Municipales : c’est reparti pour un tour !

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Lors du premier tour des municipales à Mulhouse, le 15 mars 2020 (photo © Sébastien Bozon / AFP / Libération)

On avait presque fini par l’oublier : les élections municipales, dont le premier tour s’était déroulé le 15 mars 2020, à la veille de la mise en place du confinement national pour cause de pandémie mondiale, ne sont pas terminées… Après plus de deux mois d’immobilisation générale, les candidats ont de nouveau des fourmis dans les jambes. Les maires sortants, comme Christian Estrosi, à Nice, ou Anne Hidalgo à Paris, qui n’ont pas réussi à se faire réélire dès le premier tour, ne pensent qu’à ça et exercent depuis des semaines une forte pression sur le gouvernement, largement relayée par l’Association des Maires de France, pour qu’on en finisse au plus vite avec ces élections suspendues.

Tous les arguments sont bons : repousser en septembre, voire en janvier 2021, la poursuite du scrutin, aurait obligé à refaire le premier tour dont ils avaient déjà obtenu de haute lutte le maintien, malgré un contexte de crise sanitaire plus que défavorable en mars dernier. Et cela repousserait d’autant le redémarrage des investissements communaux dont l’économie a tant besoin pour se redresser : à croire que la seule fonction des élus municipaux est d’utiliser l’argent public pour garnir les carnets de commande des entreprises…

Édouard Philippe et Christophe Castaner, le 22 mai 2020, annonçant l’organisation du second tour des municipales (photo © Benoît Tessier / AFP / Actu Orange)

Toujours est-il que leurs arguments ont été entendus par le gouvernement puisque le Premier ministre vient d’annoncer, vendredi 22 mai 2020, que le second tour des municipales aura lieu le dimanche 28 juin, dans un peu plus d’un mois donc. Le Conseil scientifique qui avait été consulté à ce sujet s’était bien gardé de se prononcer, considérant simplement que l’organisation d’un tel scrutin était possible, sous réserve de ne pas faire campagne… Un peu paradoxal et pas vraiment de nature à favoriser le débat démocratique ! Mais voilà en tout cas qui convient parfaitement à la plupart des responsables politiques de ce pays, davantage préoccupé de pouvoir attribuer de nouveau des marchés publics que de devoir perdre du temps à convaincre des électeurs de plus en plus volatils et soupçonneux à leur égard.

Même masquée, la République toujours en marche… (photo © Eric Ottino / Nice Matin)

Voilà donc le processus électoral relancé, avec de nouvelles règles puisque la distribution de tracts comme les réunions publiques et le traditionnel serrage des mains sur les marchés y seront prohibés ou réduits vraiment au strict minimum. A chacun d’être inventif et de privilégier les nouvelles techniques de télécommunication… Et bien entendu, le gouvernement se réserve le droit de revenir encore sur sa décision, 15 jours avant le scrutin, si la situation sanitaire devait évaluer. Une position qui convient parfaitement à la plupart des partis, extrêmement soulagés que le gouvernement ait pris ses responsabilités sans même demander un débat au Parlement : si l’affaire tourne mal, chacun pourra le critiquer tout son saoul sans qu’on puisse lui reprocher d’avoir contribué à une telle décision…

Même le secrétaire général du Parti communiste, Fabien Roussel, a jugé nécessaire de « pouvoir élire ces exécutifs qui manquent pour faire les appels d’offres, pour la politique culturelle, […] lancer des projets », tout en estimant, selon Libération, que l’élection ne devrait pas avoir lieu si, le 28 juin, « il y a encore des départements rouges » : un comble pour un dirigeant communiste !

Le 28 juin prochain, une bonne partie des Français vont donc retourner aux urnes, à l’exception de ceux qui, comme à Carnoux et dans plus de 30 000 communes françaises, ont déjà élu leurs conseillers municipaux dès le premier tour et qui sont en train, depuis le 18 mai, de procéder à l’installation de leur nouveau conseil et à l’élection du maire. Ce sera chose faite le mercredi 27 mai 2020 pour la commune de Carnoux, une réunion sans le moindre suspens et qui aura lieu à huis clos.

