Archive for janvier 2022

Des avions qui volent à vide : logique !..

30 janvier 2022

En juillet 2021, la Commission européenne, toujours en pointe, comme chacun sait, dans son combat vertueux en faveur de la préservation de l’environnement, dévoilait une série de propositions audacieuses en vue d’accélérer le mouvement en faveur d’une transition écologique rapide pour atteindre ses objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre. La barre fixée est haute puisqu’il s’agit de réduire ces émissions de 55 % d’ici 2030, par rapport à l’année de référence 1990, l’objectif affiché étant de parvenir à la neutralité carbone d’ici à 2050.

Contrairement à ce que les mauvais esprits pourraient imaginer, l’Union européenne se situe de fait dans une trajectoire plutôt vertueuse puisque ces émissions sont effectivement en voie de décroissance. Pour l’ensemble des 27 pays de l’UE pris dans leur globalité, l’Agence européenne de l’environnement évalue à 3,38 milliards de tonnes d’équivalent CO2 les émissions produites en 2020 alors que ce volume était estimé à 4,92 milliards de tonnes en 1990, soit une baisse de 31 % d’autant plus remarquable qu’elle s’est concentrée sur les 15 dernières années et est donc dans une phase d’accélération. Entre 1990 et 2007, cette baisse globale n’était que de 8,5 % ce qui représentait en moyenne moins de 0,5 % par an. Entre 2010 et 2020, la baisse a atteint 20 % soit un rythme de décroissance nettement plus prometteur qui atteint désormais 2 % par an…

Evolution des émissions de GES pour les 27 pays de l’UE depuis 1990 en millions de tonnes d’équivalent CO2 selon les chiffres déclarés dans le cadre de la Convention-cadre des Nations-Unies sur les changements climatiques (source © Agence européenne de l’environnement / Toute l’Europe)

Bien entendu, tous les pays ne sont pas logés à la même enseigne. L’Allemagne reste bien évidemment, du fait de son poids démographique et de ses choix énergétique, le principal émetteur européen de gaz à effets de serre avec près de 840 millions de tonnes en 2019, mais ses émissions ont baissé de 13 % depuis 2010, ce qui est plutôt encourageant. Par comparaison et du fait de son mix énergétique très nucléarisé, la France, deuxième contributeur européen, n’a émis en 2019 que 455 millions de tonnes d’équivalent CO2 et affiche d’ailleurs une trajectoire très comparable entre 2010 et 2019.

Rapporté au nombre d’habitants, le volume des émissions françaises est plutôt flatteur avec en moyenne 6,8 tonnes de CO2 par tête de pipe, même si certains pays comme la Suède font mieux avec 5,2 tonnes de CO2 par habitant. Par comparaison, les Allemands émettent le double, avec 10,1  tonnes de CO2 par habitant et les Luxembourgeois, les cancres de la classe, en sont à 20,3  tonnes de CO2 par habitant ! Le Grand Duché ne se distingue pas seulement par ses pratiques fiscales douteuses, son système bancaire opaque, mais aussi par son empreinte écologique d’un autre âge…

Émissions de GES en 2019, rapportées au nombre d’habitant pour chaque pays de l’UE en millions de tonnes d’équivalent CO2 (source © Agence européenne de l’environnement / Toute l’Europe)

Toujours est-il que, malgré cette trajectoire globale plutôt encourageante, force est de constater que l’Europe n’atteindra pas l’objectif qu’elle s’est fixé pour 2030 : si elle continue sur sa lancée, elle devrait afficher à cette date une réduction de 41 % par rapport à 1990, loin des 55 % gravés dans le marbre… C’est pourquoi la Commission européenne a décidé l’été dernier de nouvelle mesures pour accélérer le mouvement, via notamment la réforme du marché du carbone, la disparition progressive des voitures à essence d’ici 2035 ou encore la taxation du kérosène.

Répartition des émissions de GES par secteur d’activité et évolution entre 1990 et 2017 (source © Agence européenne de l’environnement / Parlement européen)

Il faut savoir en effet que trois-quarts de nos émissions de gaz à effet de serre sont liés à la combustion de carburants fossiles. Ainsi, plus d’un quart de ces émissions est lié au seul secteur des transports (qui atteint même 30 % du total en France). Pire encore, ce secteur est le seul qui non seulement n’a pas diminué ses émissions mais les a augmenté de 33 % depuis 1990 ! Ainsi, les émissions de CO2 issues du trafic aérien international ont doublé au cours des 20 dernières années… Même si, à l’échelle européenne, les émissions dues au transport aérien et maritime, ne représentent qu’à peine 8 % du total, force est de reconnaître que ce secteur n’a guère fait d’effort jusqu’à présent et que son développement exponentiel le place dans le collimateur. D’où les réflexions en cours pour inciter notamment les compagnies aériennes à limiter enfin leurs émissions de gaz à effet de serre.

L’aviation, une source croissante d’émission de gaz à effets de serre, et de multiples autres nuisances… (source © Eco CO2)

Mais l’on apprend dans le même temps que des compagnies aériennes en sont réduites à faire voler leurs avions à vide, et ceci pour se conformer aux règles de cette même Commission européenne, lesquelles prévoient qu’une compagnie doit assurer au moins 80 % de ses créneaux d’atterrissage et de décollage, faute de les perdre la saison suivante. Avec la pandémie de Covid qui a donné un coup de frein temporaire aux déplacements internationaux, les compagnies aériennes n’ont d’autre choix, si elles veulent conserver leurs créneaux lors de la reprise d’activité, que de faire voler leurs avions à vide, comme l’armée a déjà l’habitude de le faire pour ne pas perdre ses dotations budgétaires en carburant l’année suivante !

Ainsi, la compagnie allemande Lufthansa a annoncé prévoir pas moins de 18 000 vols parfaitement inutiles, uniquement pour s’assurer le maintien de ses créneaux à l’avenir et éviter qu’ils ne soient redistribués à ses concurrents, dont les rois du low-cost, Wizzair ou Ryanair, qui lui taillent déjà des croupières. Certes, la Commission européenne a décidé d’abaisser à 50 % ce seuil déclenchant une perte des créneaux non exploités lors de l’exercice précédent, mais cela n’est pas encore suffisant et le ministre belge des transports a demandé d’abaisser encore ce seuil pour éviter 3000 vols inutiles à la compagnie Brussels Airlines.

Un dessin signé Berth paru dans Siné mensuel

En période de transition écologique, cela fait quand même un peu désordre de constater que le secteur le plus en retard dans ses efforts d’adaptation, et qui reste très subventionné, en est réduit à brûler ainsi du kérosène sans la moindre utilité, simplement parce que nos responsables politiques européens n’ont pas été capables de corriger à temps une mesure réglementaire susceptible de présenter des effets pervers redoutables. On vit décidément une époque formidable, mais on a encore une petite marge de progression…

L. V.

La gauche chilienne en exemple ?

27 janvier 2022

Le Chili, c’est cette étroite bande qui borde la côte ouest de l’Amérique du Sud sur plus de 4000 km, depuis le désert d’Atacama, au nord, à la frontière du Pérou, jusqu’au Cap Horn à l’extrémité sud du continent. Devenu indépendant dès 1810 en profitant des guerres napoléoniennes sur le sol espagnol, le Chili a connu bien des coups d’État jusqu’à celui du général Pinochet, qui, le 11 septembre 1973 et avec la bienveillance des États-Unis, renverse le gouvernement d’unité populaire de Salvador Allende et coûte la vie à ce dernier, retrouvé mort dans les décombres du palais présidentiel bombardé.

Le 11 septembre 1973, dans les rues de Santiago, lors du coup d’État de la junte militaire (source © Edimedia / WHA / Rue des Archives / Le Figaro)

Revenu à la démocratie en 1990 après plus de 15 ans de dictature militaire sanglante du général Pinochet, finalement arrêté à Londres en 1998 et décédé en 2006 après un retour triomphal dans son pays, le Chili n’en a pas fini avec son histoire mouvementée. Marqué par les deux mandats de la socialiste Michelle Bachelet, dont le père, général de l’armée de l’air, était mort en détention dans les geôles du régime Pinochet, le pays s’est lancé en octobre 2020 dans l’écriture d’une nouvelle constitution et a élu en avril 2021 une Assemblée constituante, selon un modèle qui rappelle furieusement les débuts de la Révolution française de 1789 !

Le 19 décembre 2021, c’est un jeune député, très actif dans le processus de réforme constitutionnelle qui vient d’être élu à la Présidence de la République où il devrait être investi dans ses fonctions le 11 mars 2022. Âgé de 35 ans et issu d’une famille d’origine croate, Gabriel Boric était l’une des figures du mouvement étudiant qui avait déclenché d’immenses manifestations très populaires en septembre 2011 contre le gouvernement ultralibéral de Sebastián Piňera. Élu député en 2014 pour le parti Convergence sociale, il s’engage durant son mandat contre les conflits d’intérêts et pour la défense des droits de l’Homme, et rejoint en 2017 la coalition du Frente Amplio qui regroupe des partis politiques et des mouvements citoyens allant de l’extrême gauche à la gauche libérale.

Gabriel Boric, nouveau président du Chili à 35 ans, ici à Santiago le 20 décembre 2021 (photo © Javier Torres / AFP / France Inter)

Son programme : renforcer les services publics, instaurer un système de retraite par répartition, renforcer les droits des femmes dont le droit à l’avortement, mettre un place un régime de fiscalité progressive, augmenter le salaire minimum, réduire la durée du temps de travail, mettre en œuvre des programmes de lutte contre le réchauffement climatique et développer la décentralisation. Des thèmes que la gauche française pourrait difficilement renier…

Vainqueur en juillet 2021 de la primaire de la coalition Approbation dignité face au candidat du Parti communiste, Daniel Jadue, tenant d’une ligne plus extrémiste, Gabriel Boric a donc été élu au second tour de la présidentielle avec 55,8 % des voix, face au candidat d’extrême droite, fils d’un ex-soldat de la Wehrmacht, José Antonio Kast, et ceci grâce à une forte mobilisation des classes populaires et des jeunes, alors même qu’il n’était pas forcément en bonne posture à l’issue du premier tour…

Gabriel Boric et José Antonio Kast, les deux finalistes de la présidentielle chilienne (source © Apk9to5)

La droite conserve certes la majorité au Sénat et à la Chambre des Députés, ce qui risque de compliquer fortement la tâche du futur jeune président chilien, lequel devra aussi affronter l’hostilité des médias majoritairement conservateurs, et celle des milieux économiques, effrayés et méfiants, comme à chaque victoire de la gauche.

