le rappeler ne porte pas sur la gestion du port de Marseille, laquelle relève d’une autre entité le Grand Port Maritime de Marseille, vous suivez ?), le Département donc est la collectivité gestionnaire de l’espace public situé à proximité immédiate du Vieux-Port. A ce titre, c’est donc lui et non pas la mairie qui perçoit les redevances pour une petite centaine d’établissements situés dans ce secteur, de même d’ailleurs qu’à Cassis ou La Ciotat notamment. De la même manière, c’est la Métropole qui est gestionnaire de certaines zones industrielles et commerciales, ce qui lui permet de gérer à ce titre certaines conventions d’occupation temporaires du domaine public dans ces secteurs.

La réouverture des bars, un événement majeur, attendu avec impatience… Un dessin signé Glez

De fait, ces quelques établissements, qui sont exonérés de taxe depuis octobre 2020, pourront donc, grâce à l’extrême générosité de Martine Vassal, continuer à bénéficier de cette mesure jusqu’à la fin de l’année, ce qui devrait représenter un manque à gagner que Mme Vassal elle-même estime à 800 000 € pour la Métropole et à 700 000 € pour le Département. Bien entendu, cela est sans commune mesure avec les 1700 établissements qui sont du ressort de la Ville de Marseille, même si cette dernière a aussi accordé une exonération des taxes pendant la période de confinement pour un montant qu’elle chiffre à 1,2 millions d’euros.

Le maire de Marseille, Benoît Payan, à la rencontre des cafetiers et restaurateurs (photo © Ville de Marseille / Destimed)

Le maire de Marseille en personne, Benoît Payan, est donc monté au créneau et s’est porté à la rencontre des restaurateurs pour faire connaître le dispositif proposé par la municipalité et destiné à faciliter la réouverture des terrasses en autorisant les cafetiers et restaurateurs marseillais à doubler gratuitement leur emprise sur l’espace public, quitte à créer de nouvelles terrasses là où les conditions de circulation le permettent. Une démarche qui a connu un vif succès puisque 500 commerces s’étaient déjà inscrits au jour de la réouverture !

Cette mesure, qui a fait l’objet d’une délibération présentée en conseil municipal vendredi 21 mai, reste valable au moins jusqu’au 30 septembre prochain, et sa prolongation éventuelle semble même envisagée, même si Roland Cazzola, conseiller municipal délégué à l’espace public, reconnaît volontiers à Marsactu : « Je serais favorable à l’exonération pour 20 ans si les finances de la Ville le permettaient, mais ce n’est pas le cas ». Un discours de responsabilité qui tranche quelque peu avec les annonces démagogiques de Martine Vassal… La politique est décidément un métier !

L. V.

Départementales 2021 : ça se précise !

8 Mai 2021

Voilà bien un problème qui ne préoccupe pas les régimes dictatoriaux : comment organiser aux échéances prévues les consultations électorales en période de pandémie sans risquer d’augmenter la transmission du virus ? En France, les élections départementales auraient dû avoir lieu en mars 2021, 6 ans après celles de 2015 qui avaient été marquées par une très forte poussée de la droite, rassemblée alors sous la bannière fédératrice de l’UMP, tandis que la gauche se présentait en ordre totalement dispersé. Une stratégie payante puisqu’à l’issue de ce scrutin, la droite se retrouvait aux manettes de 67 départements sur 101 ! Même les Bouches-du-Rhône, pourtant à gauche depuis une soixantaine d’années avaient basculé à l’UMP, et sont dirigées depuis par Martine Vassal.

Martine Vassal vote en avril 2015 pour la Présidence du Conseil départemental des Bouches-du-Rhône (source © GoMet)

Repoussé une première fois au 13 juin, le premier tour des prochaines élections départementales se tiendra finalement le dimanche 20 juin 2021, en même temps d’ailleurs que les élections régionales, histoire de ne pas déplacer les électeurs pour rien… Cette particularité mise à part, le découpage cantonal reste celui qui avait été étrenné en 2015 pour permettre un rééquilibrage démographique entre circonscriptions et limiter quelque peu la surreprésentation traditionnelle des populations rurales. Chaque canton est désormais représenté par un binôme, parité oblige, avec sa paire de suppléants, ce qui a permis une hausse spectaculaire du nombre de femmes dans les assemblées départementales. En revanche, le cumul des mandats reste la règle, la plupart des élus départementaux étant en même temps maire ou conseillers municipaux…

Vue la polarisation actuelle de l’opinion publique sur l’évolution de l’épidémie de Covid-19, on ne peut pas dire que ces élections qui approchent à grand pas suscitent un engouement exceptionnel, malgré le matraquage publicitaire entamé depuis déjà des mois par l’exécutif sortant, et il y a fort à parier que le taux de participation y sera encore plus faible que pour les dernières municipales en 2020. Pour autant, il y a quand même eu de nombreuses tractations en coulisse pour arriver à constituer les binômes qui se présenteront aux suffrages dans seulement 6 semaines et le dépôt des candidatures est d’ores et déjà clôturé depuis le 5 mai.

Danielle Milon et Patrick Ghigonetto, candidats LR sur le canton de La Ciotat, avec leurs suppléants (photo © C. Ms / La Provence)

On sait donc désormais que sur les 29 cantons qui forment le département des Bouches-du-Rhône, il y aura pas moins de 155 binômes en lice. Depuis 2015, la commune de Carnoux est rattachée au canton de La Ciotat, lequel comprend également les villes de Cassis, Ceyreste, Roquefort-la Bédoule, Cuges-les-Pins et Gémenos. En 2015, ce sont les maires de Cassis (Danielle Milon) et de la Ciotat (Patrick Boré), tous deux LR, qui avaient été facilement élus. Ce dernier ayant depuis abandonné son fauteuil de maire au profit d’un autre, plus confortable, de sénateur, c’est cette année le maire de Ceyreste, Patrick Ghigonetto, qui s’alignera en binôme avec Danielle Milon pour défendre les couleurs de la droite LR.

Ils auront en face d’eux une liste du Rassemblement national (RN) et une issue d’une alliance de plusieurs partis de gauche qui ont enfin compris la nécessité de s’unir après une longue série de défaites enregistrées depuis des années où la gauche est systématiquement absente du second tour. L’élu d’opposition de Ceyreste, le socialiste Tony Delogu, battu aux dernières municipales par Patrick Ghigonetto, tentera de prendre sa revanche, en tandem avec une militante CGT, Sylvie Fardella, puéricultrice à l’hôpital de La Ciotat. Pas d’écologiste donc sur le canton, ni de représentant de la France insoumise, ni de candidat du parti présidentiel LREM…

Sylvie Fardella (PCF) et Tony Delogu (PS), candidats sur le canton de La Ciotat (source © Opera news)

En réalité, seuls les 3 blocs présents sur notre canton seront représentés sur l’ensemble du territoire départemental. Côté LR, Martine Vassal, qui espère bien retrouver son siège de présidente du Conseil départemental, se présente dans le 10e canton de Marseille avec son fidèle acolyte Lionel Royer-Perreaut, maire de secteur des 9e et 10e arrondissements, tandis qu’une bonne partie de ses fidèles brigue de nouveau un siège à l’assemblée départementale, à l’instar de Laure-Agnès Caradec, Didier Réault, Sabine Bernasconi, Yves Moraine, Sabine Bernasconi ou encore Gérard Gazay à Aubagne.

