Archive for janvier 2023

Logement social primé à Carnoux

30 janvier 2023

Le logement social n’a pas toujours bonne presse, surtout auprès des élus locaux qui craignent de voir s’y installer des populations indésirables. Malgré la loi SRU qui impose depuis maintenant plus de 20 ans à certaines communes un taux de logements sociaux minimum avec des objectifs de rattrapages triennaux pour atteindre au moins 25 % d’habitations en logements social d’ici 2025, le compte n’y est pas. Et la métropole Aix-Marseille-Provence fait plutôt partie des mauvais élèves de la classe, au sein d’une région PACA elle-même à la traîne.

Lors du dernier bilan établi en 2019, sur les 2091 communes françaises soumises à cette obligation (grosso modo, les communes de plus de 3500 habitants, situées en aire urbaine, dont Carnoux-en-Provence fait partie), plus de la moitié d’entre elles n’avaient pas rempli leurs objectifs de rattrapage. La métropole marseillaise est particulièrement concernée bien que sa ville centre présente un taux de logements sociaux plutôt élevé, mais très inégalement réparti selon les arrondissements.

Le Hameau des Gorguettes, résidence sociale à Cassis (photo © ERILIA)

Pourtant plus de 80 % des Français sont éligibles au logement social ou intermédiaire, mais ces logements sont très insuffisants pour répondre à la demande qui s’accumule. Pour le seul département des Bouches-du-Rhône, on estime le nombre de demandes de logements sociaux en attente de traitement à plus de 90 000 ! Mais le parc social de 140 000 logements est loin d’être en capacité de répondre à une telle demande. Le taux de rotation est très faible et pour chaque logement qui se libère la file d’attente est longue…

Un dessin de Jean-Jacques Beltramo pour le podcast journal

Il faudrait donc construire davantage de logements sociaux, surtout dans les communes qui en manquent, afin de rééquilibrer l’offre et introduire davantage de mixité sociale. Mais la métropole marseillaise a bien du mal à répondre à ses objectifs. Pour l’année 2022, l’objectif fixé par l’État, qui cofinance largement cet effort via les aides à la pierre, était d’y construire 4950 logements sociaux, pour un total d’un peu plus de 12 000 sur l’ensemble de la région PACA. Mais on sera loin du compte avec moins de 2000 agréments accordés, moins encore qu’en 2021 !

Dans un tel contexte, on peut donc saluer l’effort entrepris par la commune de Carnoux qui, malgré son territoire relativement contraint et bien que très éloignée des objectifs de la loi SRU avec un taux de logements sociaux qui ne dépasse pas 16 %, ce qui l’a conduit à verser en 2021 60 000 € de pénalités à l’État, a entrepris ces dernières années la construction de plusieurs logements supplémentaires : 27 construits par la SOGIMA rue Gabriel Fauré puis 20 livrés par 13 Habitat en 2016 dans une nouvelle résidence face à la nouvelle Poste et enfin 60 supplémentaires achevés en 2021 par UNICIL à l’emplacement de l’ancien collège privé Saint-Augustin, reconstruit sur les hauteurs de Carnoux dans le cadre d’une opération immobilière un peu douteuse.

Résidence sociale 13 Habitat conçue par les architectes Fernandez et Serre, livrée en 2016 au centre de Carnoux (photo © Aldo Amoretti / AMC)

Avec ces nouvelles constructions, le parc de logement social de Carnoux atteindrait ainsi 485 logements, ce qui reste très insuffisant au vu des besoins, surtout pour les nouveaux ménages en quête d’un logement accessible, puisqu’on dénombre de l’ordre de 300 demandes en attente, alors que très peu de ces logements se libèrent.

On pourrait certes critiquer la composition de ces logements qui pour la plupart, surtout ceux construits récemment, sont hors de portée des ménages les plus modestes. On distingue en effet 4 grandes catégories de logements sociaux, selon leur dispositif de financement et le type de public concerné. Ceux qui s’adressent aux plus précaires sont de type PLAI tandis que les logements à loyer modéré classiques (les HLM, dans lesquels vivent un tiers des Français) relèvent de la catégorie PLUS (financés par des Prêts locatifs à usage social). Viennent ensuite les PLS qui permettent aux familles dont les revenus dépassent les plafonds d’accéder quand même à du logement aidé sans passer par le parc privé, de même que les PLI, mis en œuvre via un Prêt locatif intermédiaire.

Le jeu des élus locaux est donc en général, comme à Carnoux, de maximiser les catégories supérieures pour remplir leurs obligations réglementaires et bénéficier des aides à la pierre de l’État en attribuant des logements à leurs électeurs sans avoir à gérer dans leur commune des habitants à revenu modeste dont les besoins en accompagnement social sont plus exigeants. D’où la très faible proportion de logements de type PLAI dans les nouveaux logements de Carnoux.

Remise des prix du palmarès régional de l’habitat PACA à la Préfecture de Région le 10 novembre 2022 (photo © Robert Poulain / DREAL PACA)

Mais malgré cette réserve, force est de constater que l’effort entrepris par la municipalité de Carnoux pour construire ainsi de nouveaux logements sociaux dans une commune qui en manque cruellement, est à saluer. Et d’ailleurs la Ville est à l’honneur puisqu’elle fait partie des 10 lauréats que le Préfet de Région a souhaité mettre en avant en 2022 dans le cadre du palmarès régional de l’habitat PACA, dévoilé à Marseille le 10 novembre dernier.

La nouvelle résidence sociale UNICIL Le Saint-Augustin à Carnoux (photo © Antoine Pecatte / Agence Jérôme Siame architectes)

La nouvelle résidence sociale Saint-Augustin, conçue par l’architecte Jérôme Siame a ainsi été récompensée pour sa qualité architecturale et d’insertion paysagère dans un terrain à forte déclivité, derrière la gendarmerie et dans un environnement très pavillonnaire. Il n’était pas simple d’arriver à construire un tel ensemble dans un espace aussi contraint, comme cela avait été le cas auparavant rue Gabriel Fauré où l’implantation de la nouvelle résidence avait déclenché les foudres des riverains et force est de constater que la qualité architecturale de cette résidence ne peut que rassurer les Carnussiens quant à l’intérêt de développer ainsi un habitat social qui réponde au besoin de tous.

Les coursives du Saint-Augustin à Carnoux (photo © Antoine Pecatte / Agence Jérôme Siame architectes)

Pour autant, il reste bien du chemin à parcourir pour atteindre un jour la proportion réglementaire imposée de 25 % de logement social à Carnoux ! Et il ne s’agit pas d’une lubie de parlementaires en panne d’inspiration mais bien de répondre à un besoin vital pour les Carnussiens et notamment les jeunes qui entrent dans la vie active de se loger décemment alors que les prix de l’immobilier privé flambent et que de plus en plus de logements dans notre commune sont vacants ou sont réservés aux locations saisonnières si lucratives.

Certes, les opportunités foncières sont rares dans une commune aussi exiguë que Carnoux mais les opérations récentes effectuées montrent qu’il est possible de construire de petites résidences sociales bien intégrées dans un tissu pavillonnaire et il importe donc de repérer d’autres opportunités pour poursuivre cet effort le long du mail qui est l’axe le plus facile à desservir en transports en commun. L’espace situé derrière la mairie et la Crémaillère doit être prochainement réaménagé et il est tout à fait envisageable d’y implanter de nouveaux logements sociaux en plein cœur de ville : il serait vraiment dommage de rater une telle opportunité !