Pour autant, Gabriel Boric se prépare et il a présenté, le 21 janvier 2022, son futur gouvernement composé de 24 ministres, dont 14 femmes, un signe incontestable d’ouverture et de modernité. La palette de cette coalition est assez large puisqu’elle va du Parti communiste au centre gauche. Le nouveau ministre des finances sera Mario Marcel, proche du Parti socialiste, plusieurs fois ministre dans des gouvernements de centre gauche depuis 1990 et président de la Banque centrale depuis 2016, de quoi rassurer les milieux d’affaires…

Gabriel Boric présentant son futur gouvernement devant le musée d’Histoire nationale, le 21 janvier 2022 (photo © Javier Torres / AFP / Novethic)

Quant au ministère de l’environnement, il échoit à la scientifique Maisa Rojas, une climatologue renommée, co-rédactrice du dernier rapport du GIEC, le groupe d’experts intergouvernementaux sur l’évolution du climat. Un signal fort et qui montre à quel point certains responsables politiques sont conscients de l’ampleur de ces enjeux environnementaux. La future ministre a d’ores et déjà annoncé qu’elle souhaitait « travailler pour un gouvernement qui fait face à la crise climatique : la crise de l’eau, la mise en œuvre de la loi sur le changement climatique, le service de la biodiversité et des aires protégées feront partie des priorités ». Une déclaration que n’aurait pas reniée un certain Nicolas Hulot, dont le bilan auprès d’Emmanuel Macron n’aura pourtant pas été des plus mémorables…

Maisa Rojas, climatologue du GIEC et future ministre de l’environnement du Chili (source © Conférence Transformations 2019)

La nouvelle ministre de l’Intérieur du Chili est aussi une femme, Izkia Siches, une jeune chirurgienne de 35 ans, qui fut à la tête de l’Ordre des médecins et s’est beaucoup impliquée dans la gestion de la pandémie de Covid. Ce sont des femmes également qui seront à la tête du ministère des affaires étrangères et de celui de la Défense. Le premier revient à Antonia Urrejola, une avocate de 53 ans, ex présidente de la Commission interaméricaine des droits de l’Homme, tandis que le second échoit à Maya Fernandez, qui n’est autre que la petite fille de l’ancien président socialiste Salvador Allende, tombé sous les balles des putschistes du général Pinochet en 1973 : tout un symbole !

L’avenir dira si ce gouvernement pluriel, jeune et très féminin tiendra le choc fasse aux défis qui attendent le nouveau président chilien, lequel a donné comme consigne à ses futurs ministres : « Nous devons dialoguer et surtout écouter. Écoutez deux fois plus que vous ne parlez ». Un conseil qui en vaut bien un autre et qui paraît plutôt gage d’une certaine ouverture d’esprit

L. V.

L’évaluation évolue…

25 janvier 2022

C’est l’histoire de deux hommes, tous les deux prénommés François et qui habitent dans le même village. L’un est chauffeur de taxi et l’autre est le curé de la paroisse.

Le hasard voulut qu’ils meurent tous les deux le même jour. Ils se retrouvent donc ensemble à la porte du paradis et se présentent devant le Seigneur. Celui-ci dit accueille François, le chauffeur de taxi, et lui dit : « Entre, mon fils, tu as mérité ta place au Paradis. Voici ta tunique brodée d’or et ton bâton de platine ».

Arrive ensuite François le prêtre. Le Seigneur consulte ses registres et lui dit : « viens, mon fils, tu peux entrer. Voici ta tunique de lin et ton bâton de chêne ». Le prêtre est un peu surpris et se dit qu’il doit y avoir une confusion. Alors il se lance : « Écoutez, Seigneur, je ne voudrais pas dire du mal de mon prochain, mais quand même… François, je le connais bien, vous savez, on est du même village. C’était un homme violent. Il n’était pas croyant et il était toujours bourré. Il conduisait comme un dingue et il avait sans arrêt des accidents. Et pourtant, vous lui donnez la tunique brodée d’or et le bâton de platine…

(source © France Bleu)

Et moi, moi qui ait célébré la messe tous les dimanches, moi qui me suis efforcé de propager la foi chrétienne et qui suis toujours resté dans le droit chemin, moi, vous me donnez la tunique de lin et le bâton de chêne… Ce n’est pas possible, il doit y avoir une erreur… »

Alors, Dieu consulte de nouveau ses registres et lui dit : « Non, mon fils, il n’y a pas d’erreur. C’est simplement que nous avons changé notre mode d’évaluation. Chaque fois que tu servais la messe, le dimanche, tout le monde s’endormait. Chaque fois qu’il conduisait comme un fou, tout le monde priait avec ferveur… Cela s’appelle la méthode d’évaluation par indicateurs quantitatifs de performance ».

Les indicateurs de performance : l’alpha et l’oméga des nouveaux canons de l’évaluation… (source © Business Economics Performance)

Bien sûr, l’histoire est éculée mais la méthode d’évaluation, elle, est en vogue dans certains milieux professionnels, pour évaluer la performance individuelle des salariés. Partant du principe que « tout ce qui peut être mesuré peut être amélioré », comme l’avait déjà formulé le consultant américain d’origine autrichienne, Peter Drucker, devenu professeur de management, ces fameux indicateurs quantifiés sont un outil idéal pour pressurer les travailleurs sur la base d’indicateurs qui présentent toutes les apparences de la plus totale objectivité puisqu’ils sont aisément quantifiables et vérifiables. Le stakhanovisme fonctionnait déjà sur les mêmes bases dans l’URSS stalinienne de 1935, en mettant en avant la productivité des travailleurs modèles, quitte à enjoliver un peu l’affaire par un zeste de propagande…

Alekseï Stakhanov, le mineur russe à hautes performances, glorifié par le régime stalinien dans les années 1930 (source © Histoire)

Toujours est-il que si vous avez vaguement le sentiment de vous faire profondément entuber par votre chef, à l’occasion de votre prochain entretien annuel d’évaluation, vous pourrez repenser à l’histoire des deux François : à défaut de convaincre votre supérieur de la nécessité de vous augmenter, cela vous permettra au moins de vous détendre durant l’entretien. C’est toujours ça de gagné…

L. V.

Primaires à gauche : pourquoi tant de haine ?

23 janvier 2022

C’est entendu, le pouvoir rend fou et l’aspiration à exercer le pouvoir y contribue largement… Avant chaque élection, c’est la même chose dans tous les partis : chacun s’étripe pour avoir une place et espérer être élu. Comme si exercer la lourde tâche de représenter ses concitoyens et prendre en leur nom les décisions souvent difficiles qui s’imposent pouvaient compenser le rythme épuisant et l’absence totale d’intimité familiale qui caractérisent la vie quotidienne de nos élus. A croire que la griserie du pouvoir et de l’exposition médiatique est une drogue à laquelle il est bien difficile de renoncer une fois qu’on y a goûté…

Dans moins de trois mois auront lieu les prochaines présidentielles et chacun a pu constater, à l’occasion des primaires des écologistes puis celles de la droite, comment des hommes et des femmes engagés en politique dans le même camp et partageant grosso modo les mêmes idées ont pu s’affronter violemment, uniquement pour avoir le privilège de présenter leur candidature devant les électeurs. Assurément, le régime présidentiel qui caractérise notre Cinquième République explique largement cette course à l’échalote liée à la personnalisation de la fonction de chef de l’État.

Les candidats de gauche disent pourtant tous la même chose… Un dessin signé Ganaga (source © Blagues et dessins)

Dans ce contexte, certains bords politiques s’en tirent plutôt bien, soit parce qu’ils ont un candidat naturel incontesté, comme Emmanuel Macron ou Marine Le Pen, soit parce qu’ils ont réussi, malgré les obstacles et les frustrations immenses qui en découlent, à faire émerger un candidat à l’issue de primaires, comme c’est le cas de Valérie Pécresse pour le parti LR.

En revanche, la gauche se retrouve dans un véritable champ de ruines à quelques mois de l’échéance électorale avec toujours 7 candidats en lice malgré le retrait d’Arnaud Montebourg, dont la « remontada » annoncée avec panache le 4 septembre 2021 s’est finalement plutôt terminée en « degringolada » pour reprendre l’expression vacharde de nombreux médias et qui a donc jeté l’éponge le 19 janvier 2022 dans une video testament tournée sur le site gaulois de Bibracte au mont Beuvray…

Arnaud Montebourg sur le mont Beuvray annonçant qu’il renonce à sa candidature aux présidentielles (photo © capture d’écran Twitter / France TV info)

Si l’on excepte les candidatures d’extrême gauche de Philippe Poutou et de Nathalie Arthaud, qui n’ont aucune prétention à accéder aux responsabilités et seraient bien en peine de mettre en œuvre un programme de gouvernement cohérent, ce sont donc cinq personnalités de gauche qui se présentent pour l’instant à la candidature suprême, dont deux seulement ont déjà exercé des responsabilités ministérielles et qui toutes sont issues ou appartiennent encore aux partis historiques de la gauche française, associés au gouvernement lorsque la gauche était en responsabilité, sous François Mitterrand, dans le gouvernement de Lionel Jospin ou durant le quinquennat de François Hollande.

Jean-Luc Mélenchon en 1997, alors membre du parti socialiste, ici avec François Hollande et Lionel Jospin, dont il sera ministre délégué à l’enseignement supérieur (photo © Philippe Wojazer / Reuters / Le P’tit Libé)

Pourquoi alors cette incapacité totale à dialoguer et à envisager un programme commun de gouvernance alors que les différences idéologiques entre ces différentes composantes de la gauche sont pour le moins subtiles ? On pourrait certes pointer l’insistance de Fabien Roussel, candidat du Parti communiste, à vouloir développer coûte que coûte la filière nucléaire, ce qui a le don d’agacer un écologiste comme Yannick Jadot, lequel aurait pourtant bien du mal, même avec la meilleure volonté du monde, à tourner totalement la page du nucléaire s’il devait par miracle être élu à la tête du pays.

Pour peu que ces différentes personnalités politiques veuillent bien sortir de leurs positions les plus caricaturales, il ne leur serait sans doute pas très difficile de se rejoindre sur un socle commun et de gouverner ensemble sur la base de propositions pragmatiques. Avec à peine 25 % d’intentions de vote selon tous les sondages qui se succèdent à un rythme effréné depuis le début de cette campagne, la gauche est objectivement minoritaire dans le paysage politique actuel et il est donc parfaitement évident pour tout le monde qu’elle n’a pas la moindre chance d’arriver en tête de ces élections présidentielles, surtout si elle est incapable de surmonter ses querelles de préséances qui relèvent du pur enfantillage.