Sophie Camard en tandem avec Benoît Payan dans le premier canton de Marseille (photo © V. V. / La Provence)

A gauche, Benoît Payan et Sophie Camard tenteront de se faire réélire sur Marseille, de même que plusieurs figures du Printemps marseillais désormais à la tête de l’exécutif municipal, tels que Christian Pellicani, Yannick Ohanessian, Audrey Garino, Hervé Menchon, Samia Ghali, Sébastien Jibrayel, Anthony Krehmeier ou encore Jean-Pierre Cochet. Ni Michèle Rubirola, affaiblie par ses ennuis de santé, ni Jean-Noël Guérini (toujours élu à ce jour au Conseil départemental !), ni l’ancien député socialiste, Henri Jibrayel, récemment condamné pour abus de confiance et prise illégale d’intérêt, ne seront finalement candidats.

Aucun représentant de la France insoumise ne figurera non plus sur les listes d’union de la gauche faute d’entente préalable. Ce parti présentera donc ses propres candidats dans certains cantons, ce qui devrait largement faire les affaires de la droite LR en réduisant les chances de la gauche de se qualifier au second tour, la barre à franchir pour se maintenir étant particulièrement haute pour ces élections (12,5 % des inscrits)…

Les élections départementales, un scrutin peu favorable pour LREM, comme toutes les élections locales (dessin signé Kak, publié en novembre 2019 dans L’Opinion)

Curieusement, la République en marche (LREM), manifestement en peine pour trouver des volontaires, ne présente finalement des candidats que dans 7 des 29 cantons, à Istres, Marignane et quelques secteurs de Marseille et Aix-en-Provence. Pas de quoi conforter son ancrage local toujours aussi fragile, mais un beau coup de pouce à la droite LR qui a de fortes chances de se retrouver en face à face contre un élu RN au second tour comme en 2015 dans un grand nombre de cantons !

Comme souvent, des candidatures dissidentes se sont fait jour en plusieurs endroits, ce qui explique que certains cantons se retrouvent avec pas moins de 8 listes en concurrence, comme dans le 11e canton de Marseille où se présente notamment un revenant, Philippe Berger, désormais soutenu par LREM, lui qui fut élu pendant 19 ans aux côtés de Jean-Claude Gaudin dont il fut longtemps l’adjoint en charge du Bataillon des marins-pompiers.

Hassen Hamou en 2016, alors membre de l’UMP et candidat aux primaires de la droite… (photo © Martin Bureau / AFP / Yahoo actualités)

Saluons aussi la remarquable souplesse du candidat Hassen Hamou, candidat d’union de la gauche dans le 6e canton de Marseille, qui, à 31 ans seulement, a déjà exploré une large partie de l’échiquier politique : candidat du PCF en 2008, il fut ensuite tête de liste du PRG guériniste en 2014, puis candidat à la primaire de l’UMP en 2015 avant de devenir responsable local du MODEM puis d’atterrir finalement chez Europe écologie – Les Verts. Il sera d’ailleurs opposé, lors de ces prochaines élections, à Christophe Masse, un ancien député PS qui représente désormais LREM. Espérons que leurs électeurs ne seront pas trop déboussolés par de telles girouettes…

L. V.

Régionales 2021 : la Gauche saura-t-elle s’unir en PACA ?

10 avril 2021

Un grand flou entoure décidément ces prochaines élections régionales dont le premier tour est pourtant officiellement prévu dans deux mois seulement, le 13 juin 2021. Même cette date reste incertaine alors que les taux d’incidence de l’épidémie de Covid-19 sont en train d’exploser dans les Bouches-du-Rhône : en 7 jours, le taux d’incidence dans le département a grimpé de près de 20 % pour atteindre 579 cas pour 100 000 habitants, plaçant le département dans le peloton de tête de ceux où le virus circule le plus rapidement en France. Un record dont on se serait bien passé alors que les services de réanimation sont déjà au-delà de leur capacité d’accueil du fait du Covid-19…

Renaud Muselier, président masqué et bien ancré de la Région PACA (source ©compte Twitter R. Muselier)

Mais il n’y a pas que la date des élections qui reste incertaine. La liste des candidats l’est tout autant. Certes, Renaud Muselier ne fait pas mystère de sa forte envie de rempiler, lui qui a hérité de la présidence de la Région PACA en cours de mandat, à la faveur du renoncement de la tête de liste élue en décembre 2015, Christian Estrosi, rapidement reparti dans ses terres niçoises moins de 18 mois après avoir été élu à la région… Un départ qui avait, à l’époque, coïncidé avec celui de la chef de son opposition frontiste, Marion Maréchal-Le Pen, qui avait carrément démissionné de son mandat début mai 2017 pour se retirer de la politique.

Christophe Castaner, alors ministre de l’Intérieur, aux côtés de Christian Estrosi, au circuit du Castellet en juin 2019 (photo © Gérard Julien / AFP / Paris Match)

Quant à celui qui avait mené la liste de gauche lors de ces dernières élections régionales, un certain Christophe Castaner, qui se disait alors socialiste avant de devenir le porte parole improbable du parti macroniste, il avait purement et simplement renoncé au combat dès le soir du premier tour, laissant la gauche totalement absente de l’hémicycle régional depuis près de 6 ans. A se demander donc si le choix des têtes de listes qui s’affronteront le 13 juin prochain présente la moindre importance !

En tout cas, deux d’entre elles sont déjà connues. C’est Thierry Mariani qui mènera la campagne du Rassemblement national, lui qui était tête de liste pour l’UMP lors des régionales de 2010, face à Michel Vauzelle et Jean-Marie Le Pen : une sacrée évolution politique pour cet admirateur invétéré de la Russie de Poutine… Quant à Renaud Muselier, même s’il feint de s’intéresser à tout autre chose que la campagne électorale, il ne fait aucun doute qu’il sera tête de liste pour le parti LR qui lui a d’ailleurs déjà accordé officiellement son investiture ce mercredi 7 avril 2021.