L. V.

Katulu ? toujours actif pour le Téléthon à Carnoux

28 janvier 2023

Pour la 36ème édition du Téléthon organisée à Carnoux-en-Provence le 1er décembre 2022, le Cercle Progressiste Carnussien était à nouveau présent, par l’intermédiaire de son groupe de lecture Katulu ?, pour cette lecture publique et a tenu un stand de vente de livres d’occasion, samedi matin 3 décembre, dans la salle du Mont Fleuri.

Stand de vente de livres d’occasion organisé par le Cercle progressiste carnussien à l’occasion du Téléthon, le 3 décembre 2022 (source © Mairie de Carnoux / Le Messager).

Le Cercle Progressiste Carnussien, crée en 2001 par des Carnussiens, et organisé en association loi 1901, a pour objectif notamment de « favoriser l’information, la participation et les rencontres entre citoyens ».

Cette année nous avons choisi comme thème « Biographie-Autobiographie ». L’autobiographie est à la mode. Qui ne raconte pas son enfance, sa vie professionnelle, ses malheurs conjugaux, ses états d’âme… ? Les étagères des librairies en sont garnies.

Nos lectures nous ont engagé dans des voies plus classiques. Cinq ouvrages ont ainsi été sélectionnés pour cette conférence publique qui s’est tenue jeudi 1er décembre à 18h30 dans la salle municipale du Clos Blancheton à Carnoux : 3 biographies et 2 autobiographies. Les comptes-rendus de ces lectures sont accessibles ici dans leur intégralité :

Chacun de ces cinq livres biographiques ou autobiographiques a été présenté par un des membres de notre club de lecture : Roselyne Pissanciel pour le livre Les Frida Kahlo  de Rauda Jamis, Josette Jegouzo pour Charlotte de David Foenkinos, Marie-Antoinette Ricard pour Erasme de Stefan.Zweig, Josette Manforti pour Un long chemin vers la liberté, autobiographie de Nelson Mandela et Nicole Bonardo pour Les années, autobiographie d’Annie Ernaux qui vient de recevoir le prix Nobel de littérature.

Ce choix peut paraître hétéroclite mais il ne va pas sans faire écho à l’actualité artistique (exposition Frida Kahlo à Paris, et sortie ces jours-ci du film « Charlotte »), à l’actualité littéraire (attribution à une Française du prix Nobel de Littérature) et à la situation actuelle de notre monde avec la guerre en Ukraine.

Avec le savoir-faire de Michel Motré, président du CPC, mais aussi inspecteur d’Académie honoraire en art plastique, cette lecture publique a été agrémentée par un diaporama des œuvres des artistes évoqués au gré de nos commentaires.

Merci aux nombreux Carnussiens qui sont venus partager avec nous ce moment de convivialité et d’échange autour de nos lectures.

Marie-Antoinette R

La saga du yellow submarine marseillais

22 janvier 2023

La mort, le 14 janvier 2023, du plongeur et caméraman sous-marin Bernard Delemotte, décédé à l’âge de 83 suite à un accident de plongée au large du Frioul alors qu’il s’apprêtait à déménager pour vivre sur son nouveau catamaran ancré à La Rochelle. Une belle mort pour l’ancien chef plongeur de la Calypso, à un âge où l’on meurt habituellement plutôt d’un accident cardio-vasculaire que d’une pratique sportive aussi exigeante. Un évènement en tout cas qui vient remettre en lumière la saga de l’équipe Cousteau.

Bernard Delemotte, aux commandes du sous-marin le Saga à Marseille (photo © Philippe Mura / France Bleu)

D’autant qu’un autre pilier de cette équipe, Albert Falco, lui aussi ancien chef plongeur puis capitaine de la Calypso est décédé récemment, également à Marseille, en 2012. Comme lui, Bernard Delemotte était un passionné du Monde du silence, ce monde sous-marin dans lequel il a passé une si grande partie de sa vie, compagnon du commandant Cousteau depuis la fin des années 1960. Après le développement, dès les années 1950, de sa soucoupe plongeante pilotée justement par Albert Falco et qui peut descendre à 350 m de profondeur, le commandant Cousteau imagine la construction d’un sous-marin, l’Argyronète, dans le cadre d’une convention signée en 1966 entre l’Office français de recherches sous-marines (OFRS), une association qui participe notamment, dans les années 1950, à l’exploration de la résurgence de Port-Miou à Cassis, et ce qui était alors l’Institut français du pétrole (IFP).

Le commandant Jacques-Yves Cousteau avec son inévitable bonnet rouge (photo © Keystone / Arcinfo)

Bernard Delemotte, qui venait de rejoindre l’équipe de la Calypso à l’occasion de l’expédition Précontinent III, suit ce projet ambitieux piloté par Jean Mollard, lequel rejoint en 1970 la COMEX, récemment créée par Henri-Germain Delauze. Cette défection et les difficultés de financement du projet obligent à mettre ce dernier en stand-by, alors que la coque du sous-marin, les moteurs diesel, les équipements hydrauliques, la sphère largable et de nombreux autres équipements ont déjà été livrés et sont stockés dans le hangar et les magasins annexes de l’Estaque où le projet est en gestation.

La Calypso du commandant Cousteau amarrée en 1970 à l’Estaque, près du hangar où se construit le Saga (source © Bateaux)

Mais en 1981, la COMEX reprend le projet, en collaboration avec le CNEXO, devenu depuis l’IFREMER (Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer) et en octobre 1987, le nouveau sous-marin est lancé pour effectuer ses premiers essais en mer dans la rade de Marseille dès 1988. Rebaptisé le Saga (ce qui signifie Sous-marin d’assistance à grande autonomie, comme chacun l’avait bien évidemment deviné) et recouvert d’une peinture d’un jaune éclatant qui rappelle le fameux yellow submarine aussi mythique que déjanté de la chanson des Beatles, il est alors, avec ses 28 m de long et ses 545 tonnes, le plus gros sous-marin civil jamais construit. Sa cabine de pilotage à pression atmosphérique permet d’accueillir 6 hommes d’équipage tandis que 6 plongeurs peuvent loger dans son compartiment hyperbare.

Conçu pour descendre jusqu’à 600 m de profondeur, le Saga a établi le record du monde de profondeur pour une sortie d’un plongeur largué à 316 m de profondeur. Équipé d’un dispositif de pilotage largement automatisé permettant de réduire au strict minimum l’équipage chargé de la manœuvre, l’engin est propulsé par 2 moteurs Stirling et peut embarquer 6,5 tonnes d’oxygène cryogénisé, ce qui lui assure une autonomie de 21 jours. Un compartiment largable est même prévu, permettant aux 6 hommes d’équipage de remonter à la surface sans encombre en cas d’avarie…

Le Saga en vadrouille dans la rade de Marseille au large de l’Estaque (source © Bateaux)

Conçu principalement pour réaliser des missions off shore au bénéfice de l’exploitation pétrolière, le Saga s’est très rapidement retrouvé confronté à la concurrence des véhicules sous-marins téléguidés, les ROV (Remotely operated underwater vehicle), qui présentent l’avantage majeur de permettre des interventions sous-marines tout aussi sophistiquées sans engager des plongeurs donc sans mettre en danger des vies humaines. Développés à la même période et sans cesse perfectionnés depuis, les ROV ont mis un coup d’arrêt brutal à la carrière commerciale du petit sous-marin jaune dont avait rêvé le commandant Cousteau. Dès 1990, la COMEX se détourne du projet et remise le Saga dans son hangar de l’Estaque où il dort toujours depuis.