Christiane Taubira, une nouvelle candidature qui ne règle pas le problème de la gauche… Un dessin d’Emmanuel Chaunu publié dans Ouest France

La seule stratégie possible, dans un tel régime politique et avec les règles électorales qui sont les nôtres, est que les différents mouvements de gauche s’unissent et s’entendent sur un programme commun de gouvernement. C’est ce qui lui a permis d’arriver en responsabilité en 1981 (sans même remonter à 1936 !), en 1997 et en 2012. Comment dans ces conditions ne pas être désespéré par la situation actuelle où chacun des candidats refuse de faire le moindre compromis et de discuter avec ses alliés politiques naturels en vue d’élaborer une plateforme commune de gouvernement.

Arnaud Montebourg avait tenté de se placer dans cette dynamique mais a dû y renoncer. Christian Taubira tente désormais de s’y inscrire à son tour en s’appuyant sur la démarche de la Primaire populaire qui a tout tenté pour faire émerger cette candidature commune que la majorité des électeurs de gauche appellent de leurs vœux. Certains, autour du député européen Pierre Larrouturou et de la petite-fille de Stéphane Hessel, ont été jusqu’à entamer une grève de la faim pour alerter sur cette situation kafkaïenne.

Pierre Larrouturou entouré de militants écologistes en grève de la faim pour appeler à un sursaut de responsabilité en faveur d’une candidature unie à gauche (photo © Daniel Fouray / Ouest France)

Mais les réponses de certains des candidats et de leur entourage, notamment du côté de la France Insoumise, sont sans appel et rejettent catégoriquement ces appels au rassemblement, avec des mots d’une violence inouïe qui feraient presque passer ces alliés de la gauche écologiste ou social-démocrate pour des suppôts du capitaliste et en tout cas des ennemis à combattre, plus dangereux à leurs yeux que le clan LR ou même RN. La France de 2022 est en train de revivre le cauchemar de la république allemande de Weimar, lorsque communistes et sociaux-démocrates se déchiraient à qui mieux mieux, laissant finalement le champ libre au parti nazi en pleine ascension… Même le maire de Marseille, Benoît Payan, s’en est ému dans une interview à Libération, lui qui est bien placé pour savoir que seule une alliance de tous les mouvement de la gauche et de la société civile a permis de mettre fin au règne sans partage d’une droite marseillaise solidement implantée. « Nous sommes condamnés à être la gauche la plus bête du monde pendant encore combien de temps ? » a ainsi cinglé Benoît Payan, ajoutant : « Certains candidats de cette présidentielle ont été dans le même parti, d’autres ont soutenu les mêmes gouvernements. Ils dirigent ensemble des coalitions dans les villes et on essaie de nous faire croire que pour diriger le pays, ce n’est pas possible ? ».

Benoît Payan s’inquiète de la stratégie suicidaire de la gauche à 3 mois des présidentielles… (photo © Patrick Gherdoussi / La Croix)

Assurément, certains ont bien du mal à dépasser cette course égocentrique au pouvoir suprême qui les aveugle, oubliant que l’on ne gouverne pas seul mais en équipe et nécessairement en faisant des compromis pour pouvoir dégager des mouvements majoritaires. Aspirer à gouverner quant on est minoritaire ne peut fonctionner que sous un régime dictatorial, peut-être n’est-il pas inutile de le rappeler…

L. V.

En Israël, les poissons rouges apprennent à conduire

19 janvier 2022

C’est une publication scientifique de la revue Behavioral Brain Research qui nous l’apprend : une équipe de chercheurs de l’Université Ben Gourion, en Israël, donne des leçons de conduite à des poissons rouges pour leur apprendre à piloter une plate-forme robotisée montée sur roues et supportant leur aquarium.

Un poisson rouge aux commandes de son engin… (photo © Ronen Zvulun / Reuters / Yahoo !)

Vidéo à l’appui, on découvre ainsi que certains poissons rouges sont capables, moyennant un apprentissage d’au moins une dizaine d’heures de conduite, soit plutôt moins tout compte fait que pour un jeune humain qui prépare son permis de conduire, à piloter leur plateforme vers une cible bien visible. S’ils atteignent leur but, ils sont bien entendu récompensés par une bonne ration de nourriture, de quoi renforcer leur motivation et solliciter leur intelligence.

Car contrairement à certains de nos préjugés habituels et, il faut bien le dire, à ce que peut observer quiconque regardant un poisson rouge faire des ronds dans son bocal tout en nous fixant de ses yeux de merlan frit, le poisson rouge est plus intelligent qu’il n’y paraît. Au point de finir par comprendre que l’aquarium dans lequel il barbote se déplace dans la pièce, dans la même direction que lui. Le support sur lequel est posé l’aquarium est en effet monté sur roues, équipées d’un système automatisé de conduite guidé par ordinateur selon les déplacements du poisson rouge, déplacement sui sont eux-mêmes détectés par Lidar. Lorsque le poisson se déplace, c’est donc tout l’aquarium qui se déplace dans la même direction. Ce qui permet de constater que le poisson est finalement capable de se diriger dans une pièce vers une cible peinte sur un mur, tout en restant dans son aquarium.

Enfin pas tous car, comme chez les humains, certains sont plus piètres conducteurs que d’autres et ont bien du mal à coordonner leurs mouvements pour arriver à piloter correctement la plate-forme mobile jusqu’à lui faire atteindre la cible visée. A moins qu’ils ne soient tout simplement pas suffisamment attirés par la nourriture qui leur est servie en cas de succès, allez savoir…

On pourrait certes s’interroger sur ce qui peut bien conduire des neuroscientifiques de haut niveau à s’amuser ainsi à ce type de bêtise qui ressemble de prime abord à un canular de potache désireux de renouveler le concept des courses d’escargots en les remplaçant par des rallyes de poissons rouges motorisés. D’autant que les biologistes de l’Université Ben Gourion ne sont pas les premiers à explorer ainsi la capacité des poissons rouges à se déplacer en dehors de leur environnement aquatique habituel. En 2014 déjà, une équipe de designers néerlandais avait conçu le go-kart, un petit véhicule sur roues surmonté d’un aquarium servant de cabine de pilotage à Dory, un poisson rouge dont les mouvements servait à faire avancer l’engin, lui permettant ainsi d’explorer tranquillement son environnement sans quitter son bocal.

Dory le poisson rouge néerlandais dans son go-kart en pleine exploration entre le bureau et le radiateur (source © The Verge)

Il en ressort donc qu’un poisson rouge n’est pas plus bête qu’un quidam lambda pour apprendre à conduire et à se déplacer, y compris sur la terre ferme, n’hésitant pas, pour les plus habiles d’entre eux, à contourner les obstacles pour atteindre leur cible. Reste à savoir à quoi une telle expérience peut-elle bien servir. A l’heure où les constructeurs de véhicules automobiles cherchent à rendre ces derniers totalement autonomes, capables de se déplacer seuls dans la circulation sans la moindre action humaine, on se doute bien que l’objectif n’est pas de remplacer les chauffeurs par des poissons rouges, encore que…

L. V.

Maisons terriers : pour vivre heureux, vivons caché !

17 janvier 2022

Serait-ce une nouvelle mode architecturale en train de se développer ? Après les gratte-ciels les plus audacieux, voilà que certains redécouvrent les vertus d’un habitat moins tape-à-l’œil, au ras des pâquerettes, voire carrément enfoui dans le sol.

La Villa Vals, semi-enterrée au pied des pistes de ski (source © Bubblemania)

C’est le cas par exemple de cette villa construite en 2009 en pied des pistes de ski de la station suisse de Vals. Conçue par les architectes Bjarne Maestenbroek et Christian Müller, elle présente une façade circulaire inclinée vers le soleil qu’on pourrait prendre, de loin, pour une vaste antenne parabolique posée sur le talus. Un habitat incontestablement intégré à son environnement naturel puisque quasiment rien ne dépasse en dehors de cette façade en pierres apparentes et ses grandes baies vitrées qui lui donnent une vue imprenable sur la vallée en contrebas.

Un aménagement intérieur qui profite à plein de l’exposition ensoleillée de la façade (photo © Search / Moderne House)

L’aménagement intérieur y est luxueux mais sans ostentation pour cette « maison-terrier » perdue au milieu des terriers de marmottes et des troupeaux de vaches, et qui est d’ailleurs ouverte à la location saisonnière pour la modique somme de 3450 € la semaine en haute saison… Un caprice de riches sans aucun doute, mais dont la conception très spécifique a le mérite de limiter fortement l’impact environnemental.

La Villa Vals dans son environnement naturel (photo © Iwan Stoecklin / Archdaily)

Enfouie largement dans le sol elle bénéficie en effet d’un chauffage naturel puisque la terre est un excellent isolant thermique et phonique, maintenant toute l’année une température sensiblement constante, tandis que la façade exposée plein sud capte au maximum les rayons du soleil. De surcroît, on n’accède à la terrasse que par une série de pas japonais insérés dans la pente herbeuse, l’accès principal se faisant par un escalier enterré qui la relie à une ancienne grange traditionnelle restaurée, située en bord de route, ce qui donne vraiment l’impression aux occupants d’être isolés en pleine nature !

Mais cet exemple d’habitat semi-enterré est loin d’être isolé et les constructions de ce type pullulent un peu partout dans le monde. Il faut dire que l’idée n’est pas nouvelle. Le site archéologique de Skara Brae, sur l’île principale des Orcades, un archipel situé au nord de l’Écosse, a permis de mettre à jour les restes de 8 maisons datées du Néolithique, soit environ 3000 ans av. J.-C., édifiées en pierres et recouvertes de sable, ce qui leur a permis de traverser les âges sans encombres.

Les habitations semi-enterrées du Néolithique à Skara Brae (source @ Écosse partage)

Le succès planétaire de Bilbo le Hobbit, le livre de Tolkien publié en 1937 et adapté au cinéma par Peter Jackson en 2012, a lancé une véritable vogue pour ces habitats rustiques de la Terre du Milieu, aux ouvertures arrondies et recouvertes de terre. Le village de Hobbiton, édifié en Nouvelle-Zélande initialement pour les besoins du tournage des films de Peter Jackson puis reconstruit à des fins touristiques, présente ainsi pas moins de 44 maisons de Hobbit enfouis sous un épais gazon et égayées de petits jardins fleuris.

A Hobbiton, en Nouvelle-Zélande, les maisons de Bilbo le Hobbit… (source © Avygeo)

Sans attendre que déferle la mode des Hobbits, de nombreuses maisons troglodytes ont été aménagées en France, particulièrement dans les vallée entaillant des plans de falaises comme en Dordogne ou dans le Val de Loire par exemple. Dans les années 1970, l’architecte Étienne Fromanger a conçu à Plaisir, dans les Yvelines, une maison avec voûtes en béton recouvertes de 1,50 m de terre. Une maison originale, consacrée en 2011 « maison la plus originale de France » et qui présente surtout l’immense avantage d’être bioclimatique grâce à l’inertie thermique de la terre qui lui confère une température constante, chaude en hiver (13 °C garantis) et fraîche en été.