Thierry Mariani, héraut du RN, ici avec Marine Le Pen, après avoir été tête de liste de l’UMP (photo © Alain Robert / SIPA / 20 minutes)

Il devrait d’ailleurs rencontrer sur sa route un autre candidat de droite, Benoît Kandel, ancien adjoint d’Estrosi à la mairie de Nice et qui compte bien se lancer avec le soutien de Nicolas Dupont-Aignan sous l’étiquette un tantinet ambiguë, La droite et les républicains ensemble. Quant à La République en marche, qui sait d’avance qu’elle ne jouera qu’un rôle de figurant dans cette élection locale, nul ne sait encore très bien si l’obscure Secrétaire d’État chargée de l’incarner, Sophie Cluzel, parviendra à monter une liste autonome ou si elle préférera se rallier à la droite LR dès le premier tour.

Face à un telle pléthore de candidats à droite et face à un Renaud Muselier tellement sur de lui qu’il ne paraît même pas envisager de faire campagne, la gauche semble encore hésiter à renouveler l’exploit qui lui a permis en décembre 2015 de ne même pas être présente en second tour… Chaque parti a bien entendu depuis belle lurette choisi son candidat en espérant que l’ensemble des autres formations de gauche se rangerait derrière lui. Quelque peu hésitants sur la stratégie de rassemblement à privilégier, les écologistes en sont déjà à leur deuxième choix et se placent désormais derrière la bannière de Jean-Laurent Félizia, conseiller municipal du Lavandou.

Jean-Laurent Félizia, candidat déclaré EELV pour les régionales de 2021 (source © Gomet)

Mais la désunion de la gauche n’est pas forcément une fatalité, comme l’a montré la belle victoire du Printemps marseillais à l’occasion des dernières élections municipales à Marseille. C’est donc naturellement de ce côté que se tournent les regards de ceux qui osent encore croire que la gauche, bien que largement minoritaire depuis des années dans la région PACA, pourrait malgré tout être présente dans la prochaine assemblée régionale. Et c’est justement une des figures montantes du Printemps marseillais qui pourrait relever le défi. Olivia Fortin, 5ème adjointe au maire de Marseille, qui vient d’annoncer, jeudi 8 avril, qu’elle se portait « candidate à la candidature pour les régionales » et qu’elle était « prête à prendre la tête d’une liste au service d’un projet de gauche et d’écologie ».

Olivia Fortin, future tête de liste d’une gauche unie aux prochaines régionales en PACA ? (photo © Valérie Vrel / La Provence)

Inconnue du grand public il y a peu, cette chef d’entreprise dans le domaine de l’événementiel s’était fait connaître en participant à la fondation en 2018 du collectif citoyen Mad Mars, qui militait pour une liste unique, progressiste et citoyenne, en vue des municipales de 2020 à Marseille. Une stratégie qui a fait ses preuve puisque Olivia Fortin, tête de liste non encartée, a battu au second tour la présidente LR du Département et de la Métropole, Martine Vassal, dans son fief des 6e et 8e arrondissements, pourtant acquis de longue date à la droite.

Forte de ce résultat inespéré, qui avait permis à la gauche de s’emparer de la mairie de Marseille après 25 ans de règne gaudiniste, Olivia Fortin rêve de rééditer l’exploit à la Région, ce qui ne sera possible que si la gauche parvient à s’unir dès le premier tour de scrutin, option à laquelle elle affirme travailler sans relâche, indiquant : « on est tous d’accord sur 90 % des choses qu’il faut faire, pour la justice sociale, la transition écologique, la démocratie, alors allons-y ! ». Un bel optimisme qui pourrait peut-être parvenir à rallier les plus réticents, à condition de contourner les ambitions politiques et les querelles de chapelle qui ont jusque-là trop souvent conduit la gauche locale dans le décor : un sacré challenge !

L. V.

Ça plane pour le chanvre

3 avril 2021

Le chanvre serait, dit-on, l’une des plantes les plus anciennement cultivée par l’Homme, dès le Néolithique en Asie. Curieusement, elle est presque plus connue désormais sous son nom latin Cannabis sativa, du fait de ses vertus psychotropes, surtout issues du « chanvre indien » qui pousse en climat équatorial et est riche en résine de tétrahydrocannabinol (THC). Cet usage psychotrope, popularisé par la culture hippie dans les années 1960 date en fait de la nuit des temps puisqu’on le trouve mentionné dans des textes égyptiens antiques comme dans d’anciens traités chinois et indiens, même si l’Occident n’en a découvert les vertus thérapeutiques puis récréatives qu’au XIXe siècle…

Culture de chanvre dans la Sarthe (source © La galerie du chanvre)

Mais si le chanvre connaît un tel succès, c’est parce que cette plante possède bien d’autres usages. En fait, comme dans le cochon, tout est bon dans le chanvre ou presque. Ses fibres en particulier ont été utilisées, dès 600 avant J.-C., pour confectionner des vêtements en Chine, usage qui s’est fortement répandue en Europe dès le Moyen-Âge. Le papier à base de fibre de chanvre a aussi été très utilisé jusqu’en 1883 et aurait, paraît-il, servi à imprimer la première Bible sortie des presses de Gutenberg en 1454, avant d’être réservé à l’impression des billets de banques.

Au XVIIe siècle, les fibres de chanvre étaient particulièrement prisées pour la réalisation de cordages. En 1661, Colbert lance ainsi la construction de la Corderie royale de Rochefort pour fabriquer les gros cordages en chanvre de 200 m de longueur destinés à la Marine. Vers la même époque, avec l’installation le long du Vieux-Port de l’Arsenal des galères, se développe à Marseille une véritable industrie de fabrication de cordage et de voiles en chanvre. Après la destruction des remparts de la ville en 1666, la nouvelle rue qui s’étend entre le cours Saint-Louis et l’Arsenal prend naturellement le nom de Canebière justement en référence au chanvre cultivé depuis des siècles dans les marécages du bord de mer dans la partie basse de cette artère popularisée dans le monde entier par la chanson de Vincent Scotto.

Le bas de la Canebière sur le Vieux-Port (source © Mon chanvre)

Et voilà que le chanvre revient en force comme culture industrielle après avoir été quasiment abandonnée, souvent interdite pour limiter la production de marijuana mais surtout à cause du développement d’autres fibres textiles dont le coton, omniprésent avant d’être remplacé par les fibres synthétiques à base de produits pétroliers. Alors qu’on cultivait plus de 175 000 ha de chanvre en France au milieu du XIXe siècle, ces surfaces ne dépassaient pas quelques centaines d’hectares en 1960.

Mais depuis, la culture de chanvre industriel, à très faible teneur en THC, connaît un net regain, d’abord pour un usage papetier, puis pour répondre à différents besoins dont celui des isolants thermiques. Le bois de chanvre, ou chènevotte, issu de la partie centrale de la chanvre, mélangé à de la chaux produit le béton de chanvre, connu depuis l’Antiquité mais qui revient en force en isolation intérieure comme extérieure du fait de son grand pouvoir de « respiration » naturelle. La laine de chanvre est également un excellent isolant thermique qui concurrence très favorablement d’autres produits plus traditionnels comme les laines minérales.