Le Saga dans son hangar de l’Estaque (source © Les Compagnons du Saga)

En 1999, c’est la Ville de Marseille qui se porte acquéreur du hangar et du prototype tandis qu’en 2014 est créée l’association Les Compagnons du Saga, destinée à entretenir le petit sous-marin jaune et à faire vivre sa mémoire. Bernard Delemotte, comme d’autres passionnés, faisait partie des piliers de cette association. Sa disparition marque d’une pierre jaune la saga du petit submersible marseillais, si novateur dans les années 1980 et si rapidement devenu obsolète….

L. V.

Les loups aux portes de Carnoux-en-Provence

16 janvier 2023

Lors de sa création en 2012, il y a 10 ans déjà, le Parc national des Calanques suscitait un rejet assez unanime des élus locaux, craignant tous que les objectifs de préservation de cet espace naturel remarquable aux portes de l’agglomération marseillaise ne se traduise par des contraintes accrues pour l’aménagement de leur territoire et un regard extérieur sur leurs prérogatives en matière d’urbanisme sur lesquelles ils sont particulièrement chatouilleux.

La commune de Carnoux s’était d’ailleurs opposée à l’unanimité à la proposition qui lui était faite de s’inscrire dans l’aire d’adhésion du Parc ! Le Parc national a pourtant depuis fait la preuve de son utilité pour le respect des zones de non pêche et pour la régulation de la fréquentation estivale dans les calanques surpeuplées, même s’il peine encore à limiter l’impact des rejets polluants en mer et l’envol des déchets urbains

Panneau de signalisation et gardes du Parc national des Calanques (photo © Parc national des Calanques)

Et voilà que l’on apprend désormais qu’une meute de loups a élu domicile dans le Parc national des Calanques, un jeune loup ayant même trouvé le moyen de se faire écraser par un véhicule en traversant la route départementale aux portes de Carnoux, à moins de 100 m de l’entrée du camp de Carpiagne. Un argument qui risque de faire frémir bien des habitants chez qui la peur du loup revient comme un atavisme millénaire. Et même chez certains élus locaux qui risquent de s’emparer du sujet pour dramatiser l’affaire et exiger des mesures d’éradication que les chasseurs du cru se feront un plaisir de mettre en œuvre comme ils l’ont fait dans les Pyrénées où ils mènent la vie dure aux quelques ours que l’on a tenté de réintroduire.

En France, il n’y a pas eu d’opération de réintroduction du loup qui est pourtant considéré comme une espèce protégée, classée vulnérable au niveau européen depuis le début des années 1990, et sur la liste rouge de l’UICN. Autrefois présent sur l’ensemble du territoire national où les éleveurs se sont toujours plaint de son comportement opportuniste qui le faisait s’attaquer aux troupeaux, le loup a fait l’objet d’une traque intense, tous les moyens étant alors bons pour le tuer et réduire ses zones d’habitat. En France, l’espèce était considérée comme totalement éradiquée en 1937, mais quelques individus continuaient à subsister chez nos voisins italiens, dans le massif des Abruzzes, sur les contreforts des Apennins, à l’Est de Rome.

Une meute de loup photographiée par une caméra de surveillance en 2022 aux États-Unis (photo © Wolf Conservation Center / Démotivateur)

Profitant de leur statut d’espèce protégée, cette population résiduelle a fini par reprendre du poil de la bête et à recoloniser un territoire plus vaste. Car le loup gris, Canis lupus de son petit nom, est un grand marcheur qui peut parcourir plusieurs dizaines de kilomètres chaque jour. Il vit en meute dans un vaste territoire de plusieurs centaines de km2, où il chasse généralement la nuit et où il vit en meute selon une hiérarchie très stricte. Mais les jeunes de 2 à 5 ans sont parfois amenés à quitter la meute pour se chercher un partenaire et s’installer sur un autre territoire où la compétition est moins forte. Ils peuvent alors parcourir de grandes distances.

Les loups du parc Alpha dans le Mercantour, dont certains s’étaient échappés à l’occasion de la tempête Alex en octobre 2020 (source © 24 heures)

C’est en 1992 qu’a été de nouveau observé en France un premier couple de loups dans le massif du Mercantour. Depuis, l’espèce s’est fortement dispersée et a largement recolonisé tout le massif alpin ainsi qu’une bonne partie du Massif Central mais on le trouve aussi désormais dans le nord-est de la France et localement dans les Pyrénées orientales. A partir de 1999, on l’observe dans le nord du Var et en 2009 on voit ses traces dans le massif de la Sainte-Baume. Selon l’Office français de la biodiversité, on compterait désormais en France au moins 920 loups recensés sur l’ensemble du territoire national.

Carte de détection du loup en Europe en 2016 (source © Large carnivore initiative for Europe / Office français de la biodiversité)

Il a fallu cependant attendre octobre 2021 pour que sa présence soit officiellement confirmée par le Parc National des Calanques qui diffuse alors la photo d’un couple de loups après une année de traque à l’aide de pièges photographiques et alors que les traces et les témoignages se multipliaient indiquant la présence de cet animal dans le massif, sur les hauteurs de Carpiagne.

Loups photographiés dans les calanques par des pièges photographiques en octobre 2021 (photo © Parc National des Calanques / France 3 Régions)

A cette date, d’autres loups sont déjà repérés du côté de Cadarache et dans les massifs de la Sainte-Victoire et du Mont Aurélien. Le 25 septembre 2022, un troupeau de chèvres paissant à 300 m seulement du village des Pennes-Mirabeau avait d’ailleurs été attaqué par une meute de loups, laissant 12 bêtes mortes, une attaque confirmée par les services de la Préfecture qui ont donc indemnisé la propriétaire du troupeau comme le prévoit la règlementation.

Depuis, le couple de loups des Calanques a eu une portée et les gardes du Parc national ont eu l’occasion de repérer les traces des jeunes. C’est très probablement l’un d’entre eux qui s’est fait écraser à l’entrée de Carnoux, dans la nuit du jeudi au vendredi 13 janvier 2023, par un automobiliste qui n’a même pas jugé utile de s’arrêter ni de se signaler. C’est une patrouille du Centre d’information des routes départementale en tournée d’inspection qui a signalé l’évènement vendredi matin très tôt.