Maison semi-enterrée conçue en 1975 par Étienne Fromanger dans les Yvelines (source © Jardiland)

Au delà de l’originalité des bâtisses ainsi conçue, ce concept de maisons avec voûtes en béton armé recouvertes d’une bâche imperméable pour éviter l’humidité et couverture en terre végétalisée, présente donc de multiples atouts pour garantir une bonne isolation thermique à faible coût, pourvue que les façades vitrées soient bien exposées pour emmagasiner au mieux le rayonnement solaire. Ces techniques étant parfaitement maîtrisées, ce type de construction est en train de se multiplier un peu partout.

L’architecte suisse Peter Vetsch par exemple s’est fait connaître avec ses « maisons organiques » en forme de bulles pour Barbapapa mais recouvertes de terre et édifiées à flanc de colline pour pouvoir récupérer l’eau de pluie et arroser les jardins potagers en contrebas. Des maisons présentant assurément un faible impact écologique, une excellente inertie thermique avec des factures de chauffage très réduites, résistant bien dans le temps avec peu d’entretien car faiblement exposées aux intempéries, et permettant un confort de vie satisfaisant moyennant une bonne ventilation pour éviter le risque d’humidité.

Maisons semi-enterrées conçues par Peter Vetsch et édifiées à Dietikon, en Suisse (source © Erdhaus)

La multiplication de ce type de projets laisse penser qu’ils répondent à un véritable souci de développer des habitats plus respectueux de l’environnement et plus durables à terme, même s’il ne s’agit que de renouveler des modèles éprouvés depuis bien longtemps dans certains pays scandinaves notamment. Cette nouvelle mode en dit long aussi sur une évolution du rapport à l’habitation, considérée davantage comme un cocon discret et masqué que comme un édifice racoleur et visible de tous. Une manière peut-être de mettre en pratique la maxime des Schtroumpfs sui clôturait déjà la délicieuse fable du poète du XVIIIe siècle, Jean-Pierre Clarisse de Florian, sur les états d’âmes d’un pauvre grillon jaloux du succès d’un magnifique papillon virevoltant, avant de se raviser en le voyant se faire attraper par une troupe de gamins enragés :

Oh! oh! dit le grillon, je ne suis plus fâché ;

Il en coûte trop cher pour briller dans le monde.

Combien je vais aimer ma retraite profonde !

Pour vivre heureux, vivons caché.

L. V.

Elyze : la lettre aux électeurs perdus

15 janvier 2022

La politique n’intéresse plus les jeunes, tout le monde le sait et l’affirme haut et fort. A moins de 3 mois de la prochaine élection présidentielle, chacun est persuadé que les moins de trente ans ne se déplaceront pas dans les bureaux de vote, sachant que moins de 20 % d’entre eux avaient voté à tous les tours lors des élections de 2017, présidentielles et législatives comprises.

L’abstention des jeunes, reflet d’une défiance ou d’une indifférence ? Un dessin signé Olivero (source © Huffington Post)

Et pourtant, certains se démènent pour inciter les plus jeunes électeurs à se prononcer lors des consultations électorales qui, quoi qu’on en pense et quoi qu’on vote, restent, pour les citoyens vivant en régime démocratique, un des moyens les plus déterminants de peser sur les grands choix de société susceptibles d’influer tant sur notre vie quotidienne que sur notre avenir commun, C’est le cas de ces jeunes entrepreneurs âgés de 19 à 24 ans, qui viennent de lancer, le 2 janvier 2022, une application pour smartphone qui fait fureur. Elyze, téléchargée plus de 600 000 fois en quelques jours, a justement pour objet d’aider les jeunes électeurs à s’y retrouver parmi les propositions des multiples candidats aux prochaines présidentielles, et surtout à retrouver le chemin des urnes le 10 avril prochain.

Parmi ces jeunes accros de la démocratie qui se démènent pour réconcilier les jeunes et la vie politique, Grégoire Cazcarra, 21 ans, étudiant en école de commerce, et François Mari, 19 ans, inscrit à HEC Paris, se sont retrouvés au sein du mouvement associatif Les Engagés, un mouvement citoyen créé en 2017 à Bordeaux, en réaction à ce second tour des législatives qui a vu plus de la moitié des électeurs français bouder carrément les bureaux de vote.

L’équipe conceptrice de l’application pour smartphone Elyze (photo © Grégoire Cazcarra – Elyze.app / France 3 régions)

Décidés à tout faire pour amener les jeunes générations à s’impliquer davantage dans le processus électoral démocratique, ils se sont associés notamment avec le youtubeur Gaspard Guermonprez et avec Wallerand Moullé-Berteaux, 24 ans, fondateur du média numérique Le Crayon, pour créer, avec l’appui de nombreux bénévoles, cette appli Elyze, dépourvue de publicité et disponible gratuitement sur Appel Store et Play Store, qui fait un tabac depuis son ouverture au public.

Réalisée sur le modèle de Tinder, l’appli destinée à favoriser les rencontres amoureuses et qui fait défiler des partenaires potentiels, Elyze met en avant des propositions issues des programmes politiques des différents candidats à l’élection présidentiels. Sur l’écran défilent ainsi des propositions comme « réduire à 32 heures le temps de travail hebdomadaire », « permettre la destitution des élus à tout moment », « rétablir de bonnes relations politiques avec la Russie », « réduire le nombre de fonctionnaires », ou encore « instaurer le droit de vote à 16 ans » ou bien « instaurer la gratuité des transports en commun ».

Elyze, l’appli politique qui cartonne… (photo © Magali Cohen / Hans Lucas / Libération)

Pour chacune d’elles, l’utilisateur décide s’il est d’accord ou non avec la proposition, sans savoir bien entendu de qui elle émane. Lorsqu’elle lui semble floue, la rubrique « en savoir plus » permet de préciser les contours de la proposition et de mieux la contextualiser. Au bout de 50, une première tendance se dessine mais on peut poursuivre le jeu jusqu’à 500 propositions. Et peu à peu se dessine le profil des candidats de qui on se trouve objectivement le plus proche, l’application les présentant sur un podium avec les 3 candidats qui se dégagent, classés par affinité avec nos choix programmatiques.

Le résultat est bluffant, ce qui explique sans doute le succès inouï d’Elyze, d’autant qu’on peut ensuite compléter son approche soit en balayant les propositions des uns et des autres, classées par grandes thématiques (environnement, éducation, économie, culture, international, institutions et territoires, etc.), soit en consultant le profil plus détaillé de chacun des candidats déclarés ou de celui avec qui on a le plus «matché », tout comme le fait Tinder pour décrire les particularités du partenaire qui a retenu notre attention.

Quelques écrans de l’application Elyze (source © RTL)

L’outil est ludique à souhait mais en même temps pédagogique car reposant sur un travail d’analyse très fouillé des déclarations des différents candidats, mené de manière aussi « neutre, apolitique et apartisane » que le revendiquent ses créateurs, ce qui en fait tout l’intérêt, et promet quelques surprises au citoyen paresseux qui se repose sur ses préjugés et découvre à cette occasion des propositions pour le moins surprenantes de la part de certains des candidats à la magistrature suprême…

Conçu pour réconcilier les jeunes avec la politique et les amener à s’intéresser aux enjeux de la prochaine présidentielle, Elyze a incontestablement réussi son pari et bien au-delà de sa cible initiale car chaque citoyen accro à son smartphone ne pourra que se prendre au jeu et se laisser porter par les propositions qui défilent, jusqu’à découvrir, parfois avec surprise, avec quel candidat il a le plus d’affinités en termes de proposition. Une manière finalement assez rationnelle d’orienter son vote.

Un dessin signé Cambon à l’occasion du second tour des présidentielles 2017 (source © C3V maison citoyenne)

Mais chacun sait bien qu’une élection ne se joue pas que sur la qualité d’un programme et la cohérence des propositions du candidat, la couleur de son parti ou celle de sa cravate n’étant pas non plus totalement étranger au choix final de l’électeur. Comme en matière de rencontres amoureuses, le cœur a ses raisons que la raison ne connaît pas toujours…

L. V.

A Mycène, le détartrage des dents laissait à désirer…

12 janvier 2022

Votre dentiste vous l’a certainement déjà rappelé plus d’une fois : même réalisé consciencieusement deux fois par jour, un bon brossage des dents ne suffit pas à éliminer totalement la plaque dentaire, surtout dans les endroits difficiles d’accès. Les bactéries finissent toujours par s’y accumuler et, en se minéralisant, sous l’effet de la précipitation des ions carbonate et phosphate de la salive, à y former un dépôt solide, le tartre dentaire, qu’une simple brosse à dents ne suffit pas à éliminer et qui vient peu à peu fragiliser les dents, surtout à la limite avec la gencive. C’est pourquoi, un détartrage au moins une fois par an chez le dentiste est fortement recommandé par tous les praticiens. Un mauvais moment à passer, mais qui permet d’éliminer ce dépôt peu esthétique et qui vient fragiliser les dents à long terme.

Le tartre dentaire, un dépôt qui se minéralise à la base des dents… (source © Le courrier du dentiste)

Forcément, nos ancêtres, les Gaulois comme tous les autres, ne pouvaient bénéficier de soins dentaires tels qu’ils sont pratiqués de nos jours et la qualité de leur dentition s’en ressentait inévitablement. Pour autant, l’émail des dents est un matériau particulièrement solide qui résiste au temps, si bien que les paléontologues en ont fait depuis longtemps un objet d’étude privilégié, dont l’observation permet de reconstituer les cas de malnutrition mais aussi les conséquences de maladies infantiles dont les traces restent gravées dans l’émail de nos dents.

Depuis quelques années cependant, ils s’intéressent aussi au tartre dentaire, dont l’analyse optique, couplée à des datations au Cabone 14, donne de précieux renseignements sur les habitudes culinaires de ceux qui nous ont précédé. Le tartre dentaire, une fois minéralisé, conserve en effet l’ADN humain mais aussi celui des protéines et les bactéries d’origine salivaire, permettant de reconstituer ce que nos ancêtres avaient l’habitude d’ingérer. Des grains d’amidon et des pollens se retrouvent ainsi fossilisés au sein du tartre dentaire : leur identification permet donc de savoir quelles étaient les habitudes alimentaires du propriétaire des dents…

Fragment de mâchoire humaine du Moyen-Âge présentant des résidus de tartre (photo © Christina Warinner / Sciences et Avenir)

Ainsi, en 2016, des échantillons de tartre prélevés sur des dents humaines découvertes dans la grotte de Qesem, en Israël, datées du Paléolithique, entre 420 000 et 200 000 ans av. J.C., avaient permis d’identifier des micro fragments de charbon de bois et des grains de pollen de pin : de quoi conclure que ces populations vivaient dans une atmosphère perpétuellement enfumée au fond de leur grotte. La même année, d’autres archéologues avaient analysé le tartre dentaire prélevé sur de nombreux restes humains datés de 1450 à 700 ans av. J.C. sur un site mexicain : ils y avaient découvert des grains d’amidon, mais aussi des diatomées (révélant une alimentation en eau potable dans un étang proche), des spores fongiques du charbon de blé (confirmant que ces populations consommaient déjà du blé) et du pollen de pin (fréquent dans la région).