C’est d’ailleurs principalement ce nouveau marché de l’isolation des bâtiments qui a permis un important développement de la culture de chanvre ces dernières années. La Champagne en particulier s’en est fait une véritable spécialité en devenant la première région productrice en Europe. La France est d’ailleurs leader européen en la matière avec plus de 83 000 tonnes de fibres et étoupe de chanvre produits en 2017.

Culture de chanvre en Camargue (photo © Jérôme Rey / La Provence)

Mais les Bouches-du-Rhône renouent désormais avec la culture du chanvre pratiquée à Marseille depuis l’époque des Gaulois. En 2019, deux entrepreneurs, cofondateurs de la société ABC Chanvre, implantée à Trets, ont lancé leur propre filière de développement du chanvre avec 25 ha cultivés entre la Camargue et les Alpilles. Une surface qu’ils ont doublé dès cette année, avec pour débouché visé principalement le textile et le béton de chanvre. Leur objectif est d’atteindre les 500 ha dès 2023, ce qui permettrait de rentabiliser une unité fixe de transformation industrielle de la fibre.

Contrairement à d’autres cultures, celle du chanvre est parfaitement adaptée à l’agriculture biologique du fait de la robustesse de la plante qui ne nécessite pas de pesticides. Une culture qui est donc bien dans l’air du temps et qui permet d’offrir de très nombreux débouchés. Outre celui du bâtiment, on peut bien sûr citer celui du textile puisque l’on voit désormais apparaître de nombreuses marques qui commercialisent des vêtements bio-sourcés et de sacs à base de chanvre. Les fibres de chanvre sont aussi utilisées comme renfort pour alléger les carrosseries de certaines voitures, dans la lignée de Ford aui avait expérimenté dès 1940 la construction d’une voiture à carrosserie de chanvre.

Feuilles de Cannabis sativa (source © La fleur de Jack)

La chènevotte est aussi utilisée comme litière absorbante pour animaux ou comme paillage pour les cultures maraîchères, tandis que les graines de chanvre, dites chènevis, sont particulièrement riches en protéines et en huile. Consommées couramment en France jusqu’au XIXe siècle, elles reviennent à la mode, du fait de la forte teneur en oméga 3 et 6 et de la faible concentration en acides gras saturés de l’huile de chanvre. Cette dernière, qui a d’ailleurs aussi été utilisée comme combustible automobile bien avant le gazole, présente bien d’autres usages, notamment dans la fabrication de peintures, vernis, encres et cosmétiques.

Le chanvre, après avoir été une des plantes les plus anciennement cultivées, serait-il en train de redevenir un élément majeur de l’agriculture de demain ?

L. V.

Départementales 2021 : Vassal mise sur la peur

19 mars 2021

Nous sommes en mars et comme à l’accoutumée on décèle à des petits riens que le printemps arrive, que les beaux jours reviennent, et que… les élections départementales se profilent à grands pas. Prévues initialement en mars 2021, elles ont été exceptionnellement repoussées aux 13 et 20 juin prochains, en même temps que les Régionales. Pour la première fois, les Français seront donc amenés à choisir le même jour leurs représentants dans ces deux institutions territoriales dont personne ne sait très bien comment se répartit leur champ d’action respectif, mais dont chacun constate que leurs élus sont souvent les mêmes et qu’elles servent principalement de tiroir caisse pour les élus communaux, eux mêmes fortement présents au sein de ces deux collectivités.

Ces trois mois de mandat supplémentaire offerts aux élus, Martine Vassal, qui est à la tête de l’exécutif du Département des Bouches-du-Rhône depuis mars 2015, compte bien les exploiter au maximum pour sauver son poste après sa défaite spectaculaire à la mairie de Marseille en juin dernier. Bien avant le lancement de la campagne officielle, elle profite donc des largesses de l’institution qu’elle préside, pour inonder le territoire de ses affiches publicitaires destinées à matraquer l’idée que c’est le Conseil départemental qui est le principal garant de la sécurité des habitants !

Des abribus retapissés aux couleurs du Département et de son obsession pour la sécurité publique (photo © CPC)

Capot de véhicule de police, caméra de vidéosurveillance ou gilet pare-balle, tous les visuels sont bons pour inculquer dans la tête du citoyen buccorhodanien qu’il est en danger permanent mais que, fort heureusement, le Département veille sur sa sécurité. Pas un abribus du département n’a pu échapper à cette campagne d’affichage massive, couplée, pure coïncidence naturellement, avec une autre série d’affichage, cette fois au nom de la Métropole Aix-Marseille-Provence, vantant l’action de cette collectivité en matière d’applications numériques au service…de la sécurité des citoyens.

Il se trouve, par le plus grand des hasards, que ces deux institutions sont présidées par la même personne, ce qui ne peut que confirmer la cohérence du discours de cette dernière, laquelle avait d’ailleurs, en début d’année, exprimé ses vœux via une campagne publicitaire jumelée en juxtaposant sur les mêmes affiches le logo des deux institutions : à se demander même en quoi on aurait besoin de deux structures différentes…

Une affiche du Département en faveur de la vidéosurveillance (source © CD 13)

Bien évidemment, seuls les mauvais esprits pourraient imaginer un quelconque souci de propagande électoraliste dans la présente campagne de promotion du Département qui ne fait que mettre en avant son action financière incontestable au service de la sécurité des habitants. Sachant que la peur de l’insécurité est un puissant agent mobilisateur auprès de l’électorat âgé et conservateur, celui qui se mobilise en masse pour la droite LR et qu’il convient avant tout de détourner de ses tentations à soutenir le Rassemblement National, le calcul n’est probablement pas dénué de toute arrière-pensée, mais n’insistons pas sur ces petits calculs politiciens.

Le fait est que le Département dépense sans compter pour subventionner les communes et même l’État afin d’investir toujours davantage dans du matériel supposé améliorer le travail des forces de l’ordre. En 2021, Martine Vassal annonce ainsi mettre 2 millions d’euros à disposition des communes du département pour les aider à s’équiper en caméras de vidéosurveillance, subventionnées à hauteur de 60 %.