Le cadavre d’un jeune loup écrasé par un chauffard dans la nuit du 12 au 13 janvier 2023 à l’entrée de Carnoux (photo © Parc National des Calanques / La Provence)

Des agents de l’Office français de la biodiversité, de l’Office national des Forêts et du Parc national des Calanques se sont immédiatement rendus sur les lieux. Leurs premières constations laissent effectivement penser que le loup percuté sur la route est bien l’un des jeunes de la meute, mais une autopsie va être réalisée pour le confirmer, même si les causes du décès ne laissent malheureusement aucune place au doute. Une bonne occasion en tout cas de rappeler aux automobilistes de Carnoux qui circulent de nuit, souvent à vive allure, qu’ils prennent ainsi le risque d’entrer en collision non seulement avec un sanglier mais aussi désormais avec un loup. Nous avons la chance de vivre dans un environnement naturel exceptionnel mais il est de la responsabilité de chacun d’agir en conséquence pour le préserver…

L. V.

Brésil : la démocratie menacée

14 janvier 2023

Quasiment deux ans, jour pour jour, après l’assaut du Capitole, le 6 janvier 2021, par des partisans déchaînés de Donald Trump, incapables de reconnaître la défait électorale de ce dernier aux élections présidentielles américaines, voilà que ce mauvais scénario s’est répété, quasi à l’identique, le 8 janvier 2023, à l’instigation de l’ex-président brésilien, Jair Bolsonaro, très proche de Donald Trump, y compris physiquement puisqu’il se trouvait justement en Floride lors de ces événements dramatiques…

Les affrontements violents qui se sont produits à Brasilia, ce dimanche 8 janvier, une semaine seulement après l’investiture officielle du président Luiz Inácio Lula da Silva, élu avec 50,9 % des suffrages à l’issue d’un second tour très mouvementé le 20 octobre dernier, ressemblent en effet fort à une tentative de coup d’État dans ce pays qui a connu plus de 20 ans de dictature militaire entre 1964 et 1985. Des milliers de supporters de Jair Bolsonaro, revêtus du maillot jaune de la Seleção et arborant des drapeaux brésiliens, ont en effet délibérément pris d’assaut les lieux symboliques du pouvoir, sous les yeux assez passifs d’une police militaire débordée voire complice.

Le 8 janvier 2023 à Brasilia, la foule des manifestants bolsonaristes envahit les bâtiments du Congrès (photo © Sergio Lima / AFP / Le Monde)

Le monde entier a ainsi pu voir, comme il y a deux ans à Washington, ces militants acquis aux valeurs de l’extrême-droite, s’en prendre ouvertement aux institutions républicaines de leur pays, rassemblées ici sur la place des Trois-Pouvoirs, imaginée et conçue par le grand architecte brésilien Oscar Niemeyer : le Congrès qui rassemble le Sénat et la Chambre des députés, avec son immense rampe et ses coupoles de béton, le Tribunal suprême fédéral sous forme d’un cube de verre symbolisant la transparence de la Justice, et le parallélépipède de marbre ocre du Planalto, lieu de travail du Chef de l’État. Pendant plusieurs heures, les manifestants survoltés ont littéralement envahi les lieux, brisant les vitres pour pénétrer dans les bâtiments officiels où ils ont commis de nombreux saccages.

Des partisans de Jair Bolsonaro s’attaquent aux vitres du Tribunal suprême fédéral à Brasilia le 8 janvier 2023 (photo © Ton Molina / AFP / France TV info)

Chauffés à blanc par les discours complotistes de leur mentor, ces manifestants avaient au préalable fait le siège du quartier général de l’armée où ils tentaient depuis des semaines de faire adhérer à leur cause les forces militaires réputées proches de l’ancien capitaine d’artillerie devenu Président de la République, Jair Bolsonaro. Mais contrairement à la police militaire aux ordres du gouverneur de l’État de Brasilia, un proche de Bolsonaro qui a d’ailleurs été depuis suspendu de ses fonctions, l’armée a jusqu’à présent conservé son rôle constitutionnel et n’est pas intervenue, ce qui a permis à la police de reprendre rapidement le contrôle des lieux et de procéder à plusieurs centaines d’arrestations.

Le Président Lula, qui était en déplacement au moment de l’attaque, est rapidement revenu sur place, rappelant que « la démocratie garantit la liberté d’expression, mais elle exige aussi que les institutions soient respectées » et considérant que « ce qu’ont fait ces vandales, ces fascistes fanatiques […] est sans précédent dans l’histoire de notre pays ». Des paroles fortes qui seront sans doute suivies de condamnations fermes de ces débordements bien peu démocratiques, car la situation reste fragile pour le nouveau Président, revenu au pouvoir après avoir été condamné à 12 ans de prison en 2018 pour l’empêcher de se représenter aux élections présidentielles où il était pourtant donné largement favori. Libéré en 2019, il est finalement blanchi en 2021 par le Tribunal suprême fédéral qui reconnait la partialité du juge Sergio Moro qui l’avait fait condamner.

Le président du Brésil, Luiz Inacio Lula da Silva, en chemin vers le Congrès afin d’y prêter serment avant d’être investi, à Brasilia, le 1er janvier 2023 (photo © André Penner / AP / Le Monde)

Lors de ses deux premiers mandats présidentiels, entre 2003 et 2010, Lula avait pourtant réussi à faire sortir le Brésil de la politique d’austérité imposée jusque-là par le FMI et à engager son pays sur la voie de la croissance économique tout en permettant à plus de 30 millions de Brésiliens de sortir de la pauvreté grâce à ses politiques sociales ambitieuses. Il quitte d’ailleurs le pouvoir avec une popularité record et n’a aucun mal à faire élire à sa place sa chef de cabinet Dilma Rousseff.

Mais les nombreux scandales financiers et la corruption persistante qui gangrène le monde politique brésilien, y compris au sein de l’appareil judiciaire, ont largement fissuré depuis cette belle réussite. Dilma Rousseff est destituée par le Parlement en août 2016, lors de son second mandat, ce qui permet l’arrivée au pouvoir du populiste d’extrême droite Jair Bolsonaro, élu fin 2018 et qui se singularise par une gestion catastrophique de la crise de Covid-19 qui fait plus de 700.000 morts au Brésil tandis que la déforestation de l’Amazonie repart en flèche sous la pression du lobby de l’agro-alimentaire.

L’ancien président brésilien Jair Bolsonaro, proche des milieux militaires et du lobby des armes (photo © Clauber Caetano / Présidence de la République / AFP / BFM TV)

Rien d’étonnant dans un tel contexte de retrouver un climat aussi tendu à l’occasion du retour dans l’arène politique de l’ex-syndicaliste Lula qui participait en 2022, à 77 ans, à sa sixième élection présidentielle face à un Jair Bolsonaro tout puissant et dont le parti arrive d’ailleurs largement en tête lors des élections au Sénat comme à la Chambre des députés. Jamais le Brésil n’a connu un scrutin présidentiel aussi serré dans un pays totalement polarisé et où la campagne politique s’est soldée par plusieurs assassinats de militants de gauche.

Le jour même du scrutin, de vastes opérations de contrôle routier orchestrées par la police militaire de plusieurs États bloquent des milliers d’électeurs sur les routes, les empêchant de se rendre à temps dans les bureaux de vote, tandis que plusieurs églises évangéliques accusent Lula de satanisme, rien de moins ! Bolsonaro lui-même refuse de reconnaître sa défaite à l’issue du scrutin et s’enferme dans le mutisme tandis que ses partisans bloquent les routes pendant plusieurs semaines et font le siège des casernes pour appeler l’armée à « sauver le Brésil »…

Un militaire brésilien bolsonariste en transe à Rio de Janeiro en novembre 2022… (photo © Bruna Prado / AP / Le Grand Continent)

Un climat de tension qui explique donc largement les débordements que l’on a vu à Brasilia une semaine seulement après l’investiture du nouveau Président. Celui-ci aura certainement fort à faire pour gouverner le pays, au sein d’une coalition pour le moins hétéroclite dans laquelle le Parti des Travailleurs est finalement très minoritaire et où beaucoup sont prêts à se vendre au plus offrant tandis que les principaux États du pays sont aux mains de gouverneurs proches de Bolsonaro. L’avenir du Brésil risque de ne pas être un long fleuve tranquille et on souhaite bien du courage au nouveau Président élu…

L. V.

2023 : Carnoux mise tout sur le foot…

9 janvier 2023

Vendredi 6 janvier a donc eu lieu la traditionnelle cérémonie des vœux du Maire de Carnoux, célébrée en grandes pompes à l’ARTEA devant une salle presque comble, comme à l’accoutumée. Et cette année, les Carnussiens n’ont pas été déçus du déplacement avec en introduction un film autopromotionnel de près de 20 mn mettant en valeur les atouts de la commune grâce à notre maire exceptionnel qui en tient fermement les rênes depuis des dizaines d’années.