Site de la grotte de Qesem, en Israël, où nos ancêtres du Paléolithique souffraient déjà d’un air domestique pollué (photo © Jack Guez / AFP / Cnews)

Aux États-Unis, des dents appartenant à 8 individus ayant vécu entre 880 et 1020 av. J.C. sur le site de Danbury, dans l’Ohio, avaient permis d’identifier la présence, dans le tartre dentaire, de microfibres de coton, suggèrent que ces populations utilisaient leurs dents comme outils de tissage pour la confection de textiles ou de cordes en coton.

Dernièrement, une étude publiée dans Scientific reports le 17 décembre 2021, et dont Sciences et Avenir notamment s’est fait l’écho, rapporte comment une équipe internationale d’archéologues, sous la direction de l’Allemand Philipp Stockhammer, s’est intéressée au tartre dentaire prélevé sur 67 individus retrouvés sur différents sites mycéniens, afin de reconstituer les habitudes alimentaires de cette civilisation qui s’est développée dans le sud de la Grèce et en Crête à l’âge du bronze, entre 1600 et 1100 avant notre ère.

Mycène : les murs cyclopéens autour de la porte des lionnes (source © Voyage away)

Connues dès l’antiquité, les ruines de la cité de Mycène et de son vaste palais ceinturé de murs cyclopéens ont notamment été fouillées à la fin du XIXe siècle par Heinrich Schliemann qui y a en particulier découvert, dans un des cercles de tombes situées près de la porte des lionnes, le fameux masque mortuaire en or, dit d’Agamemnon, du nom du roi de Mycène qui s’était illustré lors de la guerre de Troie, selon Homère. Cette civilisation antique, remarquable pour ses palais monumentaux, l’était aussi pour la qualité de sa production en masse d’objets en bronze et en céramique. Une telle production, il y a plus de 3000 ans, a d’ailleurs toujours étonné les archéologues, car elle suppose le recours à d’énormes quantités de combustible pour alimenter les fours de cuisson et les forges pour la fusion du métal.

Masque funéraire en or retrouvé dans une tombe à Mycène et daté de 1500 av. J.C. (source © Chercheurs de vérités)

En examinant le tartre dentaire d’individus issus de cette période, les archéologues y ont retrouvé des protéines et des micro résidus caractéristiques du régime alimentaire de l’époque, mais aussi de la suie issue des dispositifs de combustion alors utilisés. Sans surprise, cette suie provient pour l’essentiel de la combustion des espèces les plus fréquentes dans cette zone méditerranéenne : pin noir, pin pignon et sapin de Céphalonie. Ils ont retrouvé aussi, mais en moindre quantité, des suies révélant l’utilisation de quelques feuillus dont le chêne et l’olivier, ainsi que le fumier séché, un combustible encore traditionnellement utilisé en Afrique ou en Inde notamment, lorsque le bois vient à manquer.

Mais grande a été leur surprise de constater, sur les restes d’individus provenant du palais mycénien de Tirynthe et du port crétois de La Canée, des suies révélatrices de la combustion de lignite, ce charbon jadis extrait à Gardanne et dont on sait, par les écrits de Théophraste, qu’il était en effet utilisé dans la Grèce antique pour l’industrie métallurgique, mais beaucoup plus tardivement, vers 300 av. J.C. Certes, les Chinois utilisaient déjà le lignite vers 1600 avant notre ère, mais cette étude montre donc que les Mycéniens et les Crétois l’employaient déjà eux-mêmes au 13e voire au 14e siècle av. J.C., manifestement pour alimenter les fours de cuisson et de fusion destinés à la fabrication du métal et des poteries, dans un environnement où le bois commençait sans doute déjà à se faire rare autour des grands palais mycéniens.

Coupe à boire réalisée par des artisans mycéniens à l’âge du bronze, témoignant d’un savoir faire remarquable pour l’époque (source © Royal Ontario Museum)

Le lignite utilisé à Tirynthe était alors extrait à 150 km de là, près d’Olympie, ce qui suppose l’organisation de méthodes d’extraction et d’acheminement sophistiquées. Les objets artisanaux produits par les artisans mycéniens en grande quantité, sous forme de récipients, de vases, d’épées, étaient principalement destinés à l’exportation puisqu’on les retrouve dans une vaste zone allant de l’Espagne jusqu’à la Syrie : les prémices d’une mondialisation en marche, à une époque où l’on ne souciait guère de son impact sur le changement climatique…

L. V.

Du géocorail pour stabiliser le littoral ?

10 janvier 2022

Avec le réchauffement climatique global, le niveau moyen des océans s’élève progressivement, sous le simple effet de la dilatation thermique de l’eau. Mais tout laisse à penser que le phénomène risque fort de s’aggraver dans un proche avenir, sous l’effet de phénomènes complexes et plus difficiles à modéliser, la fonte des glaces polaires pouvant contribuer de manière significative à cette élévation progressive du niveau des mers. Mécaniquement, plus ce niveau s’élève, plus les zones côtières sont menacées, surtout dans les zones de côte sableuse, déjà soumises à une érosion naturelle du fait de l’action de la houle.

L’érosion côtière grignote lentement mais sûrement les infrastructures littorales (photo © Matthew J. Thomas / Actu-Environnement)

Ces phénomènes d’érosion côtière et de recul du trait de côte ne sont pas simples à modéliser car ils dépendent fortement des conditions locales et l’érosion se fait souvent par à-coups, à l’occasion de fortes tempêtes, si bien que la notion même de vitesse moyenne d’érosion du trait de côte n’a pas forcément grande signification et peut être très variable d’un point à un autre. Les analyses disponibles montrent néanmoins que 20 % du littoral national, y compris dans les territoires d’outre-mer (hors Guyane), est désormais en phase de recul et qu’environ 30 km² de terre a déjà été engloutie par la mer au cours des seules 50 dernières années.

L’immeuble Signal, à Soulac-sur-mer, menacé par l’érosion côtière, ici en 2014 lors de son évacuation (photo © Laurent Theillet / MaxPPP / Le Monde)

Chacun a vu notamment les images du Signal, cet immeuble d’habitation de 4 étages construit à la fin des années 1960 sur la côte landaise, dans la commune de Soulac-sur-Mer, en Gironde, à environ 200 m du littoral. Grignotée par les avancées de l’océan, l’immeuble est désormais directement menacé par les vagues et a dû être évacué par ses occupants en 2014. Il va désormais être démoli par la Communauté de communes dans le cadre d’un projet plus global de renaturation du littoral. Mais ce bâtiment n’est qu’un exemple parmi beaucoup d’autres des constructions faites un peu imprudemment dans des secteurs menacés par l’érosion côtière. Ainsi, le CEREMA a publié en 2019 une étude estimant entre 5 000 et 50 000 (selon les hypothèse retenues) le nombre de logements qui seront directement menacées par ce recul du trait de côte d’ici 2100.

Des maisons directement menacées par l’érosion du littoral, ici sur la côte atlantique (photo © David Ademas / Ouest France)

La côte méditerranéenne est directement touchée par ce risque, tant sur les côtes sableuses, notamment dans le Languedoc et en Camargue, que sur les zones de falaises côtière. Ces dernières sont en effet soumises elles-aussi à des phénomènes chroniques d’érosion, sous l’effet principalement de la circulation d’eau dans les fissures des massifs rocheux, provoquant petit à petit la désagréqation de ces fronts rocheux qui s’éboulent périodiquement. La houle déblayant au fur et à mesure les matériaux issus de ces éboulements et accumulés en pied de falaise, le littoral recule inexorablement, finissant par menacer les maisons construites près du rivage.

Face à cette menace désormais bien caractérisée, une stratégie nationale de gestion du recul du trait de côte a été élaborée et la loi climat adoptée en août 2021 prévoit une liste de communes qui devront intégrer dans leur plan local d’urbanisme les zones potentiellement soumises à cette érosion littorale. Marseille sera directement concerné par cette menace, s’étant largement urbanisée en bordure même de la mer, dans des secteurs soumis à des éboulements récurrents.

A Marseille, de nombreuses constructions sont directement menacées par l’érosion littorale : ici le CIRFA (centre d’information et de recrutement des forces armées près des Catalans (source © Tourisme Marseille)

Si la logique consiste à limiter les constructions dans ces zones et à supprimer progressivement les bâtiments les plus menacés, des stratégies de protection sont aussi mises en œuvre, via des ouvrages de défense édifiés soit en haut de plage (sous forme de digues ou de murs), soit en pied de plage (sous forme de brise-lames et d’épis en enrochements), soit en immersion.

Pour limiter l’impact et le coût de tels ouvrages qui nécessitent de gros moyens de terrassement, une société implantée à Marseille depuis 2012 sous le nom de Géocorail, a mis au point un procédé innovant assez astucieux et d’ailleurs breveté. En injectant du courant électrique, à partir d’une cathode reliée à un générateur, et d’une anode en titane, on provoque une électrolyse de l’eau de mer qui permet de précipiter le calcium et le magnésium, lesquels se déposent sur le substratum sous la forme d’un liant naturel solide à base d’aragonite et de brucite, selon un mode de dépôt assez semblable à celui qui permet la construction naturelle de récifs coralliens.

Philippe Andréani, dirigeant de la société Géocorail, avec un fragment de grille recouverte de son liant déposé in situ (photo © Stéphanie Têtu / Le Moniteur)

Ce dépôt qui vient se former sur une armature de grillage métallique agglomère également tous les sédiments marins et débris en suspension dans l’eau, débris de coquillage, grains de sables et même déchets plastiques, formant un encroutement calcaire qui s’épaissit de 5 à 10 cm par an jusqu’à constituer une coque protectrice qui permet de renforcer naturellement les pieds de digues ou d’enrochement, de colmater les brèches en pied de quai ou de consolider les pieds de plage menacés d’érosion. Dès que l’ouvrage a atteint le niveau de protection recherche, il suffit de couper l’alimentation et le matériau ainsi généré devient inerte comme un dépôt calcaire naturel.