Marine Vassal aux côté du Ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanain le 26 février 2020 (photo © Serge Guéroult / La Provence)

Suite à la visite du Ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanain, elle a même promis que le Conseil Départemental doublerait la mise de 1 million d’euros annoncée par l’État afin d’équiper la Ville de Marseille de nouvelles caméras de surveillance, et ceci malgré les réticences de la nouvelle municipalité. Il faut dire que la ville est déjà l’une des mieux équipées de France en matière de matériel de vidéosurveillance avec pas moins de 20 % des effectifs de la police municipale affectés exclusivement au visionnement des images, même si l’objectif principal est surtout de verbaliser les infractions au code de la route. La Ville réclame désespéramment des effectifs de policiers mais l’État comme le Département veulent absolument lui fourguer du matériel de vidéosurveillance, fragile et coûteux à l’entretien, qui ne fait souvent que déplacer les points de délinquance et ne fait rien pour apaiser les conflits de voisinage et les tensions au quotidien dans les quartiers…

Mais le Département ne fait pas que dans la caméra. Martine Vassal n’a pas hésité à investir plus d’un million d’euros pour la construction du nouvel hôtel de police d’Arles, une commune hors Métropole qu’il convient de choyer tout spécialement. Financement d’études, construction de bâtiments, achats de véhicules, de gilets pare-balle, d’armement pour les policiers municipaux, rien n’arrête le Conseil départemental quand il s’agit d’aider les communes en matière de sécurité de proximité, avec un montant budgété de 62 millions d’euros pour 2021, sans compter naturellement les investissements faits en direct pour la sécurité des établissements relevant du Départements, tels que les collèges.

Martine Vassal en visite sur le site du futur hôtel de police d’Arles le 3 août 2020 (source © Twitter)

Et ce n’est pas tout, car le Département met aussi la main à la poche pour aider l’État ! Martine Vassal a ainsi accordé plus de 36 millions d’euros pour la construction et la rénovation de casernes de gendarmerie, dont une nouvelle à Roquevaire qui devrait ouvrir ses portes en 2024. Même le RAID, unité d’intervention de la police nationale et symbole du bras armé de l’État, s’est vu offrir une subvention du Département pour acquérir un nouveau navire à propulsion rapide…

Une telle largesse ne manque d’ailleurs pas d’étonner de la part d’une collectivité qui a perdu en 2015 sa clause de compétence générale et dont les compétences exclusives sont principalement l’action sociale (et notamment l’aide à l’enfance et l’octroi des prestations d’aide sociale, mais aussi la prise en charge des mineurs non accompagnés pour laquelle Martine Vassal est aux abonnés absents), la construction et l’entretien des collèges, mais aussi la gestion de la voirie départementale, celle des ports ou encore celle du service départemental d’incendie et de secours.

Même en cherchant bien, la compétence du maintien de la sécurité ne fait pas partie, ni de près ni de loin, des compétences relevant du Département. Il s’agit d’une compétence exclusive de l’État, uniquement partagé avec le Maire qui possède également des pouvoirs de police. On peut concevoir que Martine Vassal qui se rêvait dans le fauteuil de Maire de Marseille, ait quelques regrets de ne pas pouvoir s’investir au quotidien sur ces nobles missions qui manifestement la passionnent. Peut-être serait-il néanmoins utile que quelqu’un lui souffle que cette problématique ne fait pas réellement partie de son champ de compétence, ni au Département ni à la Métropole ?

L. V.

Présidentielle 2022 : à quoi peut-on s’attendre ?

22 février 2021

La séquence des municipales vient à peine de se terminer avec son intermède interminable entre le premier tour gelé par un confinement inédit en mars 2020 et le second tour à la fin du mois de juin, suivi dans la foulée par l’élection des maires puis celle des exécutifs de l’intercommunalité, avant de se poursuivre, comme cela a été le cas à Marseille, par un réajustement de dernière minute qui a conduit la ville à se doter d’un troisième maire en un an, du jamais vu ! Passons sur l’élection sénatoriale de septembre et voilà que se profilent déjà à l’horizon, a priori pour les 13 et 20 juin prochain deux élections pour le prix d’une, histoire de renouveler en seule fois le Conseil départemental et l’Assemblée régionale.

Et ensuite, ce sera le tour des Présidentielles d’ores et déjà programmées pour avril 2022 avec les législatives dans la foulée, sans doute en juin. Alors forcément, quatorze mois à l’avance, chacun commence à se demander qui seront les candidats assez fous pour se présenter à une telle fonction où il n’y a que des coups à prendre et dont les titulaires successifs voient leur côte de popularité fondre comme neige au soleil tandis que les médias et les réseaux sociaux n’en finissent pas de se répandre en critiques et invectives de tous ordres à leur égard…

Emmanuel Macron pas pressé de se porter candidat pour 2022 : un dessin signé Chaunu (source © Pinterest)

Il est sans doute trop tôt pour faire des hypothèses. Bien sûr il est très probable que le vainqueur de 2017, Emmanuel Macron, se présentera à sa propre succession malgré la piètre opinion qu’ont de lui et de sa politique un grand nombre de Français toujours prompts à dénigrer le pouvoir en place. Comme tout président sortant, il attendra sans doute le dernier moment pour entrer en campagne tant il est malaisé d’endosser simultanément les rôles de chef de l’exécutif et de candidat en campagne électorale. Au risque de devoir renoncer comme François Hollande avait dû le faire lors des dernières présidentielles…

Mais on ne voit pas très bien à ce stade quelle personnalité pourrait l’empêcher de se faire réélire tant l’échiquier politique national semble dévasté. Son challenger le plus probable, sinon le plus crédible, est, qu’on le veuille ou non, Marine Le Pen qui a déjà affirmé depuis début 2020 qu’elle se tenait prête pour sa troisième candidature. En 2017, moins de 900 000 voix la séparait d’Emmanuel Macron au premier tour et plus d’un Français sur trois avait voté pour elle au second tour. Tous les sondages actuels la donne d’ailleurs qualifiée face au président sortant pour cette prochaine échéance.

Marine Le Pen en embuscade ? Un dessin signé Kak, publié dans l’Opinion

Bien entendu, cela ne veut rien dire tant qu’on ignore quels seront les autres candidats. Jean-Luc Mélenchon en tout cas s’est d’ores et déjà engagé, qui se présentera lui-aussi pour la troisième fois consécutive, au nom de la France insoumise. Il était arrivé en quatrième position en 2017 avec un peu moins de 20 % des suffrages exprimés et sa cote de popularité s’est bien érodée depuis. Comme pour Marine Le Pen, on voit mal comment une personnalité aussi clivante pourrait arriver à rassembler sur son nom une majorité de Français au second tour, mais sait-on jamais ?