Vidéo présentée lors des vœux du maire le 6 janvier 2023 et accessible sur le site de la commune

Réalisé par la société des Films du Grand Large, basée à Carnoux et justement spécialisée dans la captation audiovisuelle d’événements promotionnels et dans le tournage de films publicitaires, cette vidéo qui donne à voir toutes les facettes de la commune au travers du regard faussement naïf de deux fillettes, est un bel exemple de vidéo d’autocélébration. Elle donne de notre commune une image idyllique avec son cadre naturel boisé, son ambiance festive endiablée, ses commémorations militaires et religieuses inoubliables, et bien sûr son hôtel de ville flambant neuf pour lequel la vidéo s’attarde longuement sur les discours officiels de l’inauguration récente. Un film qui aurait toute sa place dans une campagne électorale à la gloire de notre « maire très bâtisseur » comme Martine Vassal en personne le qualifie dans ce bel exercice d’autopromotion.

Inauguration de l’hôtel de Ville de Carnoux, le 2 juillet 2022, un investissement largement payé par le Département et la Métropole (photo © CPC)

Curieusement, celle qui préside le Département et la Métropole, pourtant principaux bailleurs de fonds de la commune de Carnoux où ces deux institutions financent sans sourciller le moindre investissement public, n’avait pas jugé utile de se déplacer pour applaudir le Maire, sans doute occupée à réformer en profondeur le fonctionnement métropolitain encore un peu bancal comme n’a pas manqué de le souligner Jean-Pierre Giorgi. Ce dernier n’a donc eu d’autre choix que de remercier, dans son discours, les seules personnalités d’envergure nationale présentes dans la salle, à savoir Joëlle Melin, députée de notre circonscription et Stéphane Ravier, sénateur des Bouches-du-Rhône, des élus d’extrême droite qui naturellement se sentent chez eux à Carnoux…

Le discours du maire est revenu, comme la tradition l’exige en ce début d’année, sur les grands événements de l’année écoulée, la guerre en Ukraine bien sûr, les prolongements de la crise du Covid, l’inflation des prix de l’énergie et, forcément, l’événement majeur de l’année, à savoir l’invasion par quelques familles en caravanes, du stade Marcel Cerdan, pendant près de 2 semaines au cœur de l’été.

Le stade Marcel Cerdan, utilisé par les gens du voyage en juillet 2022 comme en 2021 (source © Messager / Ville de Carnoux)

Une invasion contre lequel notre maire s’indigne longuement, omettant d’indiquer que si les gens du voyage n’ont d’autre choix que d’occuper ainsi illégalement des infrastructures publiques c’est aussi parce que les collectivités territoriales se mettent elles-mêmes dans l’illégalité en ne respectant pas les obligations qui leur incombent réglementairement depuis la loi Besson qui date pourtant de juillet 2000, il y a maintenant 22 ans ! En l’occurrence, l’obligation repose désormais sur la Métropole mais il n’en demeure pas moins que rien n’a été fait depuis pour créer enfin une aire d’accueil pour les grands passages dans un département pourtant traditionnellement très concerné, et que même l’aire d’accueil que Carnoux doit mettre en place depuis des années avec les communes voisines est toujours dans les cartons…

Mais l’important est de regarder vers l’avenir et notre maire bâtisseur a déjà la tête tournée vers les grands projets de l’année 2023. Il se fait longuement applaudir en rappelant que notre commune n’a pas de dette et qu’il s’engage en 2023 à ne pas augmenter le taux (sinon le montant) de la taxe foncière. L’état des finances de la commune, très largement excédentaire et ceci de manière récurrente depuis des années, pourrait largement autoriser une baisse de ces prélèvements fiscaux au profit du pouvoir d’achat des Carnussiens, mais le maire se garde bien de l’évoquer, préférant garder un matelas financier important et ne voulant surtout pas reconnaître ces excédents financiers afin de continuer à quémander les subventions du Département.

L’hôtel de ville de Carnoux, quelque peu démesuré pour les besoins de la commune… (source © Ville de Carnoux)

Car la commune entend bien poursuivre en 2023 l’investissement sur son réseau d’éclairage public, pourtant normalement de compétence métropolitaine, mais que notre maire refuse obstinément de lâcher. En 2023 devrait ainsi non seulement se poursuivre l’enfouissement des lignes électriques, mais aussi s’engager le remplacement de la totalité des éclairages publics par des LED et l’installation d’un dispositif pour moduler l’éclairage selon les besoins. On pourrait penser, au vu des millions d’euros qui ont été investi depuis des années sur notre réseau communal que nos luminaires sont à la pointe du progrès mais on apprend ainsi qu’il n’en est rien et que la moitié des ampoules de la commune vont devoir être remplacées, pour la somme modique de 800.000 €.

Une bagatelle comparée aux 4,5 millions d’euros que va coûter à la commune la démolition puis la reconstruction de l’école maternelle de Carnoux, pourtant assez récente par rapport à la plupart des écoles du département. Mais cela n’empêchera pas le Conseil départemental de financer à hauteur de 60 % cet investissement conséquent, ni peut-être même d’obtenir une subvention supplémentaire de la part de l’État. Ces deux institutions, bien que lourdement endettées et financées par le contribuable, vont ainsi venir au secours de la commune de Carnoux qui croule sous les excédents budgétaires !

Le groupe scolaire Frédéric Mistral à Carnoux avec, à droite, les bâtiments de l’école maternelle, destinés à être démolis et entièrement reconstruits (source © Ville de Carnoux)

Et il en sera de même probablement pour les autres projets phares de Carnoux en 2023, à savoir la rénovation des salles municipales situées derrière la Crémaillère et dont le Maire ne sait trop que faire. La logique aurait voulu que l’on profite de la reconstruction de l’hôtel de ville, monumental et à moitié vide, qui a coûté plus de 10 million d’euros au contribuable, pour y prévoir des salles de réunion nécessaires à l’animation de la vie locale et au bon fonctionnement des multiples associations très actives sur la commune. Mais il n’en a rien été et il faudra donc nécessairement prévoir de telles infrastructures en lieu et place des salles Tony Garnier ou du Clos Blancheton, désormais vétustes, alors que l’on aurait pu prévoir à leur emplacement ces logements dont les Carnussiens ont désespérément besoin…

Mais l’important en 2023 sera surtout la n-ième rénovation du stade Marcel Cerdan pour lequel la collectivité engloutit des millions depuis des années pour répondre aux exigences délirantes de la Fédération française de football. On se souvient qu’en 2009 déjà, l’ancien SOCC avait été relégué avant de disparaître en 2010, suite à des problèmes de gestion du club, alors que la Ville avait énormément investi pour mettre aux normes nationales les installations sportives dédiées. Désormais, l’équipe 1 du Carnoux Football Club joue de nouveau en Nationale 3 et voilà donc que la commune se sent obligé de fêter l’évènement en prévoyant derechef 1 millions d’euros d’investissement supplémentaire, au-delà des 70.000 € de subvention annuelle que la commune verse déjà à l’association et ses 380 adhérents.