Formation de Géocorail en place pour renforcer un ouvrage de protection (source © Géocorail / La Gazette des Communes)

Dès 2016, une première application de ce procédé ingénieux a été testée à Châtelaillon-Plage, près de La Rochelle, pour renforcer une digue de protection. D’autres ont suivi depuis, notamment à Mèze, dans l’Hérault, où la société a imaginé, avec le syndicat mixte du bassin de Thau, de réaliser des cages en gabions remplies de coquilles d’huîtres pour recycler les quelques 8 500 tonnes générées chaque année par l’activité conchylicole locale. Immergés dans l’eau pendant un an, ces blocs se solidifient et peuvent ensuite remplacer des enrochements à moindre coût et faible impact environnemental. A Cannes, le béton naturel de Géocorail a aussi permis de renforcer des chaussettes brise houle immergées devant la Croisette.

Matériau biomimétique, le Géocorail offre de multiples applications, y compris pour remplacer des gabions ou des enrochements, voire pour agglomérer des sédiments pollués (source © Géocorail / Le Moniteur)

En 2021, le fonds d’investissement Truffle Capital, qui soutient cette entreprise depuis sa création, a levé 2,7 millions d’euros pour les injecter dans cette société en pleine croissance qui envisage aussi d’utiliser son procédé pour encapsuler directement au fond de l’eau des sédiments sous-marins pollués, pour éviter qu’ils ne soient remis en suspension par les hélice des bateaux ou lors de leur extraction. Un bel avenir en perspective pour cette entreprise qui mise sur une meilleure prise en compte par les collectivités de ces phénomènes d’érosion marine pour développer son carnet de commande…

L. V.

Depuis 10 ans, Carnoux se dépeuple…

8 janvier 2022

Le 20 décembre 2021, l’INSEE a publié les résultats de son dernier recensement qui correspond à l’année 2019, une nouvelle campagne de recensement étant prévue très prochainement. Ces données confirment que Carnoux continue à perdre des habitants : 6 999 en 2008, 6 754 en 2013, 6 498 en 2019. En 10 ans, Carnoux aura donc perdu 500 habitants, soit un peu plus de 7 % de sa population. Elle n’est pas la seule : Cassis a perdu, dans la même période plus de 11 % de sa population. Par contre Roquefort-la-Bédoule, Ceyreste, Aubagne ou La Ciotat se sont peuplées d’une manière significative : presque 20 % d’habitants en plus pour Roquefort-la-Bédoule !

Evolution de la population communale entre 2008 et 2019 sur Carnoux et alentours (source © Carnoux citoyenne)

Alors, évidemment, on peut s’interroger. Les raisons de fluctuations de populations sont nombreuses : construction de logements, création d’emplois, services, transports, cadre de vie, etc. Mais sur une longue période, l’insertion dans la dynamique métropolitaine, la situation géographique ou la cohérence des politiques publiques locales, jouent tout autant.

La maire de Cassis estime dans La Provence du 5 janvier que le prix du foncier, « qui a fait un bond phénoménal », et les locations de courte durée de type Airbnb, « qui privent les Cassidains de logements à l’année », expliquent en grande partie la diminution de la population. La contrainte foncière ayant d’ailleurs amené le gouvernement à l’autoriser à « baisser de 50 % de taux de logements à construire pour les trois ans à venir ». Augmentation du prix du foncier et ralentissement de la construction de logements sociaux, on voit bien quelle est la population qui est amenée à quitter Cassis : la plus pauvre, celle qui ne peut plus s’y loger…

Extrait d’un article publié par La Provence le 5 janvier 2022 (source © Carnoux citoyenne)

L’augmentation du coût du foncier, de l’immobilier et les locations Airbnb touchent également Carnoux. Les 500 habitants perdus ne pourront malheureusement pas être rattrapés par les seuls logements sociaux, récemment inaugurés et au nombre de 60, du programme Saint-Augustin…

Logements sociaux construits à Carnoux à la place de l’ancien établissement scolaire privé Saint-Augustin (source © Agence Jérôme Siame architectes)

Alors, la question qui se pose est plutôt de savoir si les « variables fondamentales » que sont l’emploi, le prix du foncier ou le pourcentage de logements sociaux, donnent une explication suffisante, ou s’il faut aller chercher au-delà. Le prix de l’immobilier est certes plus élevé à Cassis (5 380 €/m2), mais il l’est également à La Ciotat (4 300 €) ou Gémenos (4 280 €), loin devant Carnoux (3 430 €), qui est plus proche de Roquefort-la-Bédoule (3 100 €) ou de Ceyreste (3 100 €). Il n’y a donc, ici, aucune relation évidente entre le prix du foncier et l’évolution de la population.

Le pourcentage de logements sociaux est le plus faible à Gémenos (2 %) et Ceyreste (5 %), contrairement à Roquefort (11 %), Cassis (13 %) ou Carnoux (16 %), La Ciotat (17 %) ou Aubagne (24 %). Ainsi, même si les populations concernées sont différentes, l’évolution du parc de logements sociaux n’est pas vraiment sensible sur une décennie.

Enfin l’emploi n’est pas une explication décisive. Gémenos ne connaît que 9,9 % de chômage, Carnoux, Ceyreste et Cassis 11,5 %, tandis qu’Aubagne et La Ciotat sont respectivement à 14,3 et 13,7 %.

Une population vieillissante à cassis comme à Carnoux… (photo © Julio Pelaez / Le Bien Public)

Le vieillissement de la population est une facteur explicatif : Cassis et Carnoux sont, parmi les 4 villes citées, celles dont le nombre des personnes de plus de 65 ans est le plus élevé : 39,7 % pour Cassis, 31,4 % pour Carnoux à comparer à 28,1 % pour Roquefort-la-Bédoule et 29,5 % à Ceyreste. Or la densité d’occupation des logements diminue avec l’âge, notamment avec le départ des enfants.

La difficulté d’avoir un emploi pourrait être l’une des raisons de la baisse démographique, mais pas du tout. Les politiques locales, notamment de création de zones d’activités nouvelles comme à Cassis, ont été bénéfiques. Carnoux, et surtout Cassis, offrent un nombre d’emplois locaux supérieur aux autres communes. C’est donc un paradoxe : tout se passe comme si plus le nombre d’emplois locaux est fort, moins la commune est attractive ! Evidemment on ne retrouvera pas ce phénomène à Gémenos où, s’agissant d’une zone industrielle à l’origine favorisée par la défiscalisation, le nombre d’emplois offerts n’a rien à voir avec la démographie de la commune. Mais c’est le cas de Cassis et de Carnoux.

Proportion d’emploi locaux sur Carnoux et ses voisines (source © Carnoux citoyenne)

La raison en est que plus les communes se retrouvent à l’écart des flux économiques, plus elles accueillent des commerces ou des entreprises vivant du territoire sur lequel elles se trouvent. Il y a un effet « bulle ». Ces emplois sont avant tout en prise directe avec les besoins locaux et ceux qui ne travaillent pas dans ces communes ont moins de raisons de venir y habiter. Carnoux et Cassis pâtissent sur le plan démographique du fait de ne se situer vraiment ni sur l’axe Marseille-Aubagne-La Ciotat, ni sur l’axe La Ciotat-Aubagne-Aix. Le retard en matière d’offre de transports collectifs fait le reste. Ceyreste, ville dortoir de La Ciotat échappe à ce phénomène.

Ainsi, ce dernier recensement nous montre aussi les répercussions des problèmes de la mise en place poussive de la métropole. La fluidité insuffisante des échanges et l’absence de complémentarité des zones économiques, figent en quelque sorte les populations. Seules les zones à la croisée des flux voient leur population régulièrement augmenter. Les communes restées plus à l’écart, comme Cassis et Carnoux voient par contre leur population baisser recensement après recensement. Et la faiblesse structurelle des transports collectifs n’aide pas…

Pythéas

Sources :

Conseil municipal des jeunes : quand les voisins montrent la voie…

5 janvier 2022

Carnoux n’a jamais spécialement brillé pour son inventivité citoyenne mais, en ce qui concerne la responsabilisation, la participation des jeunes et leur formation à la vie démocratique, elle est bonne dernière de la classe. Il y a seulement quelques jours, fin décembre, la mise en place de conseils des jeunes par la ville de Roquefort-la-Bédoule ainsi que par la Métropole elle-même, vient de pointer notre grand retard dans le domaine.

La plupart des villes alentour se sont dotés, ces dernières années d’un Conseil municipal des jeunes. La municipalité de Carnoux, reste, pour sa part, fermée aux différentes initiatives que sont les commissions extramunicipales, les conseils de quartiers, les conseils de jeunes, les ateliers thématiques ouverts ou les budgets participatifs ciblés. Car les conseils municipaux de jeunes (CMJ) sont aussi, souvent, dotés de budgets leurs permettant de faire réaliser leurs projets par les services municipaux.

Le Conseil municipal des jeunes, une instance incontournable de la vie démocratique locale… (source © Ville de Valbonne Sophia-Antipolis)

Les CMJ sont des écoles pratiques de la démocratie. Ils permettent de donner la parole aux jeunes, de les faire participer à la vie de la commune, de penser et réaliser des projets, de représenter les autres, bref, de devenir citoyen. En général, les CMJ participent aux forums des associations, au Téléthon, à des visites du conseil régional, du Sénat, de l’Assemblée Nationale, voire du Parlement Européen.

Le Conseil municipal des jeunes n’est pas un gadget

C’est un organisme qui peut interpeller le maire et le conseil municipal. Les conseils municipaux des jeunes sont clairement encouragés par l’article 55 de la Loi du 27 janvier 2017 relative à l’égalité et à la citoyenneté.

Les jeunes ne peuvent pas être réduits à des utilisateurs de services communaux. Aider les jeunes, notamment scolarisés est une chose. C’est un devoir municipal de base. Les responsabiliser et leur ouvrir la citoyenneté, en est une autre, qui nécessite beaucoup plus d’inventivité de la part d’une municipalité.

Affiche pour susciter des candidatures au Conseil municipal des jeunes créé en 2010 à Saint-Marcellin, ville de 7000 habitants dans l’Isère (source © Ville de Saint-Marcellin)

66 % des communes de la taille de Carnoux ont un conseil municipal des jeunes

A la décharge de Carnoux, comme l’indique l’étude de l’INJEP d’avril 2021, c’est toute la région PACA qui est en retard, même si notre ville est certainement largement en retard elle-même par rapport aux autres communes de la région.  26 % des communes françaises ont un conseil municipal des jeunes en fonction, 66 % dans la strate de population de Carnoux ! Pour 50 % de ces communes, il s’agit de « permettre aux jeunes de faire un apprentissage de la vie citoyenne ».