Jean-Luc Mélenchon, candidat pour la troisième fois consécutive (photo © Gérard Julien / AFP / L’Express)

D’autres candidats ont aussi fait part dès à présent de leur volonté de se présenter. C’est le cas de Nicolas Dupont-Aignan, déjà au rendez-vous en 2012 et 2017 et dont on a bien du mal à suivre les errements politiques. Il en est de même pour l’inclassable berger des Pyrénées, Jean Lassalle dont on risque de nouveau d’entendre la voix rocailleuse. C’est aussi le cas de Jean-Frédéric Poisson, éliminé des primaires de la droite en 2017 et qui vient de renommer son parti La Voix du Peuple. Le président de l’UPR et éternel chantre du Frexit, François Asselineau, serait également dans la course, de même que Christophe Lagarde, président de l’UDI qui affirme sans ciller : «  Je suis le seul à avoir les idées, le parti, l’argent, les élus locaux, les signatures, et je ne vois pas l’intérêt de suivre quelqu’un » : effectivement, avec autant d’atouts dans son jeu, on voit mal comment il pourrait ne pas l’emporter dès le premier tour…

Xavier Bertrand, candidat déjà déclaré à droite (photo © Dimanche en campagne / France 3 régions)

A croire en tout cas que ni la droite ni la gauche parlementaires traditionnelles ne s’intéressent à cette élection… A droite, on évoque certes les noms de plusieurs personnalités dont Bruno Retailleau, président du groupe LR au Sénat, qui milite pour l’organisation de nouvelles primaires, tandis que d’autres candidats tels Xavier Bertrand (qui a déjà annoncé sa candidature après avoir quitté le parti LR), Valérie Pécresse, ou même Rachida Dati se tiennent en embuscade. Le général Philippe de Villiers, qui avait démissionné avec fracas de son poste de chef d’État-major des Armées et dont les ouvrages connaissent un beau succès de librairie, se verrait bien aussi en recours après cette période de crise et d’incertitudes…

Et à gauche ? En dehors de la France insoumise, décidée à faire cavalier seul quoi qu’il arrive, rien n’indique à ce stade qu’arrivera à émerger une candidature de synthèse capable de rassembler une éventuelle majorité de gauche. L’écologiste Yannick Jadot semble bien décidé à tenter sa chance coûte que coûte, mais ne paraît guère se préoccuper de rassembler au-delà de son camp.

Arnaud Montebourg, futur candidat en 2022 ? (photo © JF. Paga / La Montagne)

Quant à ce qui reste du parti socialiste, dont le premier secrétaire, Olivier Faure, s’époumone en vain à appeler à une « union des gauches », sa position paraît bien loin d’être fixée. On parle beaucoup d’Anne Hidalgo qui pourrait délaisser son fauteuil de Maire de Paris pour Élysée comme Jacques Chirac l’avait fait avant elle, mais aussi d’Arnaud Montebourg, l’ancien ministre de François Hollande, qui a pourtant tourné le dos à la politique pour se lancer dans l’apiculture avec sa marque Bleu Blanc Ruches, avant de créer La Compagnie des amandes, puis de lancer une marque de glaces fermières bio sous le nom La Mémère.

D’autres candidats sans doute émergeront d’ici 2022 mais quels que soient ceux qui s’affronteront lors de cette échéance phare de la vie politique française, on ne peut s’empêcher de s’interroger sur l’absence totale de débat politique de fond alors que cette élection aura lieu dans à peine plus d’un an. Le confinement imposé par la pandémie de Covid-19 aurait-il anesthésié toute volonté de mettre en œuvre un programme ambitieux qui réponde aux attentes des Français ?

L. V.

Pistes cyclables : la métropole AMP déraille…

5 janvier 2021

L’agglomération marseillaise n’est pas connue pour être particulièrement favorable à la pratique cycliste. Jusqu’à présent et depuis une bonne dizaine d’années, les différentes enquêtes successives confirment que seuls 1,2 % des déplacements totaux se font à bicyclette sur le territoire métropolitain alors que cette proportion dépasse désormais les 4 % à Paris et se situe depuis des années déjà autour de 7,5 % à Strasbourg. Pour l’ensemble des grosses agglomérations urbaines françaises, ce sont en moyenne autour de 6 % des actifs qui utilisent le vélo pour aller travailler.

Une piste cyclable tracée à la va-vite sur le Prado pendant le confinement en mai 2020, entre voie de circulation et couloir de bus (photo © Georges Robert / La Provence)

Si ce pourcentage est aussi faible à Marseille et continue de stagner malgré une prise de conscience globale que les modes doux de déplacement sont les plus adaptés en agglomération urbaine, c’est en partie parce que les infrastructures n’y sont guère favorables à la pratique du vélo. Dès 2010 pourtant, l’ancienne Communauté urbaine Marseille-Provence-Métropole recensait un certain nombre d’itinéraires structurants sur lesquels développer des pistes cyclables adaptées.

Mais depuis, pas grand-chose n’a été fait pour atteindre ces beaux objectifs. Des fragments de pistes cyclables ont bien été aménagés, mais souvent uniquement sur de très courtes distances entre deux ronds-points, comme cela a été le cas à Carnoux où la traversée complète de la ville n’est toujours pas possible de manière sécurisée pour les deux-roues. A Marseille, on a même vu fleurir des pistes cyclables signalées directement sur les trottoirs, au risque de multiplier les risques de collision avec les piétons. D’autres ont été simplement dessinées sur la chaussée en empiétant sur une des voies de circulation, à l’exemple de celles qui sont apparues cette année dans la zone industrielle et commerciale des Paluds à Aubagne : le pauvre cycliste qui souhaiterait s’y engager s’expose à se faire coincer entre une voiture et la bordure du trottoir avec chute spectaculaire garantie…

Piste cyclable dessinée à l’été 2020 sur la chaussée entre la gare d’Aubagne et la zone commerciale des Paluds
(photo © François Rasteau / La Provence)

Changement de ton pourtant à la Métropole lorsque Martine Vassal a inauguré en grandes pompes la piste cyclable de la Corniche, à l’occasion de la 14e Fête du vélo, en ce dimanche 16 juin 2019. Les grandes lignes d’un ambitieux Plan Vélo 2019-2024 sont esquissées et on apprend que les quelques 140 km de pistes cyclables répertoriées officiellement sur Marseille (contre 600 km à Strasbourg dont la superficie est pourtant trois fois plus faible) devraient augmenter de 107 km d’ici 2030 ! A grands renfort de panneaux publicitaire, l’objectif affiché est bien de sortir enfin de ce classement infamant qui place Marseille en dernière position des 40 plus grandes villes françaises pour la pratique du vélo selon l’évaluation de la Fédération des usagers de la bicyclette.

Affiche de la Métropole Aix-Marseille-Provence pour la Fête du Vélo 2019 (source ©
Métropole Aix-Marseille-Provence)

A cette occasion, la Métropole annonce qu’elle compte consacrer pas moins de 60 millions d’euros d’ici 5 ans à la réalisation de nouvelles pistes cyclables, dont la moitié pour le territoire marseillais, en plus des 40 millions d’euros déjà programmés par le Département. De quoi créer 16 lignes vélo sécurisées pour irriguer l’agglomération marseillaise et assurer les interconnexions avec les villes voisines. Au total, ce sont pas moins de 280 km de pistes cyclables supplémentaires qui devraient voir le jour d’ici 2030, dont une de 23 km allant d’un seul tenant de l’Estaque jusqu’aux Goudes.

