Logement social primé à Carnoux

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Le logement social n’a pas toujours bonne presse, surtout auprès des élus locaux qui craignent de voir s’y installer des populations indésirables. Malgré la loi SRU qui impose depuis maintenant plus de 20 ans à certaines communes un taux de logements sociaux minimum avec des objectifs de rattrapages triennaux pour atteindre au moins 25 % d’habitations en logements social d’ici 2025, le compte n’y est pas. Et la métropole Aix-Marseille-Provence fait plutôt partie des mauvais élèves de la classe, au sein d’une région PACA elle-même à la traîne.

Lors du dernier bilan établi en 2019, sur les 2091 communes françaises soumises à cette obligation (grosso modo, les communes de plus de 3500 habitants, situées en aire urbaine, dont Carnoux-en-Provence fait partie), plus de la moitié d’entre elles n’avaient pas rempli leurs objectifs de rattrapage. La métropole marseillaise est particulièrement concernée bien que sa ville centre présente un taux de logements sociaux plutôt élevé, mais très inégalement réparti selon les arrondissements.

Le Hameau des Gorguettes, résidence sociale à Cassis (photo © ERILIA)

Pourtant plus de 80 % des Français sont éligibles au logement social ou intermédiaire, mais ces logements sont très insuffisants pour répondre à la demande qui s’accumule. Pour le seul département des Bouches-du-Rhône, on estime le nombre de demandes de logements sociaux en attente de traitement à plus de 90 000 ! Mais le parc social de 140 000 logements est loin d’être en capacité de répondre à une telle demande. Le taux de rotation est très faible et pour chaque logement qui se libère la file d’attente est longue…

Un dessin de Jean-Jacques Beltramo pour le podcast journal

Il faudrait donc construire davantage de logements sociaux, surtout dans les communes qui en manquent, afin de rééquilibrer l’offre et introduire davantage de mixité sociale. Mais la métropole marseillaise a bien du mal à répondre à ses objectifs. Pour l’année 2022, l’objectif fixé par l’État, qui cofinance largement cet effort via les aides à la pierre, était d’y construire 4950 logements sociaux, pour un total d’un peu plus de 12 000 sur l’ensemble de la région PACA. Mais on sera loin du compte avec moins de 2000 agréments accordés, moins encore qu’en 2021 !

Dans un tel contexte, on peut donc saluer l’effort entrepris par la commune de Carnoux qui, malgré son territoire relativement contraint et bien que très éloignée des objectifs de la loi SRU avec un taux de logements sociaux qui ne dépasse pas 16 %, ce qui l’a conduit à verser en 2021 60 000 € de pénalités à l’État, a entrepris ces dernières années la construction de plusieurs logements supplémentaires : 27 construits par la SOGIMA rue Gabriel Fauré puis 20 livrés par 13 Habitat en 2016 dans une nouvelle résidence face à la nouvelle Poste et enfin 60 supplémentaires achevés en 2021 par UNICIL à l’emplacement de l’ancien collège privé Saint-Augustin, reconstruit sur les hauteurs de Carnoux dans le cadre d’une opération immobilière un peu douteuse.

Résidence sociale 13 Habitat conçue par les architectes Fernandez et Serre, livrée en 2016 au centre de Carnoux (photo © Aldo Amoretti / AMC)

Avec ces nouvelles constructions, le parc de logement social de Carnoux atteindrait ainsi 485 logements, ce qui reste très insuffisant au vu des besoins, surtout pour les nouveaux ménages en quête d’un logement accessible, puisqu’on dénombre de l’ordre de 300 demandes en attente, alors que très peu de ces logements se libèrent.

On pourrait certes critiquer la composition de ces logements qui pour la plupart, surtout ceux construits récemment, sont hors de portée des ménages les plus modestes. On distingue en effet 4 grandes catégories de logements sociaux, selon leur dispositif de financement et le type de public concerné. Ceux qui s’adressent aux plus précaires sont de type PLAI tandis que les logements à loyer modéré classiques (les HLM, dans lesquels vivent un tiers des Français) relèvent de la catégorie PLUS (financés par des Prêts locatifs à usage social). Viennent ensuite les PLS qui permettent aux familles dont les revenus dépassent les plafonds d’accéder quand même à du logement aidé sans passer par le parc privé, de même que les PLI, mis en œuvre via un Prêt locatif intermédiaire.

Le jeu des élus locaux est donc en général, comme à Carnoux, de maximiser les catégories supérieures pour remplir leurs obligations réglementaires et bénéficier des aides à la pierre de l’État en attribuant des logements à leurs électeurs sans avoir à gérer dans leur commune des habitants à revenu modeste dont les besoins en accompagnement social sont plus exigeants. D’où la très faible proportion de logements de type PLAI dans les nouveaux logements de Carnoux.

Remise des prix du palmarès régional de l’habitat PACA à la Préfecture de Région le 10 novembre 2022 (photo © Robert Poulain / DREAL PACA)

Mais malgré cette réserve, force est de constater que l’effort entrepris par la municipalité de Carnoux pour construire ainsi de nouveaux logements sociaux dans une commune qui en manque cruellement, est à saluer. Et d’ailleurs la Ville est à l’honneur puisqu’elle fait partie des 10 lauréats que le Préfet de Région a souhaité mettre en avant en 2022 dans le cadre du palmarès régional de l’habitat PACA, dévoilé à Marseille le 10 novembre dernier.

La nouvelle résidence sociale UNICIL Le Saint-Augustin à Carnoux (photo © Antoine Pecatte / Agence Jérôme Siame architectes)

La nouvelle résidence sociale Saint-Augustin, conçue par l’architecte Jérôme Siame a ainsi été récompensée pour sa qualité architecturale et d’insertion paysagère dans un terrain à forte déclivité, derrière la gendarmerie et dans un environnement très pavillonnaire. Il n’était pas simple d’arriver à construire un tel ensemble dans un espace aussi contraint, comme cela avait été le cas auparavant rue Gabriel Fauré où l’implantation de la nouvelle résidence avait déclenché les foudres des riverains et force est de constater que la qualité architecturale de cette résidence ne peut que rassurer les Carnussiens quant à l’intérêt de développer ainsi un habitat social qui réponde au besoin de tous.

Les coursives du Saint-Augustin à Carnoux (photo © Antoine Pecatte / Agence Jérôme Siame architectes)

Pour autant, il reste bien du chemin à parcourir pour atteindre un jour la proportion réglementaire imposée de 25 % de logement social à Carnoux ! Et il ne s’agit pas d’une lubie de parlementaires en panne d’inspiration mais bien de répondre à un besoin vital pour les Carnussiens et notamment les jeunes qui entrent dans la vie active de se loger décemment alors que les prix de l’immobilier privé flambent et que de plus en plus de logements dans notre commune sont vacants ou sont réservés aux locations saisonnières si lucratives.

Certes, les opportunités foncières sont rares dans une commune aussi exiguë que Carnoux mais les opérations récentes effectuées montrent qu’il est possible de construire de petites résidences sociales bien intégrées dans un tissu pavillonnaire et il importe donc de repérer d’autres opportunités pour poursuivre cet effort le long du mail qui est l’axe le plus facile à desservir en transports en commun. L’espace situé derrière la mairie et la Crémaillère doit être prochainement réaménagé et il est tout à fait envisageable d’y implanter de nouveaux logements sociaux en plein cœur de ville : il serait vraiment dommage de rater une telle opportunité !

L. V.

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