Attention aux retombées de plastique quand il pleut : les chercheurs ont mis en évidence l’augmentation très significative des teneurs en micro fragments de plastique dans l’air ambiant en période de pluie. Du coup, la fondation australienne Minderoo a développé un outil de modélisation, accessible sur internet, qui permet d’annoncer, pour l’instant uniquement à Paris, la quantité totale de plastique que l’on peut s’attendre à voir se répandre sur l’ensemble de la ville en fonction de la météo du jour : de l’ordre de 40 jusqu’à plus de 400 kg par jour selon le type de précipitations et les conditions météorologiques !
Oui, nous sommes envahis de microplastiques. Ces minuscules particules plastiques de moins de 5 mm sont partout, dans l’atmosphère au fond des océans, de l’Arctique à l’Antarctique, dans les glaciers, dans notre nourriture… Nous en mangeons quotidiennement : près d’1 gramme par jour, soit l’équivalent d’une carte de crédit grignotée chaque semaine ! Entre 10 et 100 particules de microplastiques tombent dans notre assiette à tous les repas, et nous en buvons une dizaine dans une bouteille d’eau en plastique, mais aussi dans notre viande, dans le lait, dans le poisson, dans les moules : nous absorbons ainsi jusqu’à 1500 particules de microplastiques par kilogramme de produit de la mer, soit l’équivalent de 2 bouchons de bouteille…
Et cela, parce que tous ces micro-fragments sont issus de l’altération des plastiques que nous utilisons ou que nous n’utilisons qu’à peine : les emballages, les verres, les couverts autrefois si répandus, les pneus des voitures qui s’usent sur la route, le linge synthétique (2000 microplastiques sont relarguées à chaque lessive). Tous ses micro-déchets de plastiques sont disséminés dans notre environnement. On les retrouve dans les boues de nos stations d’épuration qu’on utilise en épandage sur les cultures, mais aussi dans les cours d’eau et ils finissent dans la mer…
Il y aurait 25 000 milliards de ces particules, soit entre 82 000 et 578 000 tonnes, dans l’océan… Et la Méditerranée est la mer la plus polluée au monde… Et dans ce schéma, la France est le plus grand pollueur sur le pourtour méditerranéen !!!
Depuis les années 70, on se doute que les plastiques ont un impact. Mais, c’est une science récente, les chercheurs n’ont pas encore prouvé l’impact direct sur l’homme. Par contre, l’impact environnemental est avéré. Indestructibles durant plusieurs dizaines voire centaines d’années, les microplastiques voyagent sur des milliers de kilomètres et servent de radeaux à de nombreuses espèces unicellulaire (bactérie et virus…) qui en profitent pour parcourir l’océan. Cela risque de déséquilibrer les écosystèmes et la biodiversité en participant à l’arrivée d’espèces invasives et de nouvelles pathologies, notamment chez les animaux tels que les oiseaux marins : un déséquilibre de la flore intestinale a déjà été observée pour certains oiseaux marins, par exemple.
Ces microplastiques tendent aussi à s’opposer à la pompe biologique si efficace pour absorber le carbone de l’air, au risque d’accentuer le changement climatique. Dans l’atmosphère, certaines de ces particules reflètent la lumière, mais d’autres l’absorbent, comme le noir de carbone et pourraient accentuer les effets du changement climatique. Elles pourraient aussi interagir avec les nuages et contribuer au changement climatique selon des mécanismes encore mal connus.
En laboratoire, les chercheurs ont mis en évidence que cette pollution entraîne une diminution de la fécondité des oursins et des bivalves, ainsi qu’un ralentissement du développement des larves des animaux marins, augmente les maladies auto-immunes, etc. Ils ont montré que cela entraîne le blanchiment du corail et la mortalité du zooplancton ou de juvéniles de poisson. La transposition à l’homme n’est pas immédiate, mais il est permis de s’interroger…
On estime en effet qu’un adulte absorberait entre 39 000 et 59 000 micro-particules de plastique par an et qu’un bébé en ingérerait jusqu’à 1 million par an, résultat de sa manie de tout mettre à la bouche, tétine comme jouet en plastique, et il respirerait environ la même quantité. Une part est rejetée mais le reste circule dans notre organisme : nous en trouvons dans le lait maternel, le placenta, le cerveau …
Par mesure de précaution, il est donc important d’éviter d’en absorber plus que nécessaire et donc de réduire autant que possible l’utilisation de plastique lorsqu’on peut le remplacer par d’autres matériaux moins nocifs. C’est d’ailleurs un des arguments qui a guidé le choix de la Commission européenne qui a décidé d’interdire dans 5 ans les terrains de sport sur pelouse synthétique. Un message que la commune de Carnoux pourrait peut-être entendre, elle qui s’apprête à arracher le gazon naturel de son stade de foot pour le remplacer par des fibres en plastique dont les micro-débris finiront fatalement dans les poumons de nos jeunes sportifs et dans l’estomac des poissons de nos calanques…
C. Chevalier