Objectifs de développement des pistes cyclables sur Marseille prévu dans le Plan Vélo de la Métropole d’ici 2024 et 2030
(source © Métropole Aix-Marseille-Provence)

Les cyclistes marseillais restent sceptiques quant à la capacité de la Métropole à tenir ses promesses, d’autant qu’ils contestent l’appellation de « pistes cyclables » à ce qui n’est souvent qu’un simple marquage au sol non sécurisé sur la chaussée ou sur le trottoir, mais les chiffres sont néanmoins impressionnants. Reste à savoir comme un tel budget sera utilisé. Pour une simple bande cyclable matérialisée sur la chaussée, le coût se limite en effet à environ 10 000 € le km. En revanche, pour une voie cyclable séparée physiquement de la chaussée et matérialisée comme telle, on approche plutôt les 200 000 € du km, très loin cependant du coût de réalisation d’une route neuve, lequel varie plutôt entre 2 et 5 millions d’euros le km selon la largeur de la chaussée et la configuration du terrain. Au vu des chiffres annoncés de 60 millions pour 280 km de pistes cyclables, on retrouve d’ailleurs cet ordre de grandeur d’un peu plus de 200 k€ le km.

Roland Giberti présidant le Conseil de territoire Marseille-Provence lors de sa séance du 15 décembre 2020 (source © Marseille-Provence)

Quelle n’a donc pas été la surprise de certains conseillers lors du dernier conseil de territoire métropolitain qui s’est tenu le mardi 15 décembre 2020, en visioconférence, sous la présidence de Roland Giberti, maire de Gémenos et Président du Conseil de territoire Marseille-Provence, de prendre connaissance, au hasard d’une des 191 délibérations soumise aux votes en moins d’une heure et demi, qu’un tronçon de 5,5 km de piste cyclable allait être aménagée entre Arenc et Mourepiane pour un montant de 16 millions d’euros !

Ce n’est pourtant pas la topographie du site qui justifie un montant de travaux aussi colossal puisque le tracé longe le littoral à cet endroit. Comment donc expliquer qu’une piste cyclable à cet endroit coûte 3 millions d’euro le km et que ce simple premier tronçon de 5 km vienne amputer la moitié du budget total prévu dans le plan vélo métropolitain pour créer plus de 100 km de pistes cyclables sur la ville de Marseille ?

Étienne Tabbagh, conseiller municipal de Marseille et conseiller métropolitain (source © Mairie du premier secteur de Marseille)

Les élus n’ont bien évidemment pas eu de réponse en séance à cette question pourtant élémentaire, et ceci malgré la présence du Premier Vice-Président du Conseil de Territoire, un expert en matière de dépense publique, d’ailleurs en charge de la délégation des Finances, un certain Jean-Pierre Giorgi par ailleurs maire de Carnoux. La réalité est malheureusement toute simple bien que difficilement avouable : la Métropole utilise tout bonnement ce crédit affecté officiellement au Plan Vélo pour financer la réalisation d’un tronçon de voirie urbaine classique dans lequel la piste cyclable adjacente n’est qu’un élément accessoire. Un joli tour de passe-passe qui a d’ailleurs failli passé inaperçu sans la vigilance de l’écologiste Étienne Tabbagh, élu du Printemps Marseillais. Il faut dire que les pistes cyclables à Marseille sont tellement rares qu’un tel coût aurait presque paru cohérent tant il est vrai que tout ce qui est rare est forcément cher…

L. V.

Carnoux : la mairie a fini par tomber…

27 juillet 2020

Un gros tas de gravats : voilà tout ce qui reste de la mairie de Carnoux… Déjà en septembre 2017, alors que les terrassements pour l’extension de l’hôtel de ville battaient leur plein, l’édifice paraissait bien menacé avec ses fondations totalement déchaussées et ses murs à moitié cassés surplombant l’abîme, à la verticale d’un trou béant. Une situation qui avait d’ailleurs vaguement inquiété le maître d’œuvre et avait incité ce dernier à réclamer des investigations géotechniques complémentaires en vue de vérifier la bonne stabilité de l’édifice, construit un peu à la va-vite dans l’euphorie qui avait suivi l’érection de la ville pionnière de Carnoux-en-Provence au rang de nouvelle commune de plein droit.

Un tas de gravats, voilà tout ce qu’il reste de l’ancienne mairie de Carnoux-en-Provence (photo © CPC – 26 juillet 2020)

Un léger correctif qui venait à l’époque en complément de plusieurs autres et qui expliquait pourquoi le montant prévisionnel global du projet, chiffré initialement à 2,9 millions d’euros passait alors officiellement à 3,7 millions d’euros, alors même que le montant de l’opération était déjà à cette date en réalité de 5 millions d’euros comme le confirme sans la moindre ambiguïté le panneau légal d’information qui figure le long des palissades du chantier. C’est d’ailleurs bien sur cette base de 5 millions que le Conseil Départemental des Bouches-du-Rhône a accordé sa subvention de 2,2 millions d’euros.

Vue du panneau affichant les caractéristiques du projet, dont le coût est de 5 millions d’euros et précisant que le permis de démolir est accordé pour une surface de 31 m² (photo © CPC)

Il faut dire aussi que le maître d’ouvrage avait assez mal anticipé certains éléments du projet, oubliant notamment de tenir compte de la présence potentielle d’amiante dans les locaux de l’ancienne poste et des locaux associatifs situés à l’arrière de la mairie, ce qui avait considérablement retardé leur démolition, pourtant préalable à tout le reste de l’opération.

Depuis, les travaux ont bien avancé malgré quelques aléas de chantiers dont un incendie spectaculaire qui a bien failli faire partir tout l’édifice en fumée et obliger à tout recommencer à zéro, sans oublier la faillite de l’entreprise qui n’a pas survécu à un tel chantier et qu’il a fallu remplacer à la suite d’un nouvel appel d’offres. Des vicissitudes malheureusement fréquentes dans un projet public d’envergure qui est en gestation depuis des années et qui commence à être bien placé sur la liste des prétendants pour égaler le record du chantier le plus long de l’agglomération marseillaise, pour l’instant détenu haut la main par la L2…

La nouvelle mairie de Carnoux en cours de construction à côté de l’hôtellerie de la Crémaillère (photo © CPC – 26 juillet 2020)

Sauf que l’on commence à s’interroger sur le caractère évolutif de ce projet. En janvier 2017, la revue officielle de la municipalité, dans son n°46 du Messager, qualifiait ce projet d’ « extension de la mairie et construction du Point accueil tourisme », une appellation qui figure sur tous les dossiers de consultation des entreprises et sur les demandes de permis de démolir et de construire. Le calendrier des travaux prévoyait alors quatre phases successives : après la démolition de l’ancienne poste devaient s’engager la construction du point accueil et celle de l’extension de la mairie, suivies, « d’avril à décembre 2018 », par « la réhabilitation de la mairie existante ». Il est alors bien précisé que cette dernière consistera en un « réaménagement des locaux actuels ». D’ailleurs, le permis de démolir accordé alors et toujours affiché le long du mail évoque une démolition sur une emprise de 31 m² qui correspond a priori à celle de l’ancienne poste et des anciens locaux du CCAS situés à l’arrière de la parcelle.