Le stade Marcel Cardan à Carnoux avec ses deux terrains de jeu (source © Carnoux Football Club / Foot méditerranéen)

Sur le stade Marcel Cerdan, qui comporte désormais des tribunes et deux terrains de jeu exclusivement réservés au club de foot, il est en effet question de remplacer le terrain encore en pelouse naturelle par un revêtement synthétique. Pendant longtemps, ce type de gazon synthétique était justement interdit pour les matchs de haut niveau mais la Fédération a désormais changé d’avis, sous la pression amicale des lobbyistes, et la ville de Carnoux va donc arracher la pelouse pour la remplacer par un produit polymère synthétique.

Une opération qui, outre son coût assez indécent, ne s’inscrit pas vraiment dans la transition écologique que certains appellent de leurs vœux. Les industriels ont beau essayer d’argumenter qu’une pelouse synthétique exige moins d’eau pour l’arrosage et moins d’énergie pour la tonte, le bilan carbone d’une telle option n’en est pas moins catastrophique, surtout si l’on raisonne en coût global, sachant que la durée de vie d’un gazon synthétique est en moyenne de 10 ans et que personne ne sait très bien comment recycler ce type de déchets carbonés. Mais peu importe pour la fédération et le club qui ne sont pas les payeurs et qui se moquent bien de l’impact environnemental de leur sport, l’important étant qu’une pelouse synthétique peut permettre un usage quotidien plus intensif : quand on aime, on ne compte pas !

L. V.

Marseille : la mairie adopte une girafe…

7 janvier 2023

C’est le quotidien La Provence qui l’a annoncé triomphalement mercredi 4 janvier 2023 avec ce titre quelque peu exotique : « La girafe Zarafa adoptée hier par la mairie de secteur »… En l’occurrence, cette annonce tout à fait officielle de la Maire de secteur des 1er et 7e arrondissements de Marseille, Sophie Camard, ainsi relayée par la presse locale, fait référence au fait que la girafe en question, accompagnée de son petit girafon Marcel, sédentarisée depuis quelques années déjà sur le haut de la Canebière, va enfin recevoir des papiers officiels, sous forme d’une convention d’installation en bonne et due forme pour lui permettre d’occuper ainsi l’espace public.

La girafe Zafara sur la place Léon Blum enfin adoptée officiellement (photo © David Rossi / La Provence)

Une régularisation administrative en quelque sorte, un peu tardive certes quand on sait que la girafe Zarafa en question a débarqué sur le port de Marseille en 1826, non pas clandestinement comme nombre de ses compatriotes actuels, mais en grandes pompes, cadeau officiel du pacha d’Égypte, Méhémet-Ali, au roi de France de l’époque, Charles X.

En ce temps-là, le vice-roi d’Égypte, arrivé au pouvoir 2 ans plus tôt, s’échinait à moderniser son pays, développant la culture du coton, créant des écoles et une administration plus performante et envisageant même de créer une ligne de chemin de fer pour relier Le Caire à Suez où il entrevoyait déjà l’intérêt du percement d’un canal. Un visionnaire, mais qui restait sous le joug de l’empire ottoman encore tout puissant et dont il n’était qu’un vassal.

Portrait de Méhémet-Ali, vice-roi d’Egypte, par Auguste Couderc en 1841 (photo © Gérard Blot / Musée national du Château de Versailles / RNMN / Muzeo)

Cherchant à se rapprocher de la France, il prend conseil auprès du consul général de France en Égypte, un certain Bernardino Droverti, ancien soldat de Napoléon 1er ayant participé à la campagne d’Égypte. Lui-même versé dans le commerce d’animaux exotiques alors florissant à une époque où l’on ne se préoccupe guère de préserver la biodiversité, le consul suggère de faire présent au roi de France d‘un animal emblématique.

Des soldats égyptiens en poste à Khartoum, au Soudan, ayant abattu une girafe, se retrouvaient depuis avec deux petits girafons sur les bras, dont ils ne savaient trop que faire… On les transfère donc au Caire où ils sont pris en charge par Atir, un ancien esclave soudanais au service du sieur Droverti. Mais la situation attise immédiatement la convoitise du consul anglais qui fait des pieds et des mains auprès du pacha pour réclamer lui-aussi sa girafe. Pour éviter une nouvelle crise internationale, les 2 girafons sont tirés au sort et le hasard veut que le plus chétif des deux revienne aux Anglais mais il meurt quelques semaines plus tard à son arrivée à Londres…

Quant à la girafe française, elle embarque sur une mini arche de Noé, accompagnée de 3 vaches soudanaises destinées à lui fournir sa ration quotidienne de 20 à 25 litres de lait, de 2 antilopes et d’un général qui rentre lui-même de mission en Égypte avec ses 2 chevaux. On aménage le pont pour que le girafon puisse passer la tête et admirer le paysage grâce à son long cou autour duquel se balance un pendentif contenant des versets du Coran : on ne badine pas avec la tradition ! Ainsi paré, l’équipage débarque à Marseille le 23 octobre 1826.

Le girafon Zarafa embarquant pour Marseille dans le port d’Alexandrie en 1826 (source © Bibliothèque du Museum national d’histoire naturelle / Sud-Ouest)

Après une quarantaine obligatoire, la ménagerie est autorisée à entrer en ville le 18 novembre et le girafon rejoint ses nouveaux appartements, en l’occurrence une écurie douillettement chauffée, gracieusement mise à disposition par le Préfet des Bouches-du-Rhône de l’époque, le vicomte de Villeneuve-Bargemont, pour que l’animal puisse y passer l’hiver au chaud. On le sort néanmoins chaque jour pour une petite balade digestive, pour la plus grande joie des Marseillais, tout ébaubis de voir un tel animal, tandis que le jeune girafon assure le succès des banquets organisés par l’épouse du Préfet.

Jusque-là en effet seuls 3 autres spécimens de girafes avaient pu être aperçues en Europe depuis la chute de l’empire romain au cours duquel il est arrivé que l’on parvienne à ramener vivantes quelques girafes destinées à finir dans la gueule des lions devant des milliers de spectateurs surexcités, Jules César en personne étant réputé avoir rapporté la première en l’an 46 avant notre ère. Il fallu ensuite attendre un peu avant 1240 pour que l’empereur Frédéric II de Hohenstaufen reçoive une girafe en cadeau de la part du sultan égyptien Al-Kamil, tandis que vers 1261 le roi d’Espagne Alphonse X hérite à son tour d’une girafe pour agrémenter sa ménagerie de Séville. Mais c’est la girafe offerte en 1487 au Florentin Laurent le Magnifique qui est surtout restée dans les mémoires, bien qu’elle ait survécu à peine plus d’un an aux rigueurs du climat italien.