78 % des communes entre 5000 et 20000 habitants ont doté leur conseil de jeunes d’un budget. 94 % de leurs habitants jugent positifs le CMJ, tout comme 92 % des élus et 91 % des jeunes. Son rôle semble d’ailleurs apprécié puisque 29 % des décisions ont même été changées grâce au conseil municipal des jeunes…

Alors pourquoi pas un conseil municipal des jeunes à Carnoux ? « Aux jeunes, ne traçons pas un seul chemin, ouvrons leur toutes les routes », disait Léo Lagrange…

JBx

A Cassis, le Conseil municipal des jeunes à la une du bulletin municipal de février 2015 (source © Ville de Cassis)

A Cassis : Créé en 2015, le conseil municipal des jeunes est composé de 18 jeunes élus, élèves de CM2 des écoles cassidennes, élus pour deux ans par les jeunes Cassidens du CP au CM2, qu’ils soient scolarisés ou non à Cassis. Il travaille dans deux commissions : « culture et sports » et « environnement et citoyenneté ». Les élections désignant les élus se déroulent comme celles auxquelles participent leurs parents : authentique bureau de vote, vérification d’identité, enveloppes et bulletins, passage à l’isoloir, urne, listes électorales, émargement et tampon sur la carte d’électeur…

A Roquefort-La Bedoule: C’est lors du dernier conseil municipal, en décembre 2021, qu’a été décidé la création prochaine d’un conseil municipal des jeunes, qui devrait voir le jour à la rentrée de septembre 2022, afin d’initier de jeunes Bedoulens à l’exercice de la démocratie locale et à la conception des projets locaux, tout en représentant la jeunesse lors de cérémonies officielles. Une structure qui sera dotée d’un budget de 2000 € et qui devrait permettre de favoriser l’implication des plus jeunes dans la vie de leur commune.

Le Conseil municipal des jeunes d’Aubagne nouvellement élu en janvier 2020 (source © Ville d’Aubagne)

A Aubagne : Le conseil municipal des jeunes a été créé en 2015. Peuvent être candidats les jeunes aubagnais en classe de 5e et de 4e dans l’un des 4 collèges de la ville. Ils sont élus pour 2 ans et ont la possibilité de présenter des projets en conseil municipal. En 2018, les élus du CMJ aubagnais ont bénéficié d’un financement Erasmus qui leur a permis de se rendre à Marseille, Paris et Bruxelles pour découvrir le fonctionnement des institutions, dont le Parlement européen.

A La Bouilladisse : C’est samedi 20 novembre 2021, dans la salle des fêtes de la Mairie, que s’est réuni le nouveau conseil municipal des jeunes. Composé de 27 jeunes conseillers municipaux, il a élu à sa tête Lilou Fremaux, âgée de 13 ans et collégienne en quatrième à Roquevaire.

A Gémenos : Depuis novembre 2015, une quinzaine de jeunes Gémenossiennes et Gémenossiens de CM1, CM2 et 6e, élus au conseil municipal de la jeunesse, peuvent proposer des actions au conseil municipal. Ils ont suggéré des modifications ou créations dans la commune, notamment en ce qui concerne les pistes cyclables. Ils ont aussi agi pour la création d’un spectacle, souhaité des actions de solidarité, récolté des fonds pour une association « Au nom d’Andréa », et des fournitures scolaires pour une action humanitaire au Bénin.  Les jeunes élus souhaitent être associés aux commissions adultes des transports. Ils souhaitent également organiser des ateliers cuisine, ce qui entretient le lien intergénérationnel.

A La Ciotat, le Conseil municipal des jeunes a été mis en place dès 2007, ici en juin 2018 (source © La Provence)

A La Ciotat: Le conseil municipal des jeunes citoyens fonctionne depuis 2007. Il se réunit une fois par mois par commission de travail, et deux fois par an en réunion plénière pour expliquer et voter l’avancée des projets. Ses propositions font l’objet de négociations, montages financiers et programmations avec le Conseil municipal et une enveloppe budgétaire, attribuée en concertation avec les différents services municipaux, leur est allouée. Le CMJC, renouvelé en 2021, est composé de 30 collégiens pour un mandat de 2 ans. Les jeunes élus ont souhaité présenter des projets autour de 3 thématiques : « écologie et développement durable », « social » et « sport et loisirs ».

A la Métropole Aix-Marseille-Provence : Après le Département des Bouches-du-Rhône et la Région PACA, c’est au tour de la Métropole d’adopter, lors de sa séance du 16 décembre 2021 et dans une belle unanimité, le principe de créer en son sein un « Conseil des jeunes métropolitains » qui devrait rassembler 60 jeunes, âges de 18 à 25 ans, et qui seront donc associés, à partir d’avril 2022, à la définition des politiques publiques et à la mise en œuvre des projets d’aménagement sur le territoire métropolitain. « Il est important d’associer les jeunes à la vie institutionnelle » a déclaré à cette occasion la Présidente Martine Vassal, « d’autant que certains projets sont longs, prennent du temps, et que c’est aussi pour les jeunes que nous travaillons ».

Valérie Pécresse sur les pas de François Fillon ?

3 janvier 2022

Dans quatre mois seulement aura lieu le premier tour de l’élection présidentielle française, le 10 avril prochain et l’on ne sait toujours pas avec certitude qui seront les prétendants. Ce ne sont pourtant pas les candidatures déclarées qui manquent, même si la principale d’entre elle, celle du Président de la République sortant, reste à venir, alors même que ce dernier est habituellement considéré comme le favori de ces élections. Ce serait même sans doute la première fois depuis le début de la Cinquième République, qu’un président en exercice aurait autant de chances d’être réélu, malgré l’absence de cohabitation qui avait permis, en leur temps, à François Mitterrand puis à Jacques Chirac, de se refaire une popularité suffisante pour enquiller un second mandat…

Présidentielle 2022 : la course est lancée, malgré le contexte sanitaire… un dessin de Fey, publié dans Le Progrès en août 2020

Face au président sortant, force est de reconnaître que les candidats de gauche risquent fort de ne faire que de la figuration. Les 7 candidats pour l’instant déclarés, hors candidature éventuelle de Christiane Taubira et hors hypothèse d’une nouvelle primaire permettant de départager certains d’entre eux, totalisent à eux tous à peine 25 % des intentions de vote, ce qui est bien peu pour construire une majorité, d’autant que celui qui fait le meilleur score, Jean-Luc Mélenchon, crédité de 8 à 12 % selon les sondages, est aussi l’une des personnalités politiques françaises qui suscite le plus de rejet dans l’opinion publique.

En 2017, un duel entre Emmanuel Macron et Marine Le Pen, largement remporté par le premier à l’issue d’un débat déséquilibré entre les deux tours (photo © Reuters / Huffington Post)

Tout le monde imaginait, jusqu’il y a peu, un nouveau duel au second tour entre Emmanuel Macron et Marine Le Pen, comme en 2017, mais l’irruption dans l’arène du trublion Eric Zemmour a fortement rebattu les cartes. Alors que Marine Le Pen se positionnait clairement en outsider, créditée de plus de 20 % des intentions de vote jusqu’en septembre, elle se positionne désormais autour de 16 à 17 %, tandis qu’Eric Zemmour pointerait autour de 14 % même s’il est en baisse désormais, n’ayant pas réussi à rallier l’électorat populaire resté plus sensible au discours du Rassemblement national.

Évolution des intentions de vote au 1er tour des présidentielles de 2022 entre septembre et début décembre 2021 selon un sondage ELABE pour BMFTV, l’Express et SFR (source © BFMTV)

Dans ce contexte et au vu des sondages actuels, à prendre bien entendu avec toutes les précautions d’usage, il est donc probable que le second tour de la présidentielle, le 24 avril 2022, opposera à Emmanuel Macron la candidate issue des primaires LR, à savoir la présidente de la Région Ile-de-France, Valérie Pécresse, un duel qui s’annonce d’ailleurs particulièrement serré et pas forcément en faveur du président sortant, lequel aura à assumer tous les inévitables mécontentements et frustrations accumulés au cours de son quinquennat.

Valérie Précresse, la candidate surprise, issue des primaires de la droite… un dessin signé Kak, publié dans l’Opinion le 6 décembre 2021

Il n’est donc pas sans intérêt de commencer à s’intéresser au programme de cette Valérie Roux, née en 1967 à Neuilly-sur-Seine, fille d’un ancien président de la société Bolloré Télécom. Pur produit de l’enseignement privé catholique, elle s’initia au russe à 15 ans dans un camp de jeunesse communiste à Yalta avant d’aller perfectionner son japonais en vendant des camescopes à Tokyo. Formée à HEC puis à l’ENA, elle devient maître des requêtes au Conseil d’État avant d’épouser en 1994 Jérôme Pécresse, actuel PDG de General Electric Renewable Energy où il vient de supprimer 800 emplois.

Ayant rejoint l’Elysée en 1998 comme chargée de mission auprès de Jacques Chirac, elle est élue députée des Yvelines dès 2002, puis nommée ministre de l’enseignement supérieur en 2007 dans le premier gouvernement de François Fillon. En 2011, elle devient ministre du budget et porte-parole du gouvernement, se vantant d’avoir réussi à supprimer 150 000 postes de fonctionnaires grâce à la mise en œuvre de la révision générale des politiques publiques (RGPP), permettant une économie de 9,5 milliards d’euros entre 2008 et 2011. Réélue députée en 2012, elle devient en décembre 2015 présidente de la Région Ile-de-France, mandat qu’elle a conservé lors des régionales de 2021.

Valérie Pécresse, probable finaliste de la prochaine élection présidentielle ? (photo © Delphine Goldsztejn / Le Parisien)

Fervente adapte du libéralisme économique, elle se définit elle-même « deux-tiers Merkel, un tiers Thatcher », tout un programme ! Dans la droite ligne de son ex mentor, l’ancien premier ministre François Fillon, elle promet, si elle est élue en 2022, de diminuer les dépenses publiques, de réduire encore les impôts sur les entreprises et les frais de succession, de supprimer les 35 heures, de faire passer l’âge de la retraite de 62 à 65 ans, de baisser les allocations chômage et de supprimer pas moins de 200 000 postes dans la fonction publique : exactement le programme que proposait Fillon en 2017…

Cette obsession de la droite à supprimer toujours davantage d’agents de la fonction publique ne laisse d’ailleurs pas d’interroger à l’heure où les Français réclament toujours plus de protection ainsi que des services publics plus proches et plus performants. La crise épidémique de Covid-19 a pourtant montré à quel point la population française attend de l’État un engagement total pour garantir sa sécurité sanitaire et économique via des investissements publics massifs, « quoi qu’il en coûte ».