Il n’avait donc jamais été question jusque-là, dans les organes de communication officiels de la municipalité d’une démolition complète de l’ancienne mairie puisqu’il s’agissait de simplement de reconfigurer l’ancien bâtiment en le raccordant au nouveau. Mais manifestement le projet a encore évolué entre temps et il a finalement été décidé de raser complètement l’ancienne mairie pourtant solidement construite en béton armé il y a une petite cinquantaine d’années. C’est donc chose faite depuis cette semaine et il ne reste plus qu’un gros tas de gravats à la place de la mairie de Carnoux. Pour une simple reconfiguration de l’aménagement intérieur, telle que le prévoyait le projet, voilà qui est bien radical…

Chantier de démolition de l’ancienne mairie de Carnoux-en-Provence (photo © CPC – 26 juillet 2020)

Une bonne manière de faire table rase du passé et d’incarner le renouveau architectural sinon politique de cette municipalité au pouvoir depuis si longtemps, Jean-Pierre Giorgi y étant élu sans discontinuer depuis 37 ans. On construisait jadis pour plusieurs générations, surtout pour les bâtiments publics sensés affirmer la continuité de l’administration. A l’heure où Carnoux s’enorgueillit de célébrer chaque année la semaine du développement durable, voilà un bien mauvais signal donné à ce souci de pérennité et d’économie de moyens en réduisant ainsi en miettes et à grands coups de pelle mécanique un bâtiment public qui, une fois réhabilité et réaménagé, devait s’intégrer dans un nouveau projet architectural précisément conçu dans ce but. Le maire connaît sans doute les raisons d’un tel revirement. Peut-être daignera-t-il un jour en faire part à ses concitoyens ?

L. V.

A Carnoux, je te tiens, tu me tiens…

7 janvier 2020

C’est à une bien belle cérémonie des vœux qu’ont pu assister les habitants de Carnoux massés en nombre dans la salle communale de l’Artea en ce vendredi 3 janvier 2020. La Provence, jamais avare de papier pour rendre compte des faits et gestes des élus locaux, relate la soirée sur une page quasi entière du quotidien dans son édition du 4 janvier. Chacun saura ainsi que les heureux participants à ce grand moment ont pu bénéficier en début de soirée et avant les discours officiels d’un spectacle gratuit de musiques et de danses irlandaises : du grand art !

Tract de campagne distribué par la liste de Gilles Di Rosa

Car rien n’était trop beau naturellement pour cette soirée exceptionnelle payée par le budget communal qui, comme chacun sait est largement excédentaire à Carnoux, au point de réaliser des placements financiers avec les recettes budgétaires inutilisées, comme s’en indigne le conseiller municipal d’opposition Gilles Di Rosa dans son dernier tract de campagne.

Il s’agissait en effet rien de moins, à travers cette soirée festive, que de marquer la clôture prochaine de la mandature ouverte en 2014, la troisième pour laquelle M. Jean-Pierre Giorgi occupe le fauteuil de maire. Mais cette soirée marque surtout le point de départ officiel de la nouvelle campagne municipale puisque M. Giorgi avait annoncé dès la précédente cérémonie des vœux début 2019 sa volonté de se présenter pour un nouveau mandat, lui qui est élu sans discontinuer à la mairie de Carnoux depuis 1983. Une volonté qu’il a bien entendu réaffirmée haut et fort lors de cette soirée après avoir dressé lui-même un bilan naturellement très flatteur de la mandature qui s’achève.

Bien entendu, le maire sortant ne doute à aucun moment d’être réélu triomphalement en mars prochain et il va même jusqu’à plaisanter sur scène en laissant entendre que son ambition affichée est d’être réélu dès le premier tour de scrutin, le dimanche 15 mars, lui dont la liste avait obtenu en 2014 un peu plus de 47 % des suffrages exprimés à l’issue du premier tour. A l’époque, il est vrai que pas moins de cinq listes étaient en compétition dont trois avaient pu se maintenir au second tour.

Il n’y en aura probablement pas autant en 2020, mais néanmoins davantage que la seule liste de Jean-Pierre Giorgi et celle menée par Gilles Di Rosa, que cite également le journaliste de La Provence. Une autre liste intitulée Carnoux citoyenne, écologiste et solidaire est en effet en préparation et vient de procéder à la distribution d’un premier tract appelant les Carnussiens qui le souhaitent à participer à cette aventure citoyenne de la gestion municipale dans un esprit participatif auquel le maire sortant ne les a guère habitués jusque-là. Et il serait bien étonnant que le Rassemblement national, qui aux dernières élections européennes en 2019 était largement en tête à Carnoux avec 37,4 % des voix, ne présente pas aussi sa propre liste…

On ne manquera pas néanmoins de noter comme l’a fait La Provence, que Monsieur Giorgi était particulièrement bien entouré lors de cette cérémonie des vœux. Lui qui, il y a quelques années encore, se présentait comme apolitique, a bien viré sa cuti, n’hésitant plus à affirmer à qui veut l’entendre comme il l’avait fait en octobre 2016 à un journaliste du Monde « je ne suis pas du tout de gauche et pas du tout d’extrême droite ». Il soutenait à l’époque François Fillon avant de donner son parrainage en faveur de la candidature de Nicolas Dupont-Aignan à la Présidentielle de 2017, puis de faire campagne tout aussi ouvertement aux côtés du député LR Bernard Deflesselles quelques mois plus tard.

Le maire de Carnoux bien entouré lors de la cérémonie des vœux 2020 (photo © Corinne Matias / La Provence)

Et maintenant, tout ce beau monde se presse autour du maire sortant puisqu’étaient présents et bien en vue sur la photo de famille en ce début de campagne municipale, outre le sénateur RN Stéphane Ravier, l’inamovible député LR Bernard Deflesselles, mais aussi tous les élus locaux LR, de Gérard Gazay à Roland Giberti en passant par Danièle Millon ou Patrick Boré (qui s’était fait représenter). Voilà bien la marque de fabrique de nos élus locaux qui tous se tiennent par la barbichette, se soutenant mutuellement à chaque élection et se rendant de menus services en permanence, via le principe des cofinancements qui permet à une ville comme Carnoux de faire financer la quasi-totalité de ses investissements par d’autres collectivités, le Département en tête. Monsieur Giorgi n’a d’ailleurs pas manqué de le rappeler en évoquant notamment le coûteux programme d’enfouissement des lignes électriques qui s’achève et qui n’a été rendu possible que grâce à la générosité exceptionnelle du Conseil Départemental. On ne le remerciera jamais assez…

L. V.