Le passage de la girafe près d’Anay-le-Duc, tableau de Jacques Raymond Brascassat en 1827 (source © Musée des beaux-arts de Beaune / Radio France)

Toujours est-il qu’en avril 1827 arrive à Marseille le naturaliste Geoffroy Saint-Hilaire, ancien de l’expédition d’Égypte devenu professeur au Muséum d’Histoire naturelle de Paris. Il prend le temps de faire confectionner un vêtement imperméable et un bonnet à la girafe avant de prendre la route avec elle le 10 mai 1827 pour parcourir à pied les 880 km jusqu’à Paris, accompagnés d’une escouade de gendarmes et des 2 vaches soudanaises qui ont survécu, ainsi que des 2 antilopes et d’un mouflon. Le convoi finit par arriver dans la capitale le 30 juin et la girafe est solennellement présentée au roi à Saint-Cloud le 9 juillet, s’offrant le luxe de venir brouter quelques pétales de rose dans la paume du souverain, avant de se voir parquée au Jardin des Plantes avec une troupe d’Amérindiens, pour la plus grande curiosité des badauds parisiens, déclenchant une véritable passion pour cet animal exotique aussi étrange dont les représentations se multiplient un peu partout. La girafe finit paisiblement sa vie en 1845 et sa dépouille, empaillée, est depuis exposée au Muséum d’Histoire naturelle de La Rochelle. Le nom de Zarafa qui lui est restée, lui fut cependant attribué bien après sa disparition…

Gravure représentant la fameuse girafe offerte au roi de France en 1827 (source © Histoires royales)

C’est portant ce nom qui a été retenu par l’association Art Book Collectif (ABC) pour édifier en février 2009, sur la place Léon Blum, en face des allées de Meilhan, à l’occasion du premier festival du livre de la Canebière une forme de girafe de 6 m de haut, constituée d’un empilement de 3000 livres, en hommage au girafon qui débarqua jadis à Marseille et dont l’histoire, quelque peu déformée, a inspiré depuis un dessin animé franco-belge diffusé en 2012.

Le 15 mai 2010, Zafara s’enflamme, dans le feu de la victoire de l’OM en championnat de France (source © Tourisme Marseille)

Malheureusement, l’amour des livres et du ballon rond font souvent mauvais ménage et le second l’emportant généralement dans la cité phocéenne, la sculpture en question est partie en fumée le 15 mai 2010, victime d’un autodafé allumé par une bande de hooligans avinés qui fêtaient bruyamment le championnat de France que venait de remporter l’OM. Dès l’été 2010, nullement découragé, le collectif ABC se remettait au travail et érigeait à la place une nouvelle sculpture, munie cette fois d’une structure métallique plus pérenne et accompagnée de son girafon surnommé Marcel, lequel sert de borne d’échange de livres d’occasion.

En 2015, Zafara III et son petit girafon Marcel (photo © Art Book Collectif / Destimed)

Une œuvre d’art inaugurée en grandes pompes le 11 octobre 2010 en présence de Michel Vauzelle, alors président de la Région PACA, restaurée en 2015 malgré l’opposition du maire de secteur de l’époque, Sabine Bernasconi qui ne voulait pas en entendre parler, et dont la mairie de Marseille demande le déménagement quelques années plus tard, en novembre 2018, pour laisser la place au chantier de construction du complexe cinématographique, l’Artplexe. La girafe restera finalement tanquée derrière une palissade de chantier le temps des travaux mais il est désormais question de refaire entièrement l’aménagement de la place Léon Blum dont les travaux ont débuté en octobre dernier. D’où la décision de la mairie de secteur de répertorier enfin officiellement cette œuvre d’art, initialement éphémère mais devenue emblématique, désormais adoptée par la commune qui se chargera donc de la restaurer et de l’installer durablement dans son nouvel écosystème…

L. V.

2022 : un bilan pas très drôle…

3 janvier 2023

Et voilà : l’année 2022 vient de se terminer et une nouvelle année commence ! C’est l’occasion de souhaiter à tous nos lecteurs de ces petites chroniques épisodiques sans prétention une excellente année 2023, avec un regard critique et parfois décalé sur l’actualité, traitée de préférence avec un peu de recul pour ne pas tomber dans le catastrophisme et la désespérance…

C’est l’occasion aussi de jeter un peut coup d’œil dans le rétroviseur, histoire de se remémorer quelques faits d’actualité qui ont défrayé la chronique ou sont passés totalement inaperçus, sous les radars des viseurs médiatiques parfois à bien courte vue. Et pour ne pas voir les choses que du côté pessimiste, rien de tel que d’emprunter les lunettes légèrement grossissantes des dessinateurs de presse qui ont l’art de faire se télescoper, pour notre grand plaisir, les actualités les plus insolites, histoire de relativiser un peu tout ça et de ne pas tomber dans la sinistrose.

L’année 2022 qui vient de se terminer ne nous a pas apporté que des bonnes nouvelles, loin s’en faut, mais quand on ne retient que quelques dessins d’actualité traités avec autant d’humour que d’ironie, tout compte fait, on a bien rigolé quand même…

Janvier : la bise de tous les dangers, un peu comme en 2023 finalement… un dessin signé Miss Lilou
Février : Vladimir Poutine lance les troupes russes à l’assaut de l’Ukraine, provoquant la stupeur en Europe… un dessin signé Oli
Mars : le prix de l’essence atteint des records… Un dessin signé Na !
Avril : pour le second tour des Présidentielles, comme un air de déjà vu… Un dessin signé Dilem (source © TV5 Monde)
Mai : en prévision des législatives, la France insoumise de Jean-Luc Mélenchon concocte la NUPES… Un dessin signé Deligne (source © La Montagne)
Juin : pénurie de main d’œuvre en France dans la restauration… Un dessin signé Bauer (source © Le Progrès)
Juillet 2022 : les effets de la canicule, encore accentués en milieu urbain… Un dessin signé Sanaga (source © Blagues et dessins)
Août 2022 : Eric Ciotti et son obsession pour la cravate… Un dessin signé Zaitchick (source © Blagues et dessins)
Septembre : après 70 ans de règne, la reine Elisabeth II laisse sa place à son fils Charles III… Un dessin signé Karim (source © Blagues et dessins)
Octobre : la nouvelle chef du gouvernement britannique jette l’éponge en un temps record : un dessin signé Chappatte (source © Le Temps)
Novembre : alors que l’émission Plus belle la vie tire définitivement le rideau, le mondial de foot focalise l’attention : un dessin signé Alex (source © L’Union)
Décembre : alors que le Mondial de foot se termine au Qatar, une affaire de corruption éclate au Parlement européen… un dessin signé Emmanuel Chaunu

L’hérésie Qatar…

1 janvier 2023

Le jeu de mot est facile mais le rapprochement est tentant… Et pourtant, malgré l’homonymie apparente, voilà qui évoque des notions bien différentes, voire radicalement antinomiques ! Ce qui est resté dans l’Histoire comme l’hérésie cathare se voulait une recherche spirituelle de la pureté, en réaction aux dérives mercantiles et hypocrites d’une église catholique et de son clergé alors tout puissant. Le terme même de « cathares » pour désigner ces communautés chrétiennes qui se développent à partie de l’an Mil notamment dans le Languedoc, est très postérieur et l’on parlait à l’époque plutôt des « Albigeois ».

Cherchant à se rapprocher du mode de vie des premiers apôtres du Christ, les Albigeois ont été déclarés hérétiques à l’issue du 4e concile de Latran en 1215 et activement pourchassés. Nombre d’éléments de leur foi étaient alors considérés comme incompatibles avec le dogme catholique dominant. Leur croyance en la métempsychose des âmes les poussait à être végétariens avant l’heure tandis que leur recherche de la pureté les amenait à s’épanouir dans le travail, la pauvreté et la chasteté.