Un dessin signé Chaunu (source © Twitter)

En revanche, pour les près de 5000 communes dont 213 en région PACA, pour lesquels le premier tour n’a pas permis de conclure, il faudra retourner aux isoloirs, avec port du masque obligatoire et force giclées de gel hydroalcoolique. Dans la plupart de ces communes, 3 253 d’entre elles pour être précis, ce second tour risque de n’être qu’une formalité et n’est justifié que par le fait que le taux de participation au premier tour était trop faible pour permettre de renouveler la totalité du conseil municipal dont chaque membre, pour les communes de moins de 1000 habitants, doit avoir été choisi par au moins 25 % des inscrits.

Il ne reste finalement que 1541 communes où ce second tour des municipales revêt un véritable enjeu, même s’il s’agit bien évidemment surtout des principales villes, dont Paris, Lyon et Marseille. Dans cette dernière, tout peut encore arriver, au vu de l’émiettement des suffrages observé le 15 mars. La liste du Printemps marseillais, conduite par Michèle Rubirola, avait certes viré en tête et pourrait recevoir, au second tour, le renfort de la liste écologiste concurrente de Sébastien Barles qui négocie actuellement son ralliement. Mais le taux de participation était si bas que tout peut changer au second tour, d’autant que le mode d’élection par secteur ne permet pas de présager à l’avance de la manière dont sera choisi finalement le maire par un conseil municipal qui risque fort d’être assez disparate…

Samia Ghali aux côté de Renaud Muselier en septembre 2019 : un rapprochement en vue ? (source © compte Twitter Samia Ghali)

Dès l’annonce de la date du 2ème tour, le président LR de la Région PACA, Renaud Muselier, s’est d’ailleurs activé pour que s’instaure un « pacte de raison » regroupant tous ceux qui pourraient faire barrage au Printemps marseillais, de Bruno Gilles à Samia Ghali en passant bien entendu par Martine Vassal et Yvon Berland. Depuis, les négociations vont bon train, chacun cherchant à tirer son épingle du jeu et à négocier une place dans le futur conseil municipal ou ailleurs, quel que soit le choix des électeurs eux-mêmes… Seul l’écologiste Sébastien Barles a pour l’instant rejeté cet appel du pied en répliquant vertement, comme il se doit : « Le président de la région Sud perd le Nord, l’écologie reste notre boussole »…

Maryse Joissains-Massini, maire sortante d’Aix-en-Provence, toujours en lice pour sa réélection malgré une condamnation peu glorieuse (photo © Pascal Guyot / AFP / 20 minutes)

A Aix-en Provence, il y aura aussi peut-être des surprises le 28 juin, alors que la maire sortante, Maryse Joissains, bien que condamnée à un an d’inéligibilité pour détournement de fonds publics et prise illégale d’intérêt, était arrivée en tête du premier tour, marqué par un taux d’abstention record de près de 65 % et face à 9 autres listes…

On suivra aussi avec intérêt le second tour des municipales à Aubagne où les deux listes de gauche menées par Magali Giovannangeli et Denis Grandjean devraient fusionner, tandis que pourraient se maintenir la liste RN de Joëlle Mélin et celle de Sylvia Barthélémy, ce qui risque de compliquer quelque peu la réélection du maire sortant LR Gérard Gazay. Bref, le jeu politique de l’Ancien monde, pourrait reprendre du poil de la bête dans les prochaines semaines, de quoi égayer le quotidien tristounet en cette période de déconfinement progressif…

L. V.

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3 Réponses to “Municipales : c’est reparti pour un tour !”

  1. A Marseille, l’incertitude règne | Cercle Progressiste Carnussien Says:

    […] tour n’ont bien évidemment guère de valeur et laissent escompter bien des surprises lors du second, prévu dans 15 jours, le dimanche 28 juin 2020, plus de trois mois après, du jamais vu sous la […]

  2. Alteo : entre le marteau de la mondialisation et l’enclume de l’environnement | Cercle Progressiste Carnussien Says:

    […] au sein du prochain conseil métropolitain qui devrait se mettre en place début juillet, après le second tour des élections municipales. Il reviendra aux responsables politiques nouvellement élus de trouver à quel niveau placer le […]

  3. Municipales : l’écologie citoyenne gagne du terrain | Cercle Progressiste Carnussien Says:

    […] forcément, le second tour en question, qui s’est finalement déroulé le 28 juin, à une période où chacun se croit […]

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