Supprimer des fonctionnaires, mais lesquels ? … un dessin signé Deligne (source © La Montagne)

Toutes les enquêtes d’opinion indiquent que la population regrette, assez majoritairement, les politiques d’ajustement budgétaire qui se sont traduites, année après année, par une disparition des infrastructures hospitalières de proximité, une diminution drastique du nombre de lits en réanimation et une pénurie de personnel de santé, au point que les médecins sont désormais sollicités pour édicter des critères de tri des malades à sauver en cas de nouveau pic épidémique excédant nos capacités de prise en charge… Et pourtant, voilà que ces mêmes Français, à en croire les sondages, seraient séduits par ce discours ultralibéral un peu suranné qui vise avant tout à réduire le rôle de l’État en taillant dans les effectifs des services publics, au risque de détériorer encore davantage la qualité de nos écoles, de nos universités, de nos tribunaux, de nos transports publics, de nos commissariats de police ou de nos hôpitaux. Qui a dit que les Français étaient pétris de contradictions ?

L. V.

2021 est finie : place à 2022 !

1 janvier 2022

Qui l’eut cru ? Apparu en 2019 dans la lointaine province chinoise du Hunan, le coronavirus à l’origine de l’épidémie de Covid-19 est toujours présent et bien implanté alors que l’on vient de tourner la page de l’année 2021 pour entrer en 2022. Variant après variant, et malgré le développement de plusieurs vaccins dans des délais records, malgré des mesures de confinement que l’on n’aurait jamais cru possibles dans nos démocraties assoiffées de liberté individuelle, malgré un effort de vaccination sans précédent à l’échelle mondiale, le virus s’accroche et continue à nous pourrir la vie…

Heureusement, quand tout va mal, il reste l’humour et la dérision que les dessinateurs de presse savent manier avec un talent toujours renouvelé, de quoi nous faire échapper, le temps d’un regard, à un quotidien parfois morose et bien déprimant. Profitons donc de leur coup de crayon plein d’empathie et parfois d’ironie mordante pour sourire une dernière fois de ces quelques événements, petits ou grands, qui ont fait un peu de notre actualité durant cette année 2021 qui vient de se refermer.

Les contributeurs de ce blog collectif vous souhaitent, pour cette nouvelle année 2022 qui débute, une bonne santé sans (trop de) coronavirus, même si l’on commence à s’attacher à ces petites bêtes, et surtout une grosse dose de bonne humeur, de bienveillance et d’esprit critique, jamais inutile pour prendre un peu de hauteur face à une actualité parfois excessivement anxiogène. N’hésitez-pas à venir régulièrement jeter un coup d’oeil à nos articles, pour partager ensemble petits potins, réflexions de fond, coups de coeur et actualité locale… et bonne année 2022 à tous !

Janvier 2021 :

L’année commence bien : le 16 janvier, le gouvernement décrète le couvre feu généralisé à partir de 18h sur tout le territoire, par extension des mesures qui avaient déjà instauré le couvre feu à partir de 20h avant de le faire passer à 18h dans 25 départements jugés prioritaires. La levée de cette mesure de restriction des déplacements sera progressive mais il faudra attendre le 20 juin pour que le couvre feu encore fixé à 23h soit finalement supprimé.

Un dessin d’actualité signé Zaïtchick (source © Blagues et dessins)

Février 2021 :

Le 18 février 2021, le robot mobile Perseverance, développé par la NASA, se pose à la surface de la planète Mars, dans le cratère d’impact Jezero, lequel a abrité, il y a plusieurs millions d’années un lac permanent. L’objectif de la mission est de rechercher des traces de vie en procédant à des carottages de sol et à des analyses par spectrométrie de masse, durant son parcours qui est prévu pour durer 2 ans. Les échantillons prélevés sont déposés le long du trajet en vue de pouvoir être rapatriés un jour sur Terre, probablement pas avant 2031, mais aucun Martien n’a été rencontré à ce jour par le robot…

Un dessin signé Ysope

Mars 2021 :

Lundi 1er mars 2021, l’ancien Président de la République, Nicolas Sarkozy, est condamné à 3 ans de prison dont 1 an ferme, pour corruption et trafic d’influence, dans l’affaire des écoutes téléphoniques, datant de 2014. A l’époque il échangeait par téléphone et sous le nom d’emprunt de Paul Bismuth, avec son avocat sur ses propositions de corruption d’un magistrat de la Cour de cassation, espérant ainsi accéder à des informations confidentielles sur son dossier suite à l’affaire Bettencourt. Des conversations qui avaient été interceptées et enregistrées par les enquêteurs…

Un dessin d’actualité signé Deligne (source © Blog Bernard Lusset)

Avril 2021 :

C’est paradoxal : alors que le Premier ministre, Jean Castex, annonce fin avril la levée de certaines mesures de confinement pour le mois de mai, une groupe de 4 astronautes, dont le Français Thomas Pasquet, protégés de pied en cap par une combinaison intégrale, embarque à destination de la station spatiale internationale pour aller se confiner dans l’espace, à des milliers de kilomètres de leur domicile. Un paradoxe qui n’a pas échappé au facétieux Emmanuel Chaunu…

Un dessin d’actualité signé Chaunu (source © Ouest France)

Mai 2021 :

Dimanche 23 mai, un avion de ligne de la compagnie aérienne Ryanair, reliant les villes d’Athènes et de Vilnius, est détourné par un avion de chasse vers Minsk, capitale de la Biélorussie, sous prétexte d’une alerte à la bombe. A son bord, le journaliste biélorusse Roman Protassevitch, opposant du régime d’Alexandre Loukachenko est aussitôt arrêté et emprisonné. Malgré les protestations européennes, la Russie de Vladimir Poutine soutient ouvertement cet acte de piraterie aérienne, elle qui est accusée d’avoir abattu, le 7 juillet 2014, un Boeing 777 assurant le vol MH17 de la Malaysia airlines entre Amsterdam et Kuala Lumpur, ne laissant aucun survivant parmi les 283 passagers et les 15 membres de l’équipage. Le survol du Donetz, cette région d’Ukraine en proie à un conflit séparatiste attisé par l’armée russe, n’était pourtant pas interdite aux avions civils…

Un dessin du Néerlandais Joep Bertrams publié dans Le Monde (source © Cartooning for Peace)

Juin 2021 :

A l’occasion des élections départementales et régionales, pourtant regroupées en même temps les 20 et 27 juin 2021, le taux d’abstention enregistre de nouveaux records ! Sur les 48 millions d’électeurs appelés aux urnes, un tiers seulement s’est déplacé pour aller voter : 33,27 % au premier tour et 34,58 % au second tour. En dehors de la Corse, le taux d’abstention a dépassé les 60 % dans toutes les régions françaises : du jamais vu !

Un dessin d’actualité signé Ganaga (source © Blagues et dessins)

Juillet 2021 :

Prévus initialement en 2020 mais reportés pour cause de pandémie mondiale, les Jeux olympiques de Tokyo s’ouvrent finalement le 23 juillet 2021. La situation sanitaire ne s’étant pas vraiment améliorée, les autorités olympiques prennent finalement la décision de ne pas ouvrir les tribunes aux spectateurs et les épreuves se déroulent pour l’essentiel à huis clos dans des stades vides, y compris pour la cérémonie d’arrivée de la flamme olympique : une décision inédite et guère de nature à encourager l’esprit olympique de concorde et de communion sportive…

Un dessin d’actualité signé Oli (source © Les humeurs d’Oli)

Août 2021 :

Dimanche 15 août 2021, les Talibans arrivent aux portes de Kaboul à l’issue d’une offensive éclair qui leur a permis de reprendre en une dizaine de jours seulement quasiment toutes les grandes villes d’Afghanistan, profitant du retrait des troupes américaines après 20 ans de présence militaire. Le dernier avion militaire américain quittera le sol afghan le 30 août seulement mais c’est le début, pour une partie de la population afghane, d’une période particulièrement éprouvante, surtout pour tous ceux qui comptaient sur l’aide occidentale pour faire évoluer leur pays vers un climat social plus ouvert et plus libéral.

Un dessin signé du caricaturiste algérien Dilem (source © France 24)

Septembre 2021 :

Le 15 septembre 2021, l’Australie met brutalement fin et sans préavis au contrat qui la liait avec le groupe d’armement français Naval Group pour la commande de 12 sous-marins, un contrat signé en 2016 pour un montant de 34,3 milliards d’euros. L’annonce en est faite lors d’une allocution commune du premier ministre australien Scott Morrison, de l’Anglais Boris Johnson et de l’Américain Joe Biden, ces trois pays ayant décidé de créer une nouvelle alliance devant déboucher sur la fabrication de 8 sous-marins nucléaires américains au bénéfice de l’Australie. La France rappelle aussitôt ses ambassadeurs en Australie et aux États-Unis mais la crise diplomatique sera de courte durée…

Un dessin de Chapatte (source © Le Temps)

Octobre 2021 :

En cet automne 2021, les sondages ne sont pas très favorables à la maire de Paris, Anne Hidalgo, qui avait annoncé le 12 septembre sa candidature aux présidentielles de 2022 et qui vient pourtant de remporter une primaire fermée du Parti socialiste face à Stéphane Le Foll. Créditée d’à peine 7 % des intentions de vote au lancement de sa campagne, elle ne cesse de baisser dans les sondages, derrière Yannick Jadot qui a remporté, difficilement, une primaire écologiste ouverte, et encore plus loin de Jean-Luc Mélenchon qui se présente au nom de la France insoumise tout en refusant toute idée de candidature commune à gauche.

Un dessin signé Kak, publié le 15 octobre 2021 (source © L’Opinion)

Novembre 2021 :

La 26e conférence des parties organisée en novembre 2021 à Glasgow, en Ecosse, a débouché sur un fiasco quasi total, même si davantage de pays (dont l’Inde) se sont engagés pour une réduction de leurs émissions de gaz à effet de serre en vue de viser la neutralité carbone. Même si tous les engagements pris lors de cette rencontre devaient être tenus, l’augmentation de la température moyenne du globe devrait atteindre 2,4 °C d’ici 2100, très au-delà des 1,5 °C qui étaient visés à l’issue de l’accord de Paris lors de la COP 21 : on régresse…

Un dessin signé Alex publié par La Liberté (source © Courrier international)

Décembre 2021 :

C’est le temps de Noël et de la crèche. Mais en ces temps de pandémie et de nouveau pic épidémique, se déplacer n’est pas simple et même les Rois Mages ne sont pas à l’abri des désagréments liés aux procédures sanitaires. Heureusement, Amazon est là pour palier les défaillances de nos porteurs de cadeaux : la tradition a du plomb dans l’aile…

Un dessin signé Soulcié publié dans Marianne le 24 décembre 2021