Ruines du château cathare de Quéribus, dans les Pyrénées, où des hérétiques albigeois trouvèrent refuge au XIIIe siècle (source © Tourisme Corbières-Minervois)

Adeptes d’une morale évangélique stricte, les simples croyants et plus encore, les « Parfaits » appelés à la prédication religieuse, s’abstenaient de mentir, de jurer, de voler et de s’adonner aux vices de toute sorte, tout en s’opposant aux excès de pouvoir des puissants de ce monde, seigneurs féodaux comme clergé percevant la dîme, ce qui explique qu’ils ont été aussi durement combattus et exterminés, à la suite de la croisade lancée contre eux par le pape Innocent III en 1208 et qui se termine en 1244 par le siège de Montségur, suivi de la mort sur le bûcher de plus de 200 Albigeois.

Une approche évangélique qui n’a bien évidemment aucun rapport avec l’hérésie environnementale et politique qui a consisté à attribuer en 2010 l’organisation du Mondial de foot 2022 à cet état minuscule de la péninsule arabique qu’est le Qatar, qui s’étend sur 11.500 km2 (soit à peine plus que le département français de la Gironde) pour seulement 2,4 millions d’habitants (autrement dit l’équivalent du département français du Nord). Brièvement possession portugaise en 1517, le Qatar est passé sous le joug ottoman dès 1538 et y est resté pendant 400 ans avant que les Britanniques ne s’en emparent et le gèrent comme un protectorat, avec son voisin Bahreïn.

Ville portuaire d’Al-Khor au Qatar, dans les années 1950, à une époque où la péninsule vivotait de la pêche et de l’industrie perlière… (source © Les Echos)

Il a quand même fallu attendre 1971 pour que les Anglais acceptent de se retirer du pays et accordent l’indépendance au Qatar qui en profite pour se détacher de la confédération des Émirats arabes unis qui se crée au même moment. C’est alors la famille Al Thani qui tient les rênes du pays depuis qu’un de ses représentants, l’entrepreneur Mohamed Ben Thani, a eu l’occasion de négocier un traité avec les Britanniques, suite à une rébellion avortée en 1867. En 1995, le cheikh Hamad ben Khalifa Al Thani, profit d’un voyage de son propre père en Suisse pour le renverser et prendre la tête de l’émirat où l’on a l’esprit de famille chevillé au corps.

Nicolas Sarkozy recevant en 2009 à l’Élysée l’émir du Qatar, le cheikh Hamad ben Khalifa Al Thani (source © Le Télégramme)

Le nouvel émir fait beaucoup parler de lui en créant la chaîne Al Jazeera, un média très en vogue dans le monde arabe et qui fera beaucoup pour la renommée du minuscule État. Devenu excessivement riche depuis la découverte d’hydrocarbures dans les années 1940, le Qatar était dans les années 2010 au 11e rang mondial des pays producteurs de pétrole, les revenus issus de l’exportation du pétrole représentant les deux tiers de ses ressources. Malgré son étendue microscopique, le Qatar détient actuellement les troisièmes réserves mondiales connues de gaz naturel derrière l’Iran et la Russie, et oscille entre la 4e et la 5e place des plus gros exportateurs de gaz, derrière les États-Unis et la Russie mais sensiblement à égalité avec l’Iran et le Canada.

Ramené à sa population infinitésimale, cela en fait un des pays les plus riches au monde avec un PIB par habitant estimé à plus de 70 000 $ par tête de pipe, inférieur à celui de Monaco, du Liechtenstein ou du Luxembourg, mais proche de celui de la Suisse ou de la Norvège. Si l’on prend en compte le fait qu’une large partie des habitants du pays sont en réalité des travailleurs immigrés pauvres, originaires d’Inde, du Népal, de Pakistan, du Bangladesh ou de Sri Lanka, le revenu par personne pour les ressortissants d’origine qatari est en réalité dans les plus élevés du monde.

Gratte-ciels luxueux à Doha, au Qatar, en plein désert… (source © Expedia)

Dans ce pays de Cocagne, 98 % des emplois sont, de fait, occupés par des travailleurs migrants, pour lesquels les conditions de vie sont tout sauf enviables, avec la pratique du « Kafala », qui vient tout juste d’être abolie et qui consistait à confisquer le passeport des travailleurs expatriés, lesquels ne pouvaient donc changer de poste ou quitter le pays sans l’accord de leur employeur : un esclavage moderne bien organisé…

La capitale, Doha, n’en finit pas de croître en grignotant le désert qui l’entoure, se parant sans cesse de nouveaux gratte-ciels, de villas luxueuses dans des lotissements fermés, de centres commerciaux démesurés, d’hôtels du dernier chic, d’universités high tech et de musées prestigieux. Dans le cadre de l’organisation du Mondial de foot 2022, 8 stades gigantesques ont été construits, quasiment tous climatisés à cause du climat local peu favorable à la pratique du sport. Selon une enquête publiée par The Gardian, au moins 6500 ouvriers sont décédés sur les chantiers de constructions des infrastructures sportives du pays depuis 2010. Le coût des investissements réalisés pour cet événement sportif est évalué à 220 milliards de dollars, à comparer aux 4,3 milliards investis par l’Allemagne pour organiser la même compétition en 2006 !

L’émir du Qatar, le cheikh Tamim ben Hamad Al Thani, remet le trophée du Mondial 2022 au joueur argentin Lionel Messi en présence du président de la FIFA, Gianni Infantino (photo © Laurent Zabulon / Abacapress / Histoires royales)

Pas étonnant, avec une telle débauche de moyens, que le Qatar se place, haut la main, comme le premier émetteur mondial de gaz à effet de serre du monde par habitant, avec un taux trois fois supérieur à celui des États-Unis, pourtant bien placés de ce point de vue… Comment a-t-on bien pu braquer tous les projecteurs du monde pendant cet événement sportif mondial sur un pays dont le mode de vie est une hérésie totale en matière environnemental, mais aussi social et politique ? Comme l’Arabie Saoudite, le Qatar fait partie de ces pays où la religion d’État est le wahhabisme, une des branches les plus rigoristes de l’Islam politique et où la confrérie ultra-réactionnaire des Frères musulman est comme chez elle.

Eva Kalli, vice-présidente du parlement européen, ici à Bruxelles le 7 décembre 2022, prise la main dans le sac dans une sombre histoire de corruption de la part du Qatar (photo © AFP / 20 minutes)

Un pays aussi où l’argent est roi et où tout s’achète, les voix des dirigeants de la FIFA comme celle des élus de l’Union européenne, comme l’a encore montré le scandale tout récent qui a conduit en prison la vice-président grecque du Parlement européen, après que l’on a retrouvé des valises entières de billets à son domicile, elle qui, en novembre dernier, déclarait de retour d’une visite officielle au Qatar, que ce pays était « chef de file en matière de droit du travail ». Une vision dithyrambique que n’aurait pas renié notre ancien président, Nicolas Sarkozy, lui-même grand admirateur de ce petit pays richissime et qui a tout fait pour en favoriser les intérêts, dans l’attribution de l’organisation du Mondial comme dans ses investissements en France, largement défiscalisés et qui entraineraient un manque à gagner pour le fisc français de 150 à 200 millions d’euros par an : une paille au regard de l’amitié avec nos amis qataris !

